Le Maroc demande des comptes après la noyade, lundi, de 28 personnes qui travaillaient dans un atelier clandestin inondé par un orage.
Les proches du propriétaire, hospitalisé dans un état grave, insistent sur la légalité de son entreprise, A & M Confection, inscrite au Registre du commerce et déclarant ses salariés. Mais son installation dans un sous-sol n’avait vraisemblablement fait l’objet d’aucune autorisation. La résidence où il se trouve fait partie d’un «lotissement construit près d’un oued (rivière). Ce qui est interdit, car c’est une zone inondable», a souligné Ahmed Ettalhi, président de la Commission de l’Urbanisme locale au site Media24. La vétusté des installations d’assainissement de la commune a aussi été pointée.
Unités de production «informelles»
D’après un représentant local de l’Association marocaine des industries textiles, parlant sous couvert d’anonymat, «ces ateliers de proximité existent par centaines à Tanger et font vivre des milliers de familles». «Je n’imagine pas qu’ils soient tous dans l’illégalité puisqu’ils travaillent pour des grandes marques internationales», affirme-t-il. Plus de la moitié (54%) de la production du secteur «textile et cuir» du Maroc provient d’unités «informelles», incluant des unités de production «ne répondant pas aux normes légales», évalue une étude publiée en 2018 par la Confédération patronale marocaine (Cgem).
L’Observatoire du nord des droits humains, une Ong locale, affirme pour sa part avoir constaté à Tanger «l’existence de plusieurs ateliers situés dans des sous-sols de maisons ne respectant pas les normes de sécurité, même pendant la pandémie de coronavirus».
Dès les années 90, des Ong ont alerté les consommateurs sur les conditions déplorables dans lesquelles était fabriquée, dans les pays pauvres, une grande partie de la production textile mondiale. En France, c’est le Collectif Ethique sur l’étiquette qui porte ce combat. Deux tragédies avaient particulièrement ému l’opinion. Le 24 novembre 2012, au moins 117 personnes avaient péri dans l’incendie de la manufacture Tazreen à Dacca, au Bangladesh. Cinq mois plus tard, dans la même ville, l’effondrement de l’immeuble Rana Plaza, qui abritait une multitude d’ateliers textiles, avait provoqué 1 138 morts. Dans les deux cas, les clients étaient de prestigieuses enseignes d’habillement occidentales.
Libération