Relations avec le Sénégal : Le Fmi roule en Mercedes vers la restructuration de la dette


Après avoir longtemps travaillé avec Edward Gemayel pour tracer un canevas de négociations, les autorités sénégalaises devront s’adresser dorénavant à Mme Mercedes Vera Martin, en ce qui concerne leurs rapports avec le Fonds monétaire international (Fmi). Cette dernière va superviser, pour le compte du Fonds, le processus de restructuration de la dette extérieure du pays. Un processus nié par Ousmane Sonko, mais que tous les observateurs estiment inévitable.
Ousmane Sonko avait proclamé, au cours de son Téra meeting, que le Sénégal n’allait pas se plier à «l’humiliation» de faire restructurer sa dette extérieure, suivant les injonctions du Fmi. Sans dire quelle alternative il restait au pays, le Premier ministre de Diomaye avait fait comprendre à ses militants que le Sénégal avait les capacités de s’en sortir sans avoir à passer par les fourches caudines de l’institution de Bretton Woods. Et comme c’est devenu de coutume, dès le lendemain, les eurobonds du Sénégal avaient perdu de leur valeur à la suite de la sortie du chef du gouvernement.
Or, voilà que des médias anglo-saxons, comme Reuters et Bloomberg, ont annoncé hier que la restructuration de la dette extérieure du Sénégal est juste une question de temps. Citant des sources internes à la Banque d’Amérique (Bank of America), Reuters déclare que «les négociations pour la restructuration de la dette et pour obtenir un moratoire sur la dette devraient s’amplifier au second trimestre de 2026». Les mêmes sources assurent que «la résilience du marché local permettra que les négociations sur la restructuration de la dette puissent démarrer au plus tard en 2026».
L’absence d’accord avec les partenaires bilatéraux et multilatéraux a permis au Sénégal de se tourner de manière massive vers le marché régional pour couvrir ses besoins en financements. Néanmoins, les sources de la Bank of America, citées par Reuters, estiment que la situation pourrait devenir intenable si cela ne changeait pas d’ici le second semestre de 2026. «Pour couvrir ses besoins de financement en 2026, le pays aurait besoin d’emprunter 25% de plus que ce qu’il a fait à ce jour, ce que nous n’estimons pas possible.» D’où la nécessité de restructurer la dette. Le Sénégal a déjà fait recours au marché régional de l’Uemoa pour près de 650 milliards de francs levés, qui s’ajoutent à l’énorme masse de dette intérieure. Tout cela devrait être payé à moyen terme.
Pour montrer que les partenaires internationaux sont loin des incantations de nos dirigeants, le Fmi pose des actes qui vont dans le sens d’une prochaine décision de restructuration de la dette du Sénégal.
Une dépêche de Bloomberg annonce le remplacement de Edward Gemayel en tant que chef de la mission du Sénégal au Fmi par Mme Mercedes Vera Martin. Cette dernière a occupé la même fonction en Zambie, poste qu’elle va d’ailleurs échanger avec son collègue Gemayel. Edward Gemayel a été chef de mission au Sénégal pendant 4 ans. Cette permutation, que les responsables du Fonds veulent faire passer pour une «routine après plusieurs années au même poste», est intéressante en ce sens que la Zambie a pendant longtemps été confrontée à un problème de restructuration de sa dette dont elle est en train de se sortir.
Vera Martin a été responsable de la Zambie depuis 2023, et a supervisé pour le compte du Fmi, la question de la restructuration de la dette de ce pays. Son mandat arrive à sa fin au moment où les créanciers de la Zambie, ainsi que les partenaires internationaux ont fini par trouver un accord pour la restructuration de la créance du pays de la Copper Belt. Les observateurs estiment que l’expérience acquise au cours de cette mission va probablement être d’une grande aide à Mercedes pour pouvoir se mouvoir dans les arcanes de la politique économique et financière du Sénégal, où les dirigeants qui s’expriment le plus fort ne sont pas ceux dont les décisions sont les plus pertinentes. Tout le monde a pu se rendre compte de cette vérité en regardant l’érosion de la valeur des eurobonds du Sénégal chaque fois que le Premier ministre exprimait son opinion sur des questions qui, pour la plupart de temps, ne relevaient pas de son domaine de compétence.

