Dakar abrite le 6ème congrès de la Société africaine de pathologie infectieuse (Sipa). Cette rencontre est jumelée au premier congrès de la Société sénégalaise de pathologie infectieuse et tropicale (Sosepit). Une occasion pour les infectiologues de se réunir, d’échanger et de discuter des défis de l’heure.

Infection à Vih, hépatites virales et maladies non transmissibles : Quels liens ? C’est le thème retenu pour ce 6ème congrès de la Société africaine de pathologies infectieuses (Sipa) qui coïncide avec le premier congrès de la Société sénégalaise de pathologies infectieuses et tropicales (Sosepit). Durant 3 jours, des experts infectiologues, issus de 20 pays africains américains, vont se pencher sur les préoccupations actuelles, les nouvelles données scientifiques concernant ces maladies, qui constituent en Afrique des problèmes de santé publique.
Pourquoi le choix du thème de ce congrès. Le chef de service des Maladies infectieuses de l’hôpital Fann répond. Pour le professeur Moussa Seydi, les liens entre les maladies infectieuses, telles que le Vih/Sida, les hépatites virales et les maladies non transmissibles sont connus depuis fort longtemps. Pire, souligne-t-il, ces liens se consolident dans le temps : «D’une part, les maladies non transmissibles comme le cancer et le diabète peuvent être les lits d’infection très graves, d’autres part, les maladies infectieuses sont à l’origine de certaines maladies non transmissibles qui causent des problèmes de santé publique.» A titre d’exemple, le professeur Seydi évoque le cancer qui est une maladie non transmissible. Il soutient que cette maladie a eu une origine infectieuse dans la plupart des cas en Afrique subsaharienne. Parmi les cancers d’origine infectieuse, il retient deux types de cancers, celui du foie et du col de l’utérus qui, selon lui, impliquent fortement les infectiologues.
En effet le cancer du foie, premier cancer de l’homme dans la sous-région, est dû à une infection des virus des hépatites B et C. «Il a causé la mort de plus de 788 mille personnes en 2015. Le cancer du col de l’utérus, premier cancer en Afrique de la femme, cause la mort de plus de 250 femmes chaque année», révèle-t-il. Une façon pour le professeur Seydi de montrer que les maladies infectieuses seront malheureusement encore présentes. «Les épidémies vont se succéder et encore et encore», prédit l’infectiologue. Et des fois, estime-t-il, elles vont nous surprendre comme ce qu’on a vécu récemment avec les épidémies à virus Ebola et à virus Zica.
Et aujourd’hui encore, il y a la Dengue chez nous. Moins grave, selon le professeur Seydi. Il estime que les données actuelles prouvent que le paludisme, qui est en phase d’élimination au Sénégal, pose plus de décès que la Dengue. En 2017, par exemple, les épidémies de Dengue ont été signalées dans la sous-région avec « 923 cas suspectés dont 2 décès en Côte d’Ivoire. Au Burkina Faso, ce sont 6 699 cas suspectés dont 13 décès et 510 cas suspectés dont 0 décès au Sénégal», note-t-il. Là où le paludisme tue plus de 17 à 34 fois plus que la Dengue.
Concernant l’infection à Vih, elle a entrainé depuis le début de l’épidémie, le décès de plus de 35 millions de personnes soit la population du Sénégal et celle du Mali réunie. Quant aux hépatites B et C, elles ont concerné 325 millions de personnes et causé la mort de 1, 34 million de personnes en 2015. Si on y ajoute les maladies non transmissibles, elles représentent près de 63% de la totalité des décès annuels et ont des liens certains dans beaucoup cas avec les maladies infectieuses. «Ceci montre que la lutte contre les maladies, notamment celles qui causent le plus de décès dans le monde, doit être globale et doit intégrer la notion one heath, c’est-à-dire la notion d’une seule et unique santé, ce qui impose une approche intégrée qui tient compte des inter-relations entre la santé humaine, la santé animale et environnementale tant au niveau local, national que mondial», conseille le professeur Seydi.
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