Le mouvement d’humeur des travailleurs de l’Autoroute de l’Avenir ne semble pas ébranler la sérénité de la Direction générale, malgré l’appui des différents activistes. Aussi bien dans ses notifications à l’Inspection du travail que par ses déclarations à la presse, la Direction de la Secaa tient à afficher sa sérénité et sa disposition à maintenir le dialogue, en restant ferme sur l’intérêt de préserver l’équilibre social de l’entreprise.Par Mohamed GUEYE

– Des employés mécontents de leur situation sociale et professionnelle, on en trouve quasiment partout, et tous les jours. Mais qu’ils en viennent à accuser leur employeur d’attitude néocoloniale, l’accusation de­vient assez sérieuse pour être traitée par-dessus la jambe, d’autant plus que les délégués du personnel et les travailleurs se sont mis en mouvement et déclarent ne vouloir reculer sur aucun point de leurs revendications.
Pourtant, la direction de la Société Eiffage de la concession de l’Autoroute de l’Avenir (Secaa), se veut sereine et estime que le plus important est de maintenir les fils du dialogue, et que pour elle, rien dans la gestion de l’entreprise ne justifie la montée de fièvre au sein de la société concessionnaire du péage Dakar-Aibd.
Xavier Idier et ses collaborateurs se veulent également très clairs sur les cas individuels que les délégués du personnel ont voulu inclure dans leur plateforme revendicative. De leur point de vue, il ne peut plus être question que la dame Binta Sarr, à propos de laquelle une tentative de conciliation de la part de l’Inspection du travail avait échoué, ou que le sieur Raphaël Nzalé, qui a fait montre d’insubordination et envers lequel le contrat de confiance avec l’employeur semble définitivement rompu, puissent faire encore partie des effectifs. Le directeur et ses collaborateurs estiment qu’il s’agit dans ce cas, de préserver l’équilibre social de l’entreprise, tout en restant dans les strictes limites du droit du travail.
Car déjà, sur plusieurs situations, la Secaa semble être allée au-delà des exigences du Code du travail. Le véritable point de friction dans les revendications du personnel semble être l’ouverture du capital de la Secaa. Or, sur ce point, la société a fait comprendre que la politique d’Eiffage en la matière, est d’offrir à tous les salariés du Groupe, dans toutes les filiales de par le monde, de souscrire à des actions d’Eiffage, avec une décote de 20%. Et les souscriptions sont réalisées annuellement, par le biais de prêts accordés en interne.
Cette année, lors de l’ouverture de la période de souscription, un groupe de travailleurs a lancé un mouvement pour encourager le boycott de l’opération, sous le prétexte qu’ils préféraient plutôt entrer dans le capital de la Secaa. Ce qui techniquement, ne pourrait se faire, la maison-mère ne l’accordant pas. Cette situation a fait que beaucoup de travailleurs ont préféré rater l’occasion de devenir actionnaires d’Eiffage… pour n’avoir pas pu acquérir des actions de l’une de ses filiales !
La même «cohérence» dans la démarche, pousse les travailleurs à exiger des primes de risque, en lieu et place d’encourager l’entreprise dans la mise en œuvre des mesures de prévention et de protection sur le lieu de travail. Or, la Direction estime que, en plus de ne pas être prévue par le Code de travail ou la convention collective, la prime de risque n’est pas un moyen efficace pour prévenir ou maîtriser un risque.
Au-delà de ces considérations, la Direction de la Secaa a tenu à faire savoir que tous ses salariés bénéficient d’une assurance individuelle accidents, souscrite par la société, et qui couvre les cas d’incapacité totale ou de décès.
La Direction de l’Autoroute de l’Avenir a fait noter par ailleurs, que la société a connu des moments difficiles depuis l’année dernière, avec l’éruption de la pandémie du Covid-19. Elle a subi une très importante baisse de trafic, de l’ordre de 50% sur les mois de mars, avril et mai 2020, à la suite de restrictions sur la circulation imposées par les pouvoirs publics. Après cela, lors des émeutes de début mars 2021, certaines de ses installations ont connu des dégradations majeures, qui les ont rendues inopérantes.
Cela n’a pas conduit au licenciement ou même à la mise en chômage partiel d’un seul membre du personnel.
Les délégués du personnel se sont longuement épanchés sur les radios durant ces deux jours pour défendre leur mouvement. Ce matin, ils vont annoncer la suite à donner à leur combat. L’Inspection du travail a pour sa part, déjà été saisie et une mission de conciliation devrait entendre les différentes parties demain dans la journée.
En ce moment où Macky Sall et son Gouvernement se de­man­dent comment créer des emplois, il est à souhaiter que ceux qui en bénéficient sachent jusqu’où revendiquer sans casser la branche sur laquelle ils sont assis.
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