Depuis de nombreuses années, les méthodes de ­règlement extrajudiciaires des conflits occupent une place de plus en plus importante dans la régulation des conflits. La conciliation, la négociation, l’arbitrage et la médiation apparaissent à cet égard comme des Mécanismes ­alternatifs de règlement des conflits (Marc). Elles ont même donné naissance à une nouvelle ­catégorie de consultants en ­développement – les médiateurs.
Le Sénégal n’a pas échappé à ce phénomène et divers types de médiations, aussi bien ­formelles ou institutionnelles qu’informelles ou non institutionnelles, sont notés dans la gestion des conflits en général et dans les conflits fonciers en particulier. En Afrique en ­général et dans notre pays en particulier, la médiation est une pratique ancestrale, ­couramment pratiquée dans les villages. Cette pratique puise ses origines dans la parole, ­l’oralité, «la palabre». Aujourd’hui cette forme ­traditionnelle continue et coexiste avec la médiation contemporaine, reconnue et formalisée par le droit positif sénégalais. Cette médiation formelle est ­pratiquée dans presque tous les secteurs d’activité, notamment dans les domaines économique, financier et social… et par beaucoup d’institutions comme la justice, les chambres de commerce, les maisons de justice, mais ­également par le médiateur de la République.
Cependant, les nombreux cas récents, comme Ndingler et Dougar, sont révélateurs de la recrudescence des conflits fonciers. Ce qui montre d’une part, que les règlements étatiques, juridictionnel et administratif, sont inefficaces et d’autre part que la réforme foncière et l’acte III de la décentralisation n’ont pas permis de pallier ces ­dysfonctionnements. Il devient alors nécessaire, à l’instar de beaucoup de pays, d’ancrer la médiation foncière au Sénégal, en créant le métier de médiateur foncier.
On observe cette tendance à la professionnalisation de la médiation foncière dans ­beaucoup de pays, des ­­­Etats-Unis où elle connaît un véritable engouement, à la Chine où elle est pratiquée depuis une centaine d’années, sans oublier les pays européens. En France, on assiste à la création de médiateurs agricoles, chargés de gérer les conflits fonciers dans le monde rural. La création de cette nouvelle profession en 2015 en Polynésie française, a permis de d’augmenter fortement le taux de réussite lié à la résolution des conflits fonciers. La Fao a recours également à ce mode de résolution dans les zones de conflits. Par exemple, en 2003, elle déroula avec succès, un programme de médiation foncière en République démocratique du Congo. Beaucoup de femmes et associations féminines furent ­impliquées et formées aux techniques de la médiation ­foncière.
Ce nouveau type de ­régulation allie les principes ­traditionnels et modernes de la médiation et répond ainsi aux besoins de souplesse, de ­rapidité et d’efficacité, indispensables au maintien des liens sociaux. Aujourd’hui, pour une gestion efficace et durable des conflits fonciers, beaucoup pays privilégient la médiation au détriment du procès. Sortir des conflits fonciers, suppose donc, de promouvoir dans notre pays ce mode de régulation, beaucoup plus adapté à notre réalité ­sociologique.

Dr Tabouré AGNE
Consultant-formateur en ­médiation foncière
agnetaboure@yahoo.fr