Il est peut-être le candidat le plus âgé de l’histoire du Bfem dans le pays. N’empêche, il a tout de même réussi à décrocher son sésame. Candidat à l’examen du Brevet de fin études moyennes (Bfem) de cette année, Ibrahima Sy, 72 ans, a été déclaré admis à l’issue des épreuves du second tour au jury du centre de Kothiary, dans l‘Ief de Goudiry.
Né en 1947 à Bala, une commune dans la zone de Goudiry, Ibrahima Sy, plus connu sous le nom de Sy Bathie, est un véritable téméraire. Les nombreuses années passées n’ont pas altéré son esprit qui demeure toujours très vif et son imagination fertile. En atteste l’exploit réussi de décrocher le Bfem à 72 ans. Le visage ridé, les gestes lents, la voix gagnée par l’âge, il a été trouvé assis sur une table-banc d’écolier, sous un arbre, à Kothiary, certainement en train de méditer sur le parcours fait pour en arriver à ce résultat. Vêtu d’un caftan de couleur vert olive, le bonnet bien vissé sur la tête, Sy Bathie s’est réjoui d’avoir réussi ses études cette année. C’est après de durs sacrifices que la réussite a suivi, a-t-il expliqué d’une voix éraillée par le poids de l’âge. «Intelligent et très studieux, je l’ai été», a raconté le «néo breveté» de 72 ans. Sur son cursus scolaire, il dit avoir été jusqu’en classe de troisième. Cela, dans les années 1960. «C’est en 1966 que j’ai fait la 3ème. A l’époque, j’étudiais à l’école Adventiste, près du cinéma El Mansour», raconte-t-il. Après l’école primaire à Goudiry et le Cepe en poche en 1961, je suis allé à Dakar pour continuer mes études. L’année suivante, j’ai réussi à l’entrée en 6ème à l’école de la rue Thiong. C’est en classe de 4e que j’ai eu quelques soucis qui ont un peu perturbé ma scolarité. N’empêche, en 66, j’ai fait la troisième à Adventiste. A l’examen, j’étais tellement sûr de moi que je ne pouvais même pas m’imaginer au second tour. Cependant, à la sortie des résultats, il était indiqué que je devais subir les épreuves du second groupe. J’étais hors de moi et j’ai pensé que c’était injuste. J’ai boycotté les épreuves et décidé de tourner le dos à l’école. J’étais bien en maths et dans les autres disciplines scientifiques. En français, j’étais aussi à l’aise, car la lecture est ma passion.

Obtenir le Bfem, un défi pour le vieillard
Après avoir vu ses études arrêtées, notre candidat s’est envolé pour la France comme savaient le faire à l’époque ses parents Boundounke. «En 1968, j’ai quitté le pays pour une aventure en France. J’y ai passé un bon bout de temps. Seulement», explique-t-il, il fallait qu’il passe le Bfem. «J’ai commencé par m’approcher d’un professeur d’arabe du lycée de Kothiary qui me mettait en rapport avec des élèves qui me prêtaient leurs cahiers ou m’apportaient quelques documentations. Je m’exerçais souvent seul pour me rappeler certaines notions. Beaucoup de choses ont changé entre-temps, surtout au niveau des mathématiques, de la physique et chimie, de la science de la vie et de la terre, entre autres. Mais j’ai tenu bon et continué d’y croire. Le mois de Ramadan de cette année, passé à Dakar, m’a beaucoup aidé dans les révisions. A côté de l’école des sapeurs-pompiers, il y a un grand arbre sous lequel je m’installais pour réviser les cours. J’en ai réellement profité.» Sur les épreuves, il juge le français, l’histoire et la géographie abordables. Mais les maths ont été difficiles, a martelé l’ancien crack en maths des années 60. A la publication des résultats, «quand j’ai été informé que je devais repasser pour les épreuves du second groupe, ça a été une grande fierté. Je me suis dit au fond de moi que mon rêve était sur le point de se réaliser. Je n‘ai pas baissé les bras et j’y ai encore cru jusqu’au soir du mercredi, quand les résultats définitifs sont tombés. Je suis vraiment satisfait». Il a encore promis, si Dieu lui prête longue vie, de se préparer pour le Bac. Le Quotidien le félicite et l’y encourage.
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