L’honorable député Guy Marius Sagna a entrepris de répondre au président Khalifa Sall sur la question de la monnaie.
Pour cela, il lui aurait fallu d’abord comprendre la proposition du candidat de la Coalition «Khalifa Président» sur la politique monétaire, ensuite savoir ce qu’est la politique monétaire et ses conséquences sur l’économie, et enfin, pour un panafricaniste souverainiste, pouvoir argumenter sans emprunter des phrases sorties de leur contexte d’un président du Medef (Georges Roux de Bézieux) qui a soutenu Macron contre Le Pen (qui défendait alors la sortie de la France de l’Union européenne donc de l’Euro) dont le programme a été considéré, par le Medef qu’il dirigeait, comme «une impasse».
Les propos du Président Sarkozy ont été aussi sortis de leur contexte. En effet, le discours cité défendait l’Euro non pas du fait qu’elle soit une monnaie communautaire, mais pour la renforcer contre le dollar. Ainsi, à l’occasion du sommet du G20 en 2011 en France, le Président Sarkozy sensibilisait ses homologues en ces termes : «C’est de notre devoir à tous de tout faire pour préserver la stabilité de la zone euro, car sans stabilité, il n’y a pas de croissance possible pour chacun d’entre nous.»
Guy Marius Sagna aurait dû alors avoir foi en l’expertise des économistes et experts africains pour tenir son argumentaire et comprendre le contenu du programme de la Coalition «Khalifa Président». Je vais l’y aider :
Le président Khalifa Sall milite pour une Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) plus forte, avec une monnaie commune, soutenue par plusieurs Etats. Il considère qu’une monnaie commune est un atout majeur pour le développement de nos pays. Il veut renforcer l’intégration économique sous-régionale, en promouvant des politiques visant à harmoniser les réglementations économiques et commerciales entre les pays membres de la sous-région et en encourageant la coopération dans des secteurs-clés tels que l’agriculture, l’industrie et les services, pour stimuler la croissance économique et réduire la dépendance aux importations. C’est étonnant que lui, Guy Marius Sagna, «panafricaniste» auto-proclamé, ignore que l’intégration au niveau sous-régional, y compris monétaire, est une étape fortement encouragée par l’Union africaine (Ua) dans le processus d’intégration à l’échelle continentale.
En bon panafricaniste, le président Khalifa Sall veut renforcer les institutions financières régionales chargées de superviser et réguler la politique monétaire, le système financier et les transactions économiques au sein de la sous-région. C’est à cet effet qu’il envisage des programmes visant à améliorer l’accès aux services financiers pour tous les segments de la population, y compris les populations rurales et les groupes défavorisés, en renforçant les initiatives visant à promouvoir l’entrepreneuriat, l’innovation et la création d’emplois dans des secteurs à fort potentiel de croissance.
Le député est-il au courant que depuis 2011, le dinar tunisien ne cesse de chuter ? Est-il au courant qu’en Tunisie, beaucoup commercent en euro, que le risque inflationniste pèse lourdement sur l’économie algérienne ?
Le député sait-il que la Coalition «Khalifa Président» est bien consciente des avantages de la monnaie communautaire, qui permet aux exportateurs et importateurs de la zone de se prémunir du risque de change, ce qui favorise les flux financiers et commerciaux. La garantie de convertibilité illimitée qu’elle assure est un facteur rassurant pour les investisseurs quant à la sécurité de leurs investissements et profits face au risque de crise de change. Elle l’est aussi de ses inconvénients. C’est dans ce sens que le président Khalifa Sall parle d’une vraie «monnaie commune, soutenue par plusieurs Etats» de la sous-région. Et aucun panafricaniste ne dirait mieux. Une monnaie pour une population de plus de 141, 7 millions d’habitants, avec la possibilité d’atteindre à terme, 350 millions d’habitants si l’on considère la Cedeao, en couvrant plus de 6 millions de kilomètres carrés. Ce qui permettra la promotion de l’économie locale, la stimulation de la production et de la consommation de biens et services locaux, ainsi que la réduction de la dépendance à l’égard des grandes entreprises et marchés mondiaux. De plus, cette monnaie peut favoriser l’inclusion financière en permettant aux personnes marginalisées ou non bancarisées de participer à l’économie locale.
Je n’irais pas jusqu’à taxer l’honorable député Guy Marius Sagna de malhonnêteté intellectuelle quand il interprète sciemment les paroles du président Khalifa Sall en disant que «le président Khalifa Sall semble dire que la zone Euro est un de ses modèles», alors qu’au fond de lui, il sait pertinemment que le président Khalifa Sall n’a rien dit de tel. Cela étant, M. Guy Marius Sagna devrait nous dire quel mal il y a de prendre comme modèle la zone Euro ? Nous pouvons affirmer avec aisance que la zone Euro est attractive vu le nombre de pays qui se bousculent pour l’intégrer. Parmi ceux-ci, nous pouvons citer la Turquie. Des pays comme le Maroc ont vu leur candidature se faire rejeter. De grands pays comme la France et l’Allemagne avaient toutes les raisons économiques pour garder leur monnaie nationale, mais ils ont compris qu’à ce stade de l’histoire européenne, il était nécessaire de passer le cap et d’adopter une monnaie unique pour toutes les raisons que nous avons citées, mais aussi pour faire face au dollar américain.
La Coalition «Khalifa Président» ne prône pas le maintien de la situation actuelle. Elle envisage la poursuite de la réforme engagée du F Cfa : le changement de la devise et le passage à l’Eco, la suppression du compte d’opération à la Banque de France, la suppression des sièges occupés par les représentants français au sein des instances de la Bceao. La coalition milite pour une monnaie souveraine mais ouest-africaine.
A travers sa réponse, le député a fini de montrer qu’il fait preuve d’un amateurisme inquiétant en ne nous disant pas comment ? Quand ? Pour combien d’années de souffrance du pauvre goorgoorlu ? En considérant des ruptures d’ordre constitutionnel comme le Président Macky Sall l’a fait le 3 février 2024 de dissidences.
Insistant dans l’amateurisme qui le caractérise, puisqu’endossant des textes prêts à l’emploi, le député restreint l’union monétaire au partage de la monnaie. Oh que non ! L’intérêt de l’Uemoa est qu’elle est une union économique et monétaire. En langage simple pour notre cher député, les pays composant l’Uemoa partagent «un espace économique harmonisé et intégré, au sein duquel est assurée une totale liberté de circulation des personnes, des capitaux, des biens, des services et des facteurs de production, ainsi que la jouissance effective du droit d’exercice et d’établissement pour les professions libérales, de résidence pour les citoyens sur l’ensemble du territoire communautaire». Et cela aussi, un panafricain digne ce nom ne saurait l’ignorer.
Enfin, Nous faisons donc savoir à l’honorable député Guy Marius Sagna que le président Khalifa Sall n’est pas guidé par ses passions. C’est un homme lucide, droit dans ses bottes, qui ne tâtonne pas. Il s’est préparé et est prêt à diriger le Sénégal vers des lendemains meilleurs.
Made Codé NDIAYE
Coordonnateur de la Cellule Prospective et Analyse (Caps)
de Taxawu Senegaal