TOUR DE TABLE AVEC – Loïc Fauchon, président du Conseil mondial de l’eau : «L’enjeu est de transformer les solutions en réponses sur le terrain»

Il se connaît sur les questions liées à l’eau du fait de sa grande expérience. Loïc Fauchon a été président du Conseil mondial de l’eau (Cme) entre 2005 et 2012, avant d’être porté à nouveau en décembre 2018 à la tête de la structure qui a pour mission d’apporter des réponses concrètes aux problèmes de l’eau dans le monde. Il est en même temps membre du panel de haut niveau des Nations unies sur les désastres liés à l’eau, administrateur de l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse … A Dakar dans le cadre du «Kick off meeting» (20 – 21 juin) au Centre international de conférences Abdou Diouf de Diamniadio (Cicad), marquant le lancement officiel du 9ème Forum mondial de l’eau qu’organise Dakar en 2021, il revient sur le rôle du Cme dans l’organisation du forum, tout en traçant les lignes de ce que devrait être le Forum de Dakar, 9ème du genre et premier en terre Afrique subsaharienne.
Quelle est la mission du Conseil mondial de l’eau dans l’organisation du Forum de l’eau ?
Le Conseil mondial de l’eau est l’organisateur des forums mondiaux de l’eau. A chaque édition, il s’associe avec un pays et une ville hôte. C’est un peu comme aujourd’hui la Coupe d’Afrique des nations (Can) qui démarre avec l’Egypte et la Confédération africaine de football. C’est une co-organisation dans laquelle nous mettons en commun nos expériences et nos compétences.
La 9ème édition vient officiellement d’être lancée à travers le «Kick off meeting». A quelles innovations s’attendre par rapport aux précédents forums ?
Les forums évoluent au fil du temps. Celui-ci sera plus spécifiquement africain. Nous le voulons populaire et accessible à tous, apportant des réponses concrètes permettant de changer le quotidien de milliards de personnes qui n’ont pas accès à l’eau.
Après huit éditions, les problèmes restent entiers. Est-ce à dire que le Forum mondial de l’eau n’a toujours pas trouvé les réponses adéquates ?
Les solutions existent, nous le savons, vous le savez. L’enjeu aujourd’hui est de les transformer en réponses sur le terrain. C’est probablement là que se trouvent les prochains défis, car transformer des solutions en réponses, cela nécessite de remettre au centre du débat politique la question de l’eau. Je le disais à l’ouverture, les réseaux téléphoniques c’est bien, mais les réseaux d’eau c’est encore mieux. Le développement passera certes par la technologie, mais il passera d’abord et surtout par la capacité des Etats à répondre à ce besoin fondamental, vital, des populations à accéder à de l’eau potable et de qualité en quantité suffisante.
L’Afrique regorge d’eau et en même temps reste le continent le plus éprouvé en termes d’accès. Quelles stratégies pour arriver à une Afrique vivant convenablement de la ressource ?
C’est toute la question de la sécurité de l’eau. La demande en eau continuera à augmenter du fait de la croissance de la population et des méga cités. Le monde doit accroître l’offre en eau à travers les pompages, les transferts d’eau, le dessalement, la réutilisation des eaux usées. Et cette eau, nous allons cesser de la gaspiller pour mieux la partager.
Le Sénégal abrite, mais c’est l’Afrique qui organise. Ce forum pourra-il sonné la fin du calvaire de l’eau pour l’Afrique ?
C’est plutôt l’inverse, le Sénégal organise et l’Afrique abrite. Ce forum doit d’abord montrer au monde qu’en apportant des réponses à la rareté de l’eau, on aidera à la suffisance alimentaire et à éradiquer les maladies. Régler pas à pas ces difficultés, c’est aider à faire baisser l’exode rural et les migrations massives. Ce sera un premier pas majeur.
Le forum, à proprement parler, aura lieu dans quelque 20 mois. Quelles actions phare à dérouler pour une réussite de la rencontre ?
Il s’agit d’abord d’organiser un forum populaire auquel chacun puisse accéder et participer. Cela veut dire toutes sortes d’évènements : conférences, concerts, expositions, rencontres autour et en marge des réunions traditionnelles. Ensuite, c’est une parfaite préparation à la fois logistique et intellectuelle qui permet d’accueillir près de 20 mille participants, quelque 1 500 à 2 000 organes de presse et sans doute plus de 100 mille visiteurs. Enfin, c’est la capacité d’être à la fois concret et réaliste pour que l’on retienne de ce forum des réponses qui auront ensuite amélioré la vie quotidienne de millions de gens.
abndiaye@lequotidien.sn