Cinquante-neuf pêcheurs sénégalais arrêtés par les garde-côtes mauritaniens, puis relâchés finalement suite à une médiation conduite par les ministres des Affaires étrangères Mankeur Ndiaye et de la Pêche Oumar Guéye. Seulement, la récurrence de tels conflits entre garde-côtes mauritaniens et pêcheurs sénégalais risque un jour de dégénérer pour créer un autre conflit après celui de 1989. Prenant sur moi ma sénégalité-mauritanienne, j’ai décidé d’interpeller les présidents Mohamed Ould Abdel Aziz de la Mauritanie et Macky Sall du Sénégal à travers une lettre ouverte sur un dossier qui me semble préoccupant aujourd’hui dans les relations entre les deux pays. Au passage, si j’interpelle par lettre ouverte le président de la République de la Mauritanie, c’est parce que je considère ce dernier comme un ami personnel pour l’avoir connu quand il était commandant du Basep. En outre, il y a le fait d’avoir été l’un des témoins occulaires du renversement du Gouvernement de Taya par un collectif d’officiers supérieurs de la Mauritanie conduit par un certain colonel Ould Abdel Aziz avec qui j’ai tissé une relation longue et durable. Cela me donne l’autorisation de l’interpeller directement.
Je tiens aussi à rappeler que ce fut avec un enthousiasme débordant que tous les Mauritaniens avaient salué la prise de pouvoir du collectif des officiers supérieurs en août 2008. Ces derniers désignérent le colonel Ely Ould Vall comme président de la Transition, en tant que officier le plus ancien. Cependant au sein de la Cedeao, le président en exercice, à l’époque le président du Niger Mamadou Tandjan avait affiché une certaine hostilité à l’endroit des nouvelles autorités de la Mauritanie. Il avait refusé de recevoir à Niamey une délégation de la junte militaire, qui fut bloquée à Bamako. Et pour l’histoire, partant de mes relations personnelles avec le groupe des officiers et celles familiales avec le président Tandjan, je fus mandaté pour une médiation, pour intervenir auprès du président Tandjan, pour que ce dernier puisse recevoir les émissaires bloqués à l’époque à Bamako. Ce qui fut fait grâce à une écoute attentive du président Tandjan, à la suite de visites effectuées à Niamey.
Je suis parvenu à rassurer ce dernier des bonnes intentions des nouveaux hommes forts de la Mauritanie. Le premier acte du Président Abdel Aziz à son arrivée au pouvoir est d’apporter le changement auprès de la communauté négro-africaine. Du 1er janvier au 31 décembre 2009, il a rendu possible le retour de 24.000 réfugiés qui étaient installés à la frontière entre le Sénégal et la Mauritanie lors des événements de 1989. On mettra aussi sur ce tableau de l’actif humanitaire du Président Aziz, l’indemnisation des ayants droit des victimes négro-mauritaniennes disparues en 1990, juste après les événements de 1989. Toujours dans cette dynamique de réconcialition, le chef de l’Etat mauritanien avait participé en 2009 à la Prière de l’Absent, à la mémoire des Négro-Africains disparus à Kaédi. La prière fut dirigée à l’époque par l’imam Diagana. En outre, mes différentes visites à travers les rues de la capitale et mes discussions avec les Mauritaniens, la communauté sénégalaise et les mareyeurs témoignent du satisfécit à l’égard du nouveau gouvernement dirigé par le Président Abdel Aziz pour son bilan positif en termes de développement économique et de réalisations d’infrastructures. Enfin tout dernièrement, le Président Aziz était aux premiers rangs aux côtés de son homologue guinéen Alpha Condé dans la résolution de la crise gambienne. Par son engagement, il a réussi à épargner la sous-région d’un bain de sang.

Mrs les Présidents,
Il est important de souligner que le Président Macky Sall est aussi dans une dynamique de recherche effrénée de la paix à l’intérieur du Sénégal à travers la crise casamançaise, dans le voisinage avec la présence de troupes sénégalaises au Mali, en Côte d’Ivoire, en République centrafricaine et au Soudan. Le Président Macky Sall, sous la casquette de président en exercice de la Cedeao, a joué aussi sa partition dans le coup d’Etat avorté du Burkina Faso. Il a aussi fait preuve de leadership  lors de la crise gambienne pour afficher une fermeté sur la position de principe d’un départ du pouvoir de Yahya Jammeh qui, après avoir reconnu sa défaite, a voulu faire dans le rétropédalage, synonyme de refus de reconnaître la victoire de Adama Barrow comme nouveau président de la Gambie. Chemin faisant, il a été d’une disponibilité et d’une écoute à l’endroit des médiateurs mauritanien et guinéen dans la résolution de la crise gambienne.
C’est vous dire qu’entre les présidents Abdel Aziz et Macky Sall, ce qui réunit est plus fort que ce qui les sépare. Alors partant d’un tel postulat, il me semble important de dire que les deux pays ne pourront pas s’engager sur les rampes de l’émergence économique, surtout avec la découverte du pétrole et du gaz sans au préalable des relations de bon voisinage d’une exemplarité sans faille… Certes, la situation économique est difficile pour tout le monde, mais je convoque les relations séculaires entre les deux pays pour vous demander de rendre possible une paix durable avec nos pêcheurs et piroguiers.

Mrs les présidents,
Je ne vous interpelle pas en tant que membre du Gouvernement, ni officiel sénégalais, des titres que je ne détiens pas, mais c’est au nom de ma sénégalité-mauritanienne, pour que vous trouviez une issue heureuse à cette histoire récurrente entre pêcheurs sénégalais et garde-côtes mauritaniens. Il semble alors important que vous fassiez attention à des faucons (pardon des aiglons) tapis dans l’ombre de vos entourages qui poussent souvent à de la surenchère inutile entre deux pays condamnés à vivre ensemble. Autant les pêcheurs sénégalais se doivent de respecter les lois et réglements mauritaniens en vigueur, autant les garde-cotes mauritaniens ne doivent pas aussi avoir la gachette facile. Dirigeants et peuples des deux Etats ont eu à condamner les événements de 1989 qui ont fini de marquer une étape douloureuse dans les relations entre nos deux pays. Des événements que nous ne devons plus revivre des deux côtés, parce que les deux Peuples partagent tout. Mrs les Présidents, la Mauritanie et le Sénégal ne doivent plus avoir des relations heurtées dans n’importe quel domaine. Une telle situation est possible parce que vous êtes deux hommes qui ont fini d’écrire autrement l’histoire de vos peuples et du continent africain
Président Baba TANDIAN
Groupe Tandian Multimédia