La journée de partage des résultats du Monitoring 2023, organisée à Thiès par la Coordination nationale d’action de Carême suisse au Sénégal, représentée par l’Ong AgriBio Services, a vécu. Chaque année, ladite coordination nationale effectue un monitoring sur les calebasses de solidarité, qui consiste à actualiser les données de ces calebasses et partager les résultats qui en sont issus.
Par Cheikh CAMARA – A Thiès, la Journée de calebasse de solidarité ne cesse d’avoir un écho retentissant. La calebasse de solidarité, expliquent les initiateurs de la journée, est «une émanation volontaire d’un groupe de personnes vivant ensemble, se faisant confiance. Elle se traduit par des gestes concrets de solidarité et de confidentialité». Une Cds étant un système d’épargne social basée sur la solidarité dont les ressources sont utilisées pour aider les démunis à se libérer de la soudure et de l’endettement.
Les problèmes locaux sont gérés par les compétences locales avec des ressources locales, rappellent les organisateurs, qui sont revenus sur le but de ces calebasses, qui consiste à «manger à sa faim, se soigner et s’éduquer en se libérant de l’endettement», et la mission assignée autour de «l’apprentissage à la gouvernance locale participative, la réduction des inégalités, la protection des membres contre toute forme d’usure, aussi permettre aux membres de s’autofinancer».
Les principes de base d’une calebasse de solidarité se résument en plusieurs points. A savoir la solidarité : «Elle est la base d’une calebasse. Elle signifie que les actions que mènent les membres n’ont pas pour objectif le profit ou le pouvoir. Elles visent à aider l’autre sans attendre quelque chose en retour.» Puis l’équité : «Ce principe renvoie au fait que tous les membres de la Cds sont égaux en droits et devoirs.» Et la transparence : «Les ressources mobilisées autour de la Cds doivent être gérées de manière transparente. A tout moment, n’importe quel membre peut demander la situation de la Cds.» Sans compter la confidentialité : «Au moment de la mobilisation des ressources, l’anonymat sur le niveau des apports/contributions des membres doit être de mise.»
Par rapport aux ressources d’une Cds, il y a, remarque le Coordinateur national d’Adc, les «apports volontaires et anonymes», les «bénéfices tirés des mécanismes d’autofinancement», «ceux tirés des opérations d’achats groupés», les «prestations de services», les «dons». L’utilisation des ressources d’une Cds concerne «les crédits solidaires (santé, éducation, nourriture), les mécanismes d’autodéfense et d’autofinancement». Les types de Cds sont «les calebasses de solidarité mixtes (hommes et femmes), homogènes (hommes ou femmes), des corps de métiers (artisans, pêcheurs, éleveurs, etc.), des jeunes étudiants ou élèves, les calebasses de solidarité au niveau des écoles».
Le monitoring constitue, pour la Coordination nationale, un outil d’analyse pour mesurer les performances de la calebasse de solidarité mis en place chaque année par les organisations partenaires directes comme indirectes de la Coordination nationale d’Action de Carême Suisse au Sénégal assurée par l’Ong AgriBio Services. L’objectif est, d’une part, de partager les résultats des calebasses de solidarité de 2023 avec les partenaires, notamment la presse, et éventuellement le grand public (autorités locales, organisations décentralisées, Ong, entre autres). D’autre part, ces résultats peuvent constituer pour les réseaux de calebasses, un outil de plaidoyer auprès des autorités. «Nous sommes dans 12 régions. Le Sénégal compte 46 départements et 557 communes, et le Programme Sénégal intervient dans 26 départements et 102 communes», renseigne le Coordinateur national d’Adc. Et par rapport aux résultats des Cds, de souligner : «Au terme de nos renseignements, nous avons 2200 calebasses de solidarité fonctionnelles en 2023 avec 73 000 membres. Pour la première fois, le nombre d’hommes dans le programme a diminué. La raison principale évoquée est l’exode des hommes lié à la situation alimentaire précaire dans le pays.»
Les réseaux de calebasses sont constitués de «67 réseaux communaux avec 9, 2 millions F Cfa; 12% des communes du Sénégal ; 175 réseaux de proximité (intervillages/villages/zonaux avec 49, 5 millions de F Cfa mobilisés ; 1785 Cds font partie des réseaux fédéraux/coopératives des consommateurs (environ 80%)». Sur la question des prêts solidaires, il s’agit, relèvent les organisateurs, des «prêts en santé et en éducation qui ont diminué, probablement à cause de l’enrôlement des membres par les mutuelles de santé et l’organisation des achats groupés pour les fournitures scolaires». Cependant, notent-ils, «les prêts solidaires pour la nourriture ont beaucoup augmenté à cause de la flambée des prix alimentaires liée dans une certaine mesure à la guerre en Ukraine, mais également les deux faibles récoltes de 2021 et 2022». Au-delà de la calebasse de solidarité, 9 autres stratégies ont été développées : «Art culinaire ; Semences paysannes ; Consommer local ; Agroécologie ; Convention locale ; Champ, grenier, espace collectif ; Commerce équitable ; Grenier de solidarité ; Accès aux services sociaux de base.»
En termes de résultats, l’on retient «312 actions de plaidoyer pour l’accès des populations aux services sociaux de base ; 375 tonnes de céréales ont été collectées à travers les champs collectifs et les greniers de solidarité ; 167 380 personnes ont bénéficié des pratiques de gestion durable des ressources naturelles, y compris de mesures concrètes d’adaptation aux changements climatiques». Par rapport aux services sociaux obtenus par les groupes cibles suite aux actions du programme : «le financement de 25 000 F aux nouveaux bacheliers (contribution aux coûts d’études)» ; «l’adduction d’eau potable avec des branchements de tuyaux vers les autres villages» ; «l’accès à l’électricité dans le cadre du Programme d’électrification rurale» ; «l’inscription des enfants et la construction de salles de classe» ; «l’accès aux terrains de construction pour les coopératives» ; «l’acquisition de lampadaires solaires dans certains villages».
Le Coordinateur national d’Adc de souligner que «la calebasse de solidarité a fait ses preuves du Sénégal des profondeurs comme en milieu urbain et péri urbain. Elle a sorti des milliers de familles de la situation de précarité et d’extrême urgence. Mieux, des membres sont sortis de l’anonymat jusqu’à devenir des leaders incontestés, voire des conseillers ou adjoints dans des communes». Au plan politique, il note que «les calebasses sont aujourd’hui reconnues comme une approche de développement. Elles sont considérées comme une stratégie de l’économie sociale et solidaire par le ministère de tutelle». Aussi de poursuivre : «Leur plaidoyer au niveau dudit ministère en 2023 a été couronné de succès avec un appui en bascules, en matériels roulants (deux camionnettes) et un engagement financier d’une valeur de plus de 200 millions pour soutenir les opérations d’achats groupés. En attendant que le ministère réagisse, Action de Carême Suisse a financé les réseaux de calebasses à hauteur de 2, 5 à 3 millions selon le type de réseau.»
Correspondant