Le Collège des délégués de la Cbao, sous la férule de son président, a mis sur la table des revendications difficiles à satisfaire sans ébranler l’équilibre général de la banque. Les différentes médiations semblent laisser de marbre celui qui dernièrement aime bien s’afficher aux côtés de Guy-Marius Sagna et des membres de son mouvement. Dans l’optique de dégager les Marocains, faute de pouvoir le faire avec les Français ?
Par Mohamed GUEYE – «Un comportement de gosses de riches». C’est la réaction que, à l’Inspection régionale du travail de Dakar, on a face à l’attitude de certains membres du Collège des délégués de la Cbao Attijariwafa Bank. Ces derniers, conduits par leur président, agissent comme s’ils étaient déterminés à scier la branche sur laquelle ils sont assis juste pour satisfaire certains «caprices». Dans ce cadre, sous la forte influence du président M. Pape Doudou Tounkara, le Collège des délégués de la banque voudrait imposer une nouvelle clé de répartition de la prime de résultat distribuée annuellement aux employés en fonction des résultats de la banque. Grâce aux bons résultats de la banque, la prime de résultat permettrait à chacun des employés d’empocher au minimum un million de francs, suivant ses fonctions dans la boîte, et en fonction de ses performances.
Certains de ses collègues indiquent que Tounkara voudrait changer la clé de répartition de la prime parce que, selon les règles en vigueur, il ne serait pas des mieux servis, n’ayant pas parmi les meilleures notes dans l’entreprise. Si l’on sait que la meilleure note pour les performances est de 18, le président du Collège des délégués syndicaux se serait retrouvé cette année avec 12, contrairement à la forte majorité de ses collègues qui eux, ont eu des meilleures appréciations. Même s’il n’a pas voulu mettre en avant son intérêt personnel, Pape Doudou Tounkara a posé comme revendication que la direction change la clé de répartition, qui a été appliquée depuis une dizaine d’années, sans aucune contestation. Alors que, comme le lui ont fait remarquer les médiateurs, ce faisant, ce serait 60% des employés de la banque, ceux qui ont obtenu des meilleurs résultats, qui seraient alors lésés. Non content de cela, il demande également qu’en lieu et place des 5% du bénéfice annuel, ce soient 8% qui soient distribués aux plus de 1000 travailleurs de la banque, sans tenir compte des capacités de réinvestissement, ni des dividendces des actionnaires.
Plus, le syndicaliste, poussant toujours plus loin le bouchon de la revendication, est allé jusqu’à poser sur la table une demande d’ouverture du capital de la banque. En oubliant que la Cbao n’est qu’une filiale d’un groupe, dont le siège n’est même pas au Sénégal. Et mieux, Cbao Attijariwafa Bank n’est même pas cotée en bourse… Cela ne l’a pas empêché de tenir des sit-in devant le siège de la banque, au Plateau, pour fustiger, avec ses «camarades» de Frapp-France Dégage de Guy-Marius Sagna et de l’Acsif, «la mainmise marocaine sur les richesses du Sénégal». Est-ce suite aux conseils des leaders de Frapp et de l’Acsif qu’il a voulu organiser une marche des travailleurs jusque devant l’ambassade du Maroc ? Il a fallu en tout cas, un refus du préfet, le 14 février dernier, pour tuer dans l’œuf ce qui aurait pu conduire à un incident diplomatique avec le Royaume chérifien.
Le plus déroutant, à entendre parler ses collègues de la banque, c’est que les actions de M. Pape Doudou Tounkara ne semblent pas rencontrer l’assentiment de la majorité de ses collègues. L’ennui est que ces derniers, même surtout les autres délégués syndicaux, ne sont pas dans les dispositions de lui porter ouvertement la contradiction, et le laissent dérouler son agenda. Or, ledit agenda ne semble pas tenir compte des intérêts de la banque. Le Quotidien a appris qu’en glissement annuel, les résultats de ce premier trimestre ne seraient pas aussi bons que ceux de l’année dernière. Et en dehors de la crise qui affecte l’économie de manière générale, les observateurs estiment que l’action syndicale, les heures perdues à manifester et les craintes suscitées par les déclarations des activistes contre les nouvelles mesures prises par la banques, auront eu une conséquence plus forte sur les résultats de la banque.
L’ennui dans l’affaire est que la Cbao, qu’on le veuille ou pas, est la première banque de la place de Dakar. Elle donne une exposition à la place financière. Un remous qui l’affecterait, et qui ne se calmerait pas rapidement, finira par affecter toutes les autres structures plus petites. Un peu comme, toutes proportions gardées, la chute de Lehman Brothers en 2007 a eu aux Usa et en Europe. Et si cela arrivait, ce serait certainement parce que tout le monde aura laissé faire une personne à qui son titre de délégué syndical aura fini de monter à la tête.
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