Rions un peu de cet événement annoncé pour le 25 février prochain, même s’il est et reste la chose, politiquement, la plus importante, grave même, que l’on puisse organiser en une république : une élection présidentielle. Il faut donc et certes bien la préparer.

Cependant, entre les annonces de candidatures improbables ou carrément loufoques, les parrainages en veux-tu, en voilà -dont certains qui montent, qui montent, qui montent risquent de dépasser en nombre le corps électoral-, et les dépôts de caution fictifs ou provocateurs, sans parler des contentieux (déjà) préélectoraux interminables, qui transforment nos hautes cours en opéra bouffe, prendre cette affaire au sérieux est impossible pour un esprit simple. Pour les simples d’esprit, je ne sais pas…

Bref ! Comment faire court, être laconique, avec cette affaire qui prend toutes les allures du comique ? Je ne sais pas, non plus. Alors vous serez sûrement indulgent, cher lecteur, si je devais être long. Car entre les candidats «Pourquoi pas moi» et les candidats «Pourquoi pas» – dont il faudra bien que j’explique ce qui les distingue les uns des autres-, avant de parler des candidats «Retenez-moi ou je fais un malheur», il y a du travail. – Or, une amie malicieuse me dit qu’elle a même décelé des candidats «Je ne sais pas pourquoi», qu’il ne faut pas confondre avec les «Candidats compulsifs» qui, certes, jouent sans savoir pourquoi ils jouent (comme le «gambler» compulsif), mais ont déjà joué, parfois plus d’une fois, et perdu des millions de cautions électorales, n’ayant jamais atteint les 5% de votants. Ces derniers, les observateurs attentifs de la scène politique les identifieront d’eux-mêmes. Ce que d’ailleurs chacun devra faire pour les autres types de candidats, car il ne s’agit pas pour nous d’identifications individuelles, mais de catégorisation seulement.

Les individus concernés par chaque catégorie se reconnaîtront d’ores et déjà, et quand le filtre des parrainages retiendra, dans son filet, les porteurs, nombreux, d’illusions présidentielles, tout le monde saura qui était qui quand ce papier fut publié. Auparavant les piteux abandons nous auront attristés, mais les concernés, eux, n’auront pas tout perdu. Sans caution, sans pouvoir atteindre le nombre requis de parrains, ils auront eu leurs heures de gloire, grâce à une presse complaisante. Quelques illustres inconnus qui n’iront même pas à la Cour suprême déposer des fiches de parrainage ont fait la une de quelques quotidiens -parfois de sérieux organes parmi les 55 qui nous encombrent tous les jours- et des médias audiovisuels dont même des télévisions professionnelles, qui ne savent plus où donner de la tête à cause des autoproclamées chaînes d’information télévisée YouTube ; ces «ñoxor-njaay.com» que les professionnelles considèrent à tort comme des concurrentes et qu’elles suivent à la trace dans leurs dérives vers la recherche du buzz.
Bref, bref, bref !

Il ne suffit bien entendu pas de nommer les choses, il faut leur donner un contenu afin qu’elles soient signifiantes. Parce qu’il nous faut bien comprendre, pour ne pas mourir idiots, pourquoi nous avons eu plus de 300 candidats à la candidature.

Le candidat «Pourquoi pas moi» est ce quidam qui dans ses rêves les plus fous se voyait au plus maire d’une commune dans un bled, où peut-être, par la généreuse attention d’un président de la République et président de son parti, membre du Haut-conseil des collectivités territoriales.

Mais voilà, il a vu un député, moitié analphabète, qui lui avait arraché in extremis l’investiture de leur parti, se pavaner dans les médias pour annoncer sa «candidatiir» et le retrait de sa «fiss de parénaas» (c’est ainsi que s’exprime le candidat). Et le candidat «Pourquoi pas moi» s’est dit : «Si Tartempion peut, eh, bien, je dois pouvoir.» En voilà donc deux, un troisième a suivi, pour les mêmes raisons, et on s’est retrouvé avec une flopée de pauvres «Pourquoi pas moi» qui ne se rendent pas compte qu’ils sont risibles. Et que ceux qui, parmi eux, passeront l’épreuve du parrainage, sacrifieront 30 millions de francs de caution ; et plus encore lors d’une campagne électorale coûteuse, pour ne gagner que le ridicule -qui, certes, ne tue pas- avec un score de zéro virgule quelque-chose pour cent des votants.

Et c’est la même chose pour le candidat «Pourquoi pas» : lui, il n’était pas vraiment chaud. Il croule sous les millions, certes, les laudateurs de tout acabit le couvrent de torrents éloges, il a crevé l’écran quelques fois en faisant du «battrer» lors d’un show de You ou de Waly. Cependant, pas fou, il est resté loin du cirque de la politique, même si, quand la mode des créations de parti politique était à son apogée, il avait financé le congrès constitutif de la formation d’un ami.

Et voilà, c’est cet ami-là, à la tête d’une «forte délégation» qui a débarqué chez lui un soir pour le flatter, devant sa femme, et lui proposer son investiture par son «parti cabine téléphonique», selon la belle formule du regretté Ousmane Tanor Dieng. Quand il a fait mine de décliner l’offre, Madame, qui, depuis que Marième Faye Sall à introduit le cuuraay au Palais, a fait quelques rêves, «prémonitoires» d’après son marabout, lui a jeté un méchant xeelu !
Il a alors répondu oui.

Hourra !, a fait le groupe de lascars, spontanément passé direction de campagne, d’où l’on se projette déjà après le flop électoral, rêvant de se taper gratis l’un des 4X4 de campagne qui n’auront souffert que 21 jours de routes cahoteuses et de poussière.

La facture sera lourde pour 0,005% des suffrages, mais ne sera pas perdu pour tout le monde, on l’a vu.

Les candidats «Retenez-moi ou je fais un malheur», eux, on pourrait les nommer sans choquer personne. Ils viennent tous de Benno. Ce sont tous ceux qui avaient dit en même temps que tout Benno Siggil Senegaal : «Mbay yaa ñu doy…» Oups ! «Macky yaa ñu doy tant qu’il s’agit de nous choisir un candidat», et qui, quand ce fut Amadou, reçurent la nouvelle comme une gifle, et ne purent avaler la pilule. C’est que c’est un valium d’un mètre quatre-vingt-dix, ce Amadou…

Ces candidats «Retenez-moi…», eux aussi, risquent pour la plupart, sinon tous, de ne pas atteindre les 5% qui garantissent le remboursement de la caution. Mais, ce ne sera pas douloureux pour leurs dodus portefeuilles, ça se sait. Le défi difficilement relevable c’est d’échapper aux démons des campagnes électorales, avec leurs applaudissements narcotiques, qui vous font prendre des vessies pour des lanternes ; et vous font disjoncter, ridicules. Rappelons-nous celui qui, en 2019, revenant de St-Louis, avait cru que «foofu toc nako rajax». Sérieusement, le pari de Boun, Ali et Mame, c’est de glaner assez de suffrages pour, au très probable deuxième tour, pouvoir faire le beau et faire monter les enchères… c’est là qu’ils diront chacun, à leur camp : «Retenez-moi ou je fais un malheur !», si Amadou est finaliste pour ce deuxième tour plus que probable.
Les autres types de candidats, on va dire, les candidats sérieux, en dehors du presque sortant Amadou, sont Idrissa Seck, Khalifa Sall -que les derniers développements judiciaires de Dias-fils doivent sérieusement inquiéter s’il ne comptait que sur le parrainage parlementaire- celui que Sonko soutiendra aussi -sauf s’il se révèle piètre meneur de campagne- et puis, sans rire, Karim Wade, parce que ce qui reste du Pds peut bien en faire un acteur intéressant lors de ce deuxième tour que nous pressentons. Parce que, et pour finir, disons-le net, le premier tour de cette compétition risque d’être serré, et au second, sortiront du lot deux candidats ne totalisant pas à eux deux 50% des suffrages. Et alors, là, n’importe quel avant-dernier du classement avec zéro virgule machin des suffrages, risque de se retrouver parmi les faiseurs de rois, car les finalistes vont quémander des soutiens avec pour seule doctrine le «xeebul yéemul» des mendiants. Les conséquences dans la future gouvernance seront alors désastreuses…

D’ici là, gageons que nous allons nous amuser en février avec une campagne électorale animée comme un cirque. Ça nous changera -ce sera déjà ça- de deux ans de gatsa-gatsa.
Pape Samba KANE