Sommet Russie-Afrique – En présence d’une vingtaine de chefs d’Etat : Vladimir Poutine promet de nourrir l’Afrique

Comme on le disait, le commerce de céréales, qui est en train de devenir un outil diplomatique, a été au cœur du deuxième Sommet Russie-Afrique. Si les pays africains se montrent inquiets après la sortie de Moscou de l’accord céréalier, Vladimir Poutine rassure ses partenaires africains en promettant même du blé gratuitement à 6 pays africains plus exposés à des risques d’insécurité alimentaire. Dans ce contexte géopolitique qui polarise le monde à nouveau à cause de la guerre en Ukraine, le Président russe ne lésine pas sur les moyens pour avoir l’Afrique dans sa zone d’influence, qui ne cesse de s’élargir sur le continent.
Par Woury DIALLO (Envoyé spécial à Saint-Pétersbourg) – Le Sommet Russie-Afrique a été présidé, ce jeudi à Saint-Pétersbourg, par le Président russe, Vladimir Poutine. En présence d’une vingtaine de chefs d’Etat et de gouvernement africains dont le Président Macky Sall, Vladimir Poutine ne pouvait rater une telle occasion pour charmer le continent. Surtout en cette période de crise avec l’Europe, marquée par la guerre en Ukraine. Une crise accentuée par le refus de l’Etat russe de prolonger l’accord qui garantissait depuis un an l’exportation des céréales ukrainiennes, et qui risque de plonger le continent africain dans une insécurité alimentaire. Naturellement, dans son discours, le Président russe s’est voulu rassurant à l’endroit de ses hôtes de marque. «Il y a beaucoup de discussions utiles et constructives. Des idées prometteuses et propositions pour de nouveaux projets mutuellement bénéfiques, des arrangements pratiques spécifiques et des contrats commerciaux sont à l’étude. Le potentiel de l’Afrique est évident pour tout le monde», dira Vladimir Poutine, lors de l’ouverture du Sommet. Avant de rappeler les échanges commerciaux entre les deux parties. Le patron du Kremlin espère renforcer cette relation, notamment dans le commerce de céréales qui est en train de devenir une arme géostratégique et diplomatique. «Je remarque qu’à la fin de l’année dernière, le commerce russo-africain a atteint les 18 milliards de dollars. C’est l’un des résultats évidents du Sommet Russie-Afrique de Sotchi. Je suis sûr qu’ensemble, nous pouvons renforcer le commerce de manière encore plus drastique dans un futur proche. Et, d’ailleurs, durant la première moitié de cette année, le volume des opérations commerciales avec les pays africains a augmenté de plus d’un tiers. Les structures commerciales sont aussi bonnes : plus de 50% des apports russes à l’Afrique sont des machines, des outils, de l’équipement, des produits chimiques et agroalimentaires.»
Sur ce chapitre, souligne-t-il, «la Russie a exporté 11, 5 millions de tonnes de céréales vers l’Afrique en 2022, et près de 10 millions de tonnes dans les six premiers mois de cette année… D’un côté, les pays occidentaux entravent nos fournitures en céréales et engrais, de l’autre -je le dirais crûment-, ils nous blâment de manière hypocrite pour l’actuelle situation du marché mondial agroalimentaire. Cette approche a été particulièrement claire dans la mise en place de l’accord céréalier conclu avec la participation du Secrétaire général de l’Onu et qui devait à la base assurer la sécurité alimentaire mondiale, réduire les risques de famine et aider les pays les plus pauvres, et notamment l’Afrique».
Et le Président russe de préciser : «Néanmoins, pendant environ un an, sous le régime de cet accord, un total de 32, 8 millions de tonnes de produits ont été exportées depuis l’Ukraine dont plus de 70%, chers amis, sont allés vers les pays les plus riches et notamment, en premier lieu, l’Union européenne, alors que des pays comme l’Ethiopie, le Soudan, la Somalie et nombre d’autres n’ont reçu que moins de 3% du total, soit moins d’un million de tonnes.»
A l’en croire, «rien de ce que nous avions négocié et de ce qui nous a été promis n’est arrivé. Aucun des termes de l’accord, qui concernait l’exclusion des exportations de céréales et engrais russes des sanctions, n’a été mis en place. Aucun !».
25 à 50 mille tonnes de céréales gratuitement à six pays africains
Poursuivant, Vladimir Poutine ne manque pas de dénoncer «des obstacles» mis en place et qui auraient entravé le «don -et nous venons d’en parler avec mes collègues et les représentants de l’Union africaine- d’engrais aux pays les plus pauvres. Des 262 mille tonnes d’engrais bloquées dans les ports africains, seuls deux cargos ont pu être envoyés. Seules 20 mille tonnes vers le Malawi et 34 mille vers le Kenya. Le reste est resté entre les mains des Européens. Et ce, en dépit du fait que nous parlons d’une opération purement humanitaire, à laquelle aucune sanction ne devrait être opposée. Très bien, il y a des gens qui ne veulent pas que la Russie s’enrichisse en commerçant à des fins militaires. Mais c’était un transfert à titre gracieux ! Mais non. Et ce malgré toutes ces conversations vaines concernant l’aide aux pays les plus pauvres».
Pour corriger les impairs, Vladimir Poutine promet de fournir «au Burkina Faso, au Zimbabwe, au Mali, à la Somalie, à la République Centrafricaine, à l’Erythrée, 25 à 50 000 tonnes de céréales gratuitement, dans les prochains 3 à 4 mois, et les livraisons aux consommateurs seront aussi gratuites».
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