La gestion de l’émigration irrégulière est au cœur des préoccupations de l’Etat, qui a engagé une panoplie de projets et programmes pour promouvoir l’emploi et l’employabilité des jeunes. La mise en œuvre du Programme d’urgence pour l’emploi, l’employabilité et l’insertion socio-économique des jeunes, adopté le 22 avril 2021, en est une illustration.Par Pape Moussa DIALLO
– C’est une question cruciale à régler : la résolution de la question de l’emploi et de l’employabilité des femmes et des jeunes pour non seulement leur permettre de rester et s’épanouir chez eux d’une part et d’autre part, de prévenir le phénomène omniprésent de l’émigration irrégulière qui est au cœur des préoccupations de l’Etat du Sénégal. Ce phénomène qui se développe à partir des côtes sénégalaises, a fait plusieurs victimes et provoqué l’éclatement de plusieurs familles. De janvier 2014 à février 2021, le nombre de migrants décédés enregistré lors des traversées de la Méditerranée s’élève à «21 548». Cette révélation est de Louise Sullivan, consultante pour «Better migration management». Toujours selon elle, «en 2020, une moyenne de 10 personnes par semaine sont mortes ou ont disparu en tentant de traverser la Méditerranée». C’est une réalité dramatique qui montre que les fonds marins sont un cimetière pour de nombreux jeunes.
Devant ces saignées en mer, il est urgent de prendre le taureau par les cornes pour, à défaut d’une solution définitive, réduire les disparitions qui continuent de vider l’Afrique, notamment le Sénégal, de ses bras valides. Bien que l’émigration et l’emploi soient des droits reconnus, leur gestion se pose avec acuité pour les pouvoirs publics, mais aussi pour la communauté africaine et internationale. Ce sont des questions à la fois complexes et contingentes pour ce qui est de l’émigration. A en croire le rapport des travaux de la première session ordinaire du Conseil économique social et environnemental (Cese), cela s’explique, entre autres, par «le poids démographique des jeunes». Selon les projections de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie(Asnd) en 2020, sur une population sénégalaise de 16 millions 705 mille 608 habitants, 5 millions 876 mille 460 ont un âge compris entre 15 et 35 ans, soit 66,60% de la population en âge de travailler (15-59 ans). Il s’y ajoute, soutient le rapport, le «choix inapproprié de certains jeunes qui ont opté pour la voie de l’émigration irrégulière mettant en danger leur vie, avec comme principale motivation le gain économique». Aussi listera le rapport comme facteur, «le problème de l’employabilité des jeunes et des caractéristiques structurelles du marché du travail sénégalais, indiquant clairement que le secteur privé informel, essentiellement urbain, représente la principale source d’emploi pour environ 90% de la population». A ce tableau, vient s’ajouter le taux de chômage qui est de 16,9%. De l’avis de certains se trouvant dans ce lot, l’émigration est une «alternative» au sous-emploi et à la pauvreté. Pour inverser la tendance et répondre aux préoccupations des populations, notamment des jeunes et des femmes, l’Etat a mis en place un dispositif important et mobilisé des ressources considérables pour promouvoir l’emploi et l’employabilité des femmes et des jeunes d’une part et d’autre part, faire face à ces problèmes.
Employabilité
Lors du Conseil présidentiel du 22 avril 2021, le Programme d’urgence pour l’emploi, l’employabilité et l’insertion socio-économique des jeunes, dénommé «Xeuyou ndaw yi», a été adopté et doté d’une enveloppe de 450 milliards de francs Cfa en 3 ans. Selon le chef de l’Etat, «ce programme est une réponse efficace aux besoins des jeunes en termes de formation, d’emploi, de financement de projets et de soutien à l’entreprenariat et au secteur informel». Revenant sur le modus operandi du programme, le président de la République avait déclaré : «Je tiens à ce que ce programme soit pragmatique et orienté vers l’action, mais opérationnel de façon diligente à l’échelle nationale. Il devra répondre aux exigences d’inclusion, d’équité territoriale et de justice sociale.» Le Conseil présidentiel a servi de cadre pour faire un diagnostic de la situation de l’emploi, de l’employabilité et de l’entreprenariat des jeunes pour mieux adresser la question. Ainsi, dira le chef de l’Etat, «nous voulons mesurer nos acquis, identifier nos contraintes, corriger nos insuffisances et améliorer nos performances. Il s’agit de dialoguer, de réfléchir et d’interroger nos pratiques afin de convenir de nouvelles dynamiques pour faire plus et mieux. Nous ne partons pas de zéro, parce que les préoccupations des jeunes pour l’emploi et la création d’activités génératrices de revenus ont toujours été au cœur des priorités que j’ai assignées aux structures et mécanismes de soutien, à l’encadrement et au financement des jeunes et des femmes». Il aura profité de ce cadre pour annoncer le renforcement des moyens de la Der et la territorialisation du financement. Aussi, il avait dévoilé le projet de construction de 15 nouveaux centres de formation professionnelle et technique. Cette volonté politique vient trouver un dispositif institutionnel déjà présent pour ce qui est de la gestion de l’emploi. Il s’agit notamment de ministères sectoriels, d’instituions d’accompagnement et de financements des projets professionnels, notamment le mécanisme du ministère de l’Emploi, de la formation professionnelle, de l’apprentissage et de l’insertion, le Programme des domaines agricoles communautaires (Prodac), l’Agence nationale pour la promotion de l’emploi des jeunes (Anpej), l’Agence pour la promotion et le développement de l’artisanat (Apda), la Délégation à l’entreprenariat rapide des femmes et des jeunes (Der/fj), le Fonds de financement de la formation professionnelle et technique (3fpt), l’Adpme, l’Anamo, le Fongip, etc.