Hier dans l’après-midi, les avocats de l’Etat ont apporté la réplique à Me Jackson Francis Kamga, bâtonnier de l’Ordre des avocats du Cameroun, par ailleurs conseil de Khalifa Sall.

Après les propos de Me Jackson Francis Kamga, des missiles groupés ont été largués, hier, en direction du conseil de Khalifa Sall qui a rejoint son pays. Dans l’après-midi, Me Samba Bitèye a été le premier à prendre la parole pour répondre au bâtonnier de l’Ordre des avocats du Cameroun qui a utilisé des mots tels que «idiot, castré, dignité». «Il est choquant de prendre une foule qui se tait pour une foule silencieuse. Les Séné­galais ne sont pas castrés. C’est quelqu’un qui vient d’un pays où les avocats ne crient pas fort. Il y a des avocats en prison au Came­roun», a rétorqué Me Bitèye. Me Baboucar Cissé de lui emboîter le pas : «Je me devais de m’offusquer des propos qui ont été tenus par mon confrère, bâtonnier de surcroît. Le Sénégal n’a de leçons à recevoir de qui que ce soit, même pas des Socialistes de Paris.» Une allusion à la sortie de la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui dénonçait l’emprisonnement de Khalifa Sall à la veille de l’ouverture du procès.

Me Cissé à la défense : «On prie comme des lézards alors qu’on ne croit en rien»
Ce chapitre clos, Me Cissé a passé un temps de sa plaidoirie à railler les avocats du député-maire de la ville de Dakar. «De l’autre côté, on vous évoquait des versets du Coran, citait des passages de la Bible. Dans ce procès, il ne reste qu’à nous amener la croix», dit-il. Au juge Malick Lamotte et ses assesseurs, il dira : «Vous n’êtes pas le tribunal des lamentations. On pourrait aller se lamenter devant le mur des lamentations, mais ici, on est devant un Tribu­nal. On n’est pas devant un tribunal politique.» S’attaquant toujours à la défense, il ironise : «On prie comme des lézards alors qu’on ne croit en rien.» Et après les remontrances du juge à la suite de ces propos, l’auteur de la déclaration exprimera avec regret : «Je retire ce que je viens de dire et je présente mes excuses.» Pour clôturer son intervention, Me Cissé est revenu sur les délits d’association de malfaiteurs, de détournement et escroquerie portant sur des deniers publics, blanchiment de capitaux. «Les infractions sont établies. Quand on commet des erreurs, on les assume. On ne fuit pas ses responsabilités. Les faits sont têtus, constants et avérés. Leur culpabilité ne souffre d’aucun doute», réitère-t-il. Par ailleurs, Me Cissé a demandé le rejet de la demande de constitution de partie civile de la ville de Dakar qui est «irrecevable». Répondant aux avocats de la défense qui ju­gent «excessifs» les dommages réclamés par l’Etat, Me Yérim Thiam, un autre avocat de l’Etat, souligne : «Nous n’avons pas demandé 50 milliards comme ils l’ont fait, mais 5 milliards.» Il parlait des dommages et intérêts demandés par les conseils de Khalifa Sall à l’Etat auprès de la Cour de justice de la Cedeao.

Me Gaye au procureur : «Vous êtes assis sur beaucoup de dossiers»
Dans la phase réplique, Me Ous­seynou Gaye, avocat de la ville de Dakar, dit : «On est là pour nous battre en droit. Ici, on est dans une guerre et on n’utilise que ces mots.» Pointant un doigt accusateur vers le procureur, l’avocat ajoute : «Si les Sénégalais vo­yaient les autres dossiers venir ici, personne ne parlerait de procès politique. Le Parquet est le bras armé du pouvoir pour éliminer des adversaires. Vous êtes assis sur beaucoup de dossiers», jure-t-il en s’adressant au procureur de la République.
Pour prouver le contraire, Serigne Bassirou Guèye s’est levé de son siège comme pour dire que le Parquet ne garde aucun dossier. Rigolade dans la salle. De l’avis de Me Gaye, «l’Etat fait du tourisme judiciaire» dans cette affaire. Autrement dit, il n’a pas sa place dans le dossier de la caisse d’avance.
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