Au 30 novembre 2024, le curseur de toutes les salles de négoce  pétrolier à travers le monde  scrute l’atlantique pour suivre le 3ème chargement de pétrole brut en provenance du champ Sangomar  à destination d’une raffinerie d’Europe de l’Ouest avec  1 000 000 de barils dans ses cals, soit plus de 50 milliards de F Cfa au prix moyen de  72 Us dollars le baril équivalent au brut d’Oman . C’est la 8ème cargaison pour le second  semestre 2024.

Pour le mois de novembre 2024,  c’est une production record de  2, 94 millions de barils de pétrole brut extrait du champ offshore de Sangomar, entièrement   commercialisée sur le marché international. Ainsi pour cette année  2024, la production annuelle devrait s’établir autour de 15 à 16 millions de barils de pétrole brut dépassant les prévisions de 4 à 5  millions de barils, l’estimation initiale d’output de 11, 5 millions de barils annuels.

Au prix  du baril  actuel, c’est un chiffre d’affaires 500 milliards de F Cfa pour juste 6 mois de production, avec un pic de production autour de 15 millions de barils. Un retour sur investissement anticipé de 20% qui dépasse de loin toutes les installations offshore en Afrique au Sud du Sahara.  Le titre de bourse de Woodside caracole à  la Bourse de Sydney en Australie, l’opérateur détient plus de 80% du Rssd Rufisque Offshore : la joint-venture commune avec Petrosen.
C’est à se demander si nos exportations de brut, en opérations offshore, c’est-à-dire en haute mer, passent et satisfont aux cordons douaniers et
fiscaux.

A ce jour, aucune goutte, aucun baril, n’est transformé, n’est raffiné ni  traité  un tant soit peu dans  notre raffinerie à Mbao, même notre quota autour de 30% des extractions, soit  25 000 barils / jour  est aussi exporté au même moment où les importations annuelles de pétrole et produits pétroliers du Nigeria atteignent annuellement 800 milliards de F Cfa.

Même le mélange gazeux issu de l’extraction pétrolière, qui peut bien servir de combustible aux centrales à gaz, est perdu dans le torchage, faute d’installations adéquates pour transporter ce gaz ségrégé  sur le continent auprès des centrales duales.

Et pourtant en 2019, déjà le ministre du Pétrole et des énergies de l’époque  anticipait la transformation locale du brut de Sangomar en validant le contrat entre la Société africaine de raffinage et l’entreprise d’ingénierie française Tecnnip Fmc d’un montant de 70 millions d’euros, soit 50 milliards de F Cfa. Un upgrade des unités de raffinage et une augmentation de la capacité simultanément, aujourd’hui c’est comme si le travail n’a jamais été exécuté,   c’est un travail  sans aucun effet sur l’aval pétrolier. C’est donc un manque à gagner de plus de 250 milliards de F Cfa  annuels pour l’économie si on n’escompte les 3 000 000 millions de barils de notre quota dans la production de Sangomar.

C’est toute la chaîne de valeur pétrolière qui représente 15% du Pib  qui subit cette perte,  voire un  préjudice économique et commercial  avec l’obsolescence  et l’impréparation  de la Sar.

Raffiner le brut de Sangomar, c’est d’abord capitaliser sur le combustible de la Senelec qui en importe plus de 300  milliards de Cfa annuels. Et pourtant, nous attendions ce brut depuis 1948 avec le rapatriement des archives de recherche  de l’Orstom et Brgm par le Président Senghor.  La Sar est la pionnière des raffineurs d’Afrique francophone, elle a 50 ans, mais n’a pas évolué, victime du manque d’ambitions de ses dirigeants, souvent les complices des importateurs et traders de pétrole et produits pétroliers. Et pourtant tout l’hinterland dépend de la Sar, surtout pour le carburant.

En attendant un état de lieux franc et sincère sur l’actionnariat de la Sar et le contrat léonin de Technip Sfm, nos huiles, malgré leur teneur en soufre, continueront de satisfaire les raffineurs européens et bientôt asiatiques, au grand dam de l’économie sénégalaise et des consommateurs du pays et des pays limitrophes.
Moustapha DIAKHATE
Expert Infrastructure et Politique Energie