Rupture des liens diplomatiques avec l’Algérie, crises avec l’Espagne, reconnaissance de la marocanité du Sahara : Le grand oral de Jawad Kerdoudi

Le président de l’Institut marocain des relations internationales, Jawad Kerdoudi, a fait une sortie pour commenter l’actualité diplomatique de son pays. Il parle d’acharnement de l’Algérie sur le Maroc depuis 40 ans. Il a aussi analysé le changement de ministre des Affaires étrangères de l’Espagne causé par l’accueil de Brahim Ghali, le chef des séparatistes du Polisario. M. Kerdoudi affirme que l’Espagne ne va pas pour autant changer si vite sa position sur cette question.Par Malick GAYE –
Jawad Kerdoudi a sa petite idée sur la tension qui prévaut entre Alger et Rabat. Pour le président de l’Institut marocain des relations internationales, le Maroc est victime d’un «acharnement de l’Algérie depuis 40 ans». Dans un entretien accordé au journal Le Point, Jawad Kerdoudi affirme que «l’Algérie a dépensé des milliards de dollars sur cette question. Au Maroc, on se dit que le Sahara nous appartient, il fait partie de notre intégrité territoriale. Le Maroc a historiquement récupéré le nord, le centre et le sud. L’Algérie de son côté prétend qu’il y a un Peuple sahraoui qui demande le Référendum, mais ce n’est pas possible puisque l’Onu n’arrive pas à constituer le corps électoral, c’est-à-dire ceux qui vont voter. On ne peut pas faire de Référendum sans liste de personnes qui vont voter. A cette myriade de problèmes s’ajoute l’annonce unilatérale de rompre les relations diplomatiques avec le Maroc le 24 août dernier. Alors que le roi Mohammed VI n’a cessé de tendre la main à l’Algérie dans tous ses discours, l’invitant au dialogue et réactiver surtout l’Union du Maghreb arabe qui est au point mort à présent et fait perdre près de deux points du Pib pour chaque pays».
Crise diplomatique avec l’Espagne
Dans la même logique, l’expert marocain s’est réjoui de l’attitude du gouvernement espagnol quand son ministre des Affaires étrangères a accueilli Brahim Ghali, le chef des séparatistes du Polisario. «Le Maroc a rappelé ipso facto son ambassadrice à Madrid et a vivement protesté auprès de la communauté internationale. Par la suite, le gouvernement espagnol s’est rendu compte de l’importance que le Maroc accorde à la question du Sahara. Il s’est aussi rendu compte que le Maroc était son premier partenaire commercial (plus de 1 000 entreprises espagnoles au Maroc, Ndlr) et qu’une grande communauté marocaine vit en Espagne et vice-versa. Eu égard à tous ces éléments-là, Pedro Sanchez a effectué un remaniement ministériel, révoquant la ministre espagnole des Affaires étrangères, considérée comme la principale responsable de l’affaire Ghali. Cela a créé un climat d’apaisement et des négociations en coulisse ont eu lieu entre le roi et l’Espagne», a commenté Jawad Kerdoudi. Qui estime que l’Espagne ne va pas changer sa position si vite sur cette question. Pour autant, le diplomate marocain estime qu’une convergence des positions est souhaitée.
La reconnaissance israélo-américaine du Sahara marocain
Interpellé sur la reconnaissance des Usa et d’Israël du Sahara marocain, Jawad Kerdoudi ne cache pas sa joie. Pour autant, il sait que cette avancée à elle seule ne va pas résoudre ce problème. «Il s’agit là d’une avancée des plus intéressantes. Mais en toute objectivité, ce n’est pas cette reconnaissance qui va résoudre ce problème qui est sur la table de l’Onu et, malgré le poids de l’Amérique, le pays de l’oncle Sam n’est qu’un membre parmi les quinze du Conseil de sécurité des Nations unies. D’ailleurs, les autres membres conséquents, comme la France ou l’Allemagne, n’ont pas suivi les Etats-Unis dans leur démarche. Donc le problème reste entre les mains de l’Onu», a dit M. Kerdoudi. Avant d’expliquer que le Maroc est pour la solution des deux Etats, s’agissant de la crise palestinienne. «Il y a près d’un million de Juifs d’origine marocaine qui vivent en Israël et qui ont toujours maintenu des liens forts avec leur pays natal. Et ils n’ont cessé de revendiquer le rétablissement des relations diplomatiques entre le Maroc et Israël», renseigne le président de l’Institut marocain des relations internationales. «Il y a un consensus essentiel qui s’est fait d’ailleurs après la signature du pacte d’Abraham dans lequel le roi a signifié que la question du Sahara est d’une haute importance chez nous au Maroc et que l’importance de ce dossier et tout aussi fondamentale que celui de la cause palestinienne», poursuit M. Kerdoudi. Avant de suggérer : «Maintenant, ce que nous espérons tous au pays, c’est que le Maroc intervienne auprès du gouvernement israélien pour lui dire que c’est de son intérêt de trouver une solution avec les Palestiniens, de former un Etat palestinien viable et qui cohabite avec Israël. Israël ne peut pas continuer à vivre éternellement avec des voisins qu’elle considère comme ses ennemis.»
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