«L’homme, avec le monde qui l’entoure, est une tâche à réaliser, un immense réservoir d’avenir», Ernst Bloch.

Ce n’est plus de l’humaine condition dont il s’agit ni ces résistances qui manquent de sens parce que trop politiques, ces dénonciations sans lendemains, faute de fondement spirituel, ces indignations suspectes parce que trop unanimes et trop collectives, ces colères évanescentes parce que trop empruntées, ces révoltes faciles parce non révolutionnaires, mais c’est de l’Humanité qui peine à retrouver sa place dans le corps de l’Homme devenu moderne depuis longtemps. Cette modernité devenue anomalie depuis belle lurette parce que trop politique. Et si ce n’était que cela ! Les choses sont encore pires. Il va falloir réinitialiser la civilisation humaine. L’avenir-mode d’emploi c’est : La reconnexion culturelle. Ce qui est arrivé à l’Occident n’a pas laissé indemnes les autres cultures du monde qui est trop éloigné de la philosophie traditionnelle. René Guenon l’a compris et a écrit dans Les états multiples de l’être : Lorsque cet «ésotérisme» est méconnu, la civilisation, n’étant plus rattachée directement aux principes supérieurs par aucun lien effectif, ne tarde pas à perdre tout caractère traditionnel, car les éléments de cet ordre qui y subsistent encore sont comparables à un corps que l’esprit aurait abandonné et, par suite, impuissants désormais à constituer quelque chose de plus qu’une sorte de formalisme vide ; c’est là, très exactement, ce qui est arrivé au monde occidental moderne.
Notre humanité en dérive s’est détachée des sciences anciennes, celles qui garantissaient notre équilibre et que toutes les religions ont professées avant que des religieux de tous ordres se sectorisent. Tous les systèmes éducatifs, laïcs ou religieux ont perdu de leurs fondements métaphysiques. Le premier remède est de reconnaître que l’on a tous échoué. Aucun religieux n’est supérieur à un autre dans l’absolu. Il n’y a qu’une seule religion, c’est la soumission au Bien. Les hommes ont commencé à perdre leur humanité le jour où ils ont cru être au-dessus des autres espèces dans l’absolu, or la supériorité ou l’infériorité absolue face aux autres éléments de la nature a fondé une idéologie mondialement partagée, une morgue et une arrogance, une pleine gloriole qui s’est transformée en sotte fatuité et qui finalement nous ont transformés en meurtriers incurables. Ceux en qui il reste des traces d’humanité, ces hommes qui ont des flashes ou des bribes de souvenirs d’initiations anciennes au Bien, ces gardiens à l’âme altruiste, ces anciens initiés qui ont participé à la préservation des valeurs qui garantissent la présence de l’homme ici-bas doivent être à l’œuvre, et ils le feront gratuitement.
Cependant, les génocidaires qui se disent «bouddhistes» antimusulmans (une contradiction) et les indignés médiatiques se retrouvent sur le même terrain de la politique. Auparavant, en cette Birmanie pays ultra-fermé, corseté par une tyrannie militaire méconnue dont le seul visage externe fut pendant des années Madame Aung San Suu Kyi, opposante historique à ce régime qui n’est même pas stalinien, actuelle «victime» ignorante de la politique, de la diplomatie et de la raison gouvernementale. Elle a été rattrapée par la politique et cette islamophobie quasi culturelle dans ce pays. Ceux qui la critiquent devraient attaquer plutôt ces manières particulières de gouverner qui ignorent l’Homme et que l’on enseigne partout. Pauvres de nous ! Je plains ceux qui ont des solutions politiques à tout. Mandela l’a compris qui est vite parti, sinon il ne serait plus Mandela. Auparavant, il y a très longtemps, ce fut d’abord le Peuple juif, les Amérindiens, les Aborigènes, les Cambodgiens, les Arméniens, les Tutsis… Aujourd’hui, les Rohingyas ou l’impossible génocide. Personne ne peut faire disparaître toute une humanité. A côté, dans la même Birmanie, un autre Peuple, les Karens (comme les Rohingyas), végète sous la botte de l’horreur, du supplice et de la mort permanente.
L’humanité est entièrement syndicalisée, elle a perdu alors son calme, se détachant du souverain Bien tant voulu par l’âme. Les philosophes et les poètes ont disparu, il ne reste que des humano-excités pauvres bougres tout juste alphabétisés qui hurlent derrière la démocratie, cette grande illusion. Il n’y a plus d’abbé Pierre, de mère Theresa, rien que des prix Nobel, mon Dieu ! Plus de Mandela, plus de saints laïcs puisqu’on refuse la sainteté aux laïcs. Ce monde est bien loin de l’émir Abdel Kader, le grand résistant algérien. Entre le 9 et le 17 juillet 1860 à Damas, Abd el-Kader s’est interposé par la force pour protéger les familles chrétiennes venues se réfugier en nombre dans le quartier des Algériens. Il en a sauvé près de 1 500 d’une mort certaine, alors que plusieurs milliers d’autres meurent. «Ne demandez jamais quelle est l’origine d’un homme, interrogez plutôt sa vie, son courage, ses qualités et vous saurez ce qu’il est ! Si l’eau puisée dans une rivière est saine, agréable et douce, c’est qu’elle vient d’une source pure.» Disait-il.
(A suivre)