Seul sur scène pendant près de deux heures, l’humoriste Libanais Yass a ému autant qu’il a fait rire son public qu’il a fait voyager entre le Liban de ses racines et le Sénégal, son pays adoptif. Pour lui le plus difficile a été de contenir ses émotions avant d’aller sur scène, a-t-il confié au terme de son spectacle. «Yass rembobine» c’est le titre de ce spectacle donné jeudi dernier à Sorano.

«Bien sûr que j’ai le trac, que je suis excité, stressé, eu­phorique, angoissé et déjà ému», disait Yass dans l’édito qui présentait en quelques lignes son spectacle intitulé : «Yass rembobine.» Bien sûr, revenir 10 ans après avoir monté son premier one man show et jouer seul sur scène avec de nouveaux personnages, une nouvelle histoire face à ceux qui l’aiment et qui l’ont vu peut-être naître, ce n’était pas du tout évident pour l’artiste. Et d’ailleurs, il l’a fait savoir au terme de son spectacle qui a duré presque deux tours d’horloge.
«Je devais faire attention de ne pas être submergé par l’émotion avant le spectacle. Sinon j’allais perdre les pédales. Au début j’ai réussi à contrôler cette émotion. Mais à un certain moment, c’était compliqué», souligne l’humoriste tout fier d’avoir produit un spectacle bien apprécié du public. «C’est le résultat d’un travail bien fait !» Un travail de longue haleine surtout. «Vous venez d’assister à un accouchement. La grossesse a duré 18 mois. L’écriture et les répétitions ont pris un an et demi. J’ai fait une retraite d’écriture à Montréal, au Canada, parce que je voulais être loin. Je voulais sortir de ma zone de confort. Et il n’y a pas un jour où j’ai posé une ligne, un mot sans penser à Daniel Sorano», confie Yass submergé d’émotion.
L’émotion était bien au rendez jeudi dernier à Sorano. Debout au milieu de la scène ou assis, bercé par les paroles de la chanson Ahwak de Abdel Halim Hafes interprétée par Adham Shaloub, Yass racontait son histoire. Ou plutôt l’histoire de ses parents qui sont tous le deux décédés. Mimant à la perfection la voix, les gestes et les caractéristiques de ses différents personnages, Yass a réussi autant à faire rire qu’à émouvoir et à distiller dans la salle des bribes d’amour qu’il a reçues de ses parents, de Dakar sa ville de naissance, la ville où il a grandi et du Liban, son pays d’origine.
«J’ai eu la chance d’être né à Dakar, d’avoir grandi à Dakar, j’ai fait l’école Cathédrale. Il y avait une part de nostalgie et je voulais rendre hommage à l’amour que l’Afrique m’a donné et que mes parents m’ont donné.» Avec une énergie contagieuse, Yass invite son public à percer l’univers de sa mère Jahda, la femme à la cigarette, qui tenait une mercerie nommée La pagaille, de son père Mohamed dit Syed et de ses apéros et de Tanti Maïmouna qu’il considère comme sa seconde mère. Et par le biais de ces derniers, qui sont les personnages principaux de son spectacle, l’artiste chante tout son attachement à Dakar, à l’Afrique mais aussi au Liban.
Entre son cèdre et son baobab, Yass déroule confortablement son spectacle. Et pour lui, il a vraiment eu raison de rembobiner. Surtout que Tanti Maïmouna, l’un des personnages de son histoire, était là toute émue de le suivre. Il l’invitera à la fin à le rejoindre sur scène.
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