Par Justin GOMIS – 

Une bonne synergie des actions, c’est ce à quoi Pr Amadou Tidiane Guiro invite tous les ministères, pour l’atteinte d’une souveraineté alimentaire au Sénégal. L’ancien Recteur de l’Université du Sine-Saloum intervenait mardi, à la célébration annuelle de la Journée de la renaissance  scientifique de l’Afrique (Jrsa) organisée par l’Académie nationale des sciences et techniques du Sénégal (Ansts).
«Il faut d’abord une volonté politique pour opérer toute rupture dans le secteur de l’agriculture. Pour la souveraineté alimentaire, ce sont tous les ministères qui doivent agir (Pêche, Elevage, Agriculture, Educa-tion, Culture).Il faut une bonne synergie des actions. Il faut que le droit à l’alimentation soit réaffirmé et qu’on travaille véritablement dans ce sens. Il faut augmenter les investissements dans l’agriculture, augmenter le budget, faire un investissement massif dans l’agriculture comme on le fait dans d’autres secteurs comme celui des transports. Il faut mettre énormément d’argent dans l’agriculture pour relever les défis et assurer notre sécurité alimentaire», préconise l’universitaire.
Placée sous l’égide du Ministère de l’enseignement  supérieur, de la recherche et de l’innovation (Mesri), la Jrsa de cette année a pour thème : «La souveraineté alimentaire, droit ou objectif de politique.»
A ce propos, relève le scientifique, «le coût des importations, en particulier des céréales, vaut l’équivalent de ce que nous gagnerons dans le pétrole. La manne financière qui est attendue du pétrole est l’équivalent de ce que nous allons acheter à l’extérieur». Ce qu’il voit comme un problème. Car «la démographie du Sénégal croît à un rythme fulgurant. Au Sénégal en 1990, la population était de 7 millions. En 2019, elle a été estimée à 16, 5 millions d’habitants, soit le double. En 2023, elle est de 18 millions. En 2040, elle sera de 28 millions… Il faut nourrir ces gens», a fait savoir Pr Guiro dans sa présentation. D’après lui, «chaque Sénégalais consomme au moins 80, voire 100 kg de riz par an, et la moitié de ce riz est importée. On importe aussi beaucoup d’huiles. Quand on regarde les rayons des supermarchés, on a toutes les huiles du monde. Et on ne sait même pas ce qu’il y a dedans. Pourtant nous sommes les champions de l’arachide…».  A l’en croire,  la situation de la sécurité alimentaire est préoccupante. «Seuls 57% des Sénégalais ont une sécurité alimentaire acceptable. Tous les autres n’ont pas une sécurité alimentaire acceptable», a-t-il  dit.
S’appuyant sur le document Compact Senegal de la dernière rencontre qui s’est tenue à Dakar sur la souveraineté alimentaire et la résilience, Guiro rappelle qu’il y avait «17% des ménages qui étaient en situation d’alimentation modérée. Et lorsque l’alimentation manque, les enfants sont les premiers à en souffrir. S’ils ne mangent pas assez, ils souffrent de malnutrition qui peut être aiguë». Et d’ajouter qu’il y a «10% des enfants qui sont touchés par une malnutrition aiguë, faute d’une alimentation correcte. Quand la malnutrition est chronique, l’enfant a un retard de croissance. 17% d’enfants souffrent de malnutrition chronique. A côté de cette malnutrition, il y a la carence en fer. La moitié des femmes et des enfants ont une carence en fer, parce que leur alimentation ne leur fournit pas suffisamment de fer», a-t-il déclaré. Avant d’indiquer, «les facteurs de risques de maladies non transmissibles telles que l’hypertension artérielle, le diabète, liés aussi à la mauvaise alimentation». Laquelle, dit-il, est  caractérisée par une forte dépendance de l’extérieur qui se traduit toujours par des importations.
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