Le gouvernement laisse la société Eiffage seule face à la colère de l’opinion, tout en sachant que cette entreprise n’a, à ce jour, fait que se conformer aux termes du contrat de concession. Avec ses avantages et ses inconvénients.

Macky Sall a annoncé sa décision de renégocier les tarifs du péage, dont beaucoup de gens déclarent qu’ils sont prohibitifs. Dans la foulée de l’émotion entraînée par le décès accidentel du musicien Papis Mballo, le chef de l’Etat a indiqué que les futures négociations prendraient également en charge l’éclairage de l’autoroute. Dans la réalité, ces négociations sont prévues de longue date et leur ordre du jour connu de tous les partenaires. Macky Sall a donc juste voulu enfoncer une porte ouverte. Telles que les choses se présentent, il semble que le chef de l’Etat a voulu surfer sur l’émotion générée par cette affaire pour se donner une image de redresseur de torts dans une affaire où, à bien y regarder, la responsabilité est plus engagée que l’on y croit.
En effet, des documents que Le Quotidien a pu se procurer démontrent nettement que c’est le contrat de concession signé par Eiffage qui avait écarté la réalisation de certains ouvrages dans l’optique de minimiser les coûts et permettre à l’Etat de récolter une redevance plus importante. C’est ainsi que l’Etat, à travers ses représentants, avait écarté l’éclairage de certains tronçons du péage. Sans doute, ces gens n’avaient pas tenu compte du fait que les personnes venant ou se rendant à l’aéroport souhaiteraient être éclairées.
La même logique avait également prévalu en ce qui concerne la clôture de l’autoroute. Les adjudicateurs avaient privilégié le tronçon de Pikine qui était considéré comme la partie la plus populeuse, en négligeant la capacité de l’autoroute à faciliter l’ouverture de nouvelles zones d’habitation qui, à leur tour, auraient besoin d’être sécurisées. Sans compter le risque que représenteraient les animaux en divagation, ainsi que les agresseurs éventuels.
Si le gouvernement s’est plu à laisser le concessionnaire prendre les coups de la fronde avec les risques de développer des sentiments xénophobes pas toujours bien placés, vu que Gérard Sénac par exemple a depuis longtemps acquis la nationalité sénégalaise et que sa société, bien que filiale d’un groupe français, est reconnue comme de droit sénégalais, il n’a pourtant jamais renoncé aux avantages de ce partenariat.
Ainsi, quand il a fallu éclairer le rond-point menant à l’aéroport de Diass, Macky Sall a demandé à Eiffage de préfinancer les travaux parce qu’il fallait permettre à ses hôtes étrangers de remarquer la beauté de son nouveau joyau. Et bien avant la tragédie de Papis Mballo, certains autres endroits de l’autoroute ont commencé à être murés.
Et même sur le tarif que certains déclarent excessif, il a été prévu de longue date, entre les deux partenaires, de le renégocier. Une date avait même déjà été retenue depuis longtemps pour permettre de fixer de nouveaux tarifs. Et l’on peut être sûr que l’Etat ne s’oubliera pas, comme cela a toujours été le cas.
Le Quotidien avait déjà signalé depuis longtemps que contrairement à ce que l’on croit, la part de l’Etat n’est pas négligeable dans le prix du péage. Pour rappel, quand un usager paie 1 000 francs pour son passage, l’Etat, en plus de la Tva, y prend 31%. Les 25% vont au concessionnaire, tandis que les 44% servent à payer la dette contractée pour réaliser l’ouvrage. Mais cela, aucune communication n’est faite par les pouvoirs publics pour l’expliquer aux citoyens.
mgueye@lequotidien.sn