Aminata Lô a été condamnée hier à une peine de deux (2) mois assortis d’un sursis, en plus d’une amende de 20 mille francs Cfa. La même peine a été appliquée à son frère, Mouhamadou Moustapha Lô. Le juge des flagrants délits a écarté le délit d’usurpation de fonction qui visait aussi l’ex-ministre du Tourisme et des Sénégalais de l’extérieur sous Wade.

Elle a fait un petit tour au Camp pénal, puis est rentrée chez elle. Condamnée hier à deux mois avec sursis par le juge des flagrants délits, Aminata Lô s’est défendue à la barre avec une stratégie très claire : Elle est la victime dans cette affaire : «J’ai été victime de violences verbales, et même physiques. Mon fils de 11 ans était traumatisé, il criait. Je suis un être humain, je me suis énervée, j’étais une maman qui avait le cœur brisé.» Devant le juge, l’ex-ministre des Séné­ga­lais de l’extérieur était posée, s’expliquait calmement. Sans élever la voix. Une attitude qui contraste d’avec son comportement à la brigade de gendarmerie de Ouakam, qui lui a valu sa comparution devant le juge pour outrage à agent. Vêtue d’un boubou de couleur blanche, elle avance à pas feutrés vers la barre : bras croisés derrière, masque au menton, elle est prête pour le procès. «Avez-vous une fois fait l’objet d’une condamnation ?», lui demanda le juge. «Jamais», rétorqua la prévenue. Par rapport aux faits de violation de la loi relative au couvre-feu, d’outrage à agent et d’usurpation de fonction pour lesquels elle a été poursuivie, elle a d’emblée déclaré qu’elle était sortie avant l’heure du couvre-feu, c’est-à-dire avant 21 heures. Elle était, dit-elle, «à la recherche de quelque chose à manger pour son fils qui devrait aller tôt à l’école le lendemain». Elle ajoute qu’elle a un frère asthmatique qui a parfois besoin d’aide à des heures où il est interdit de sortir. «Mais quand je sors, je décline mon identité d’ancienne ministre, gentiment les forces de sécurité me laissent passer», dit-elle. Alors «pourquoi n’avez-vous pas cherché un laissez-passer ?», interroge le procureur. «J’ai demandé au ministre de l’Intérieur mais il me l’a refusé», répond-elle.
Poursuivant elle dit : «Je suis une républicaine, une démocrate, donc je ne vais jamais empêcher un agent d’exercer son travail. Je n’ai pas insulté, je n’ai pas dit de gros mots. Je vous assure, je n’ai pas attaqué les gendarmes. Et Je ne savais pas qu’il y avait le macaron du ministère de la Justice dans la voiture, parce qu’elle m’a été offerte par un avocat.» D’après toujours Aminata Lô, elle a passé la nuit à la brigade de Ouakam jusqu’à 5 heures du matin dans une «ambiance conviviale». Mais c’est le lendemain, dit-elle, qu’elle a reçu un appel du commandant qui lui demandait de venir signer un document. «Une fois à la gendarmerie, les gendarmes m’ont tordu la main, mon bras a failli se casser», accuse-t-elle. Hier, le Parquet a requis juste l’application de la loi. «Il y a eu violation de la loi, parce que la gendarme a procédé à la collecte illicite de données personnelles», a dénoncé Me Aboubacry Barro de la défense parlant de l’audio qui a fuité où l’on entend Aminata Lô proférait des insanités contre les gendarmes et le chef de l’Etat, Macky Sall. Son confrère Demba ciré Bathily ajoute : «nul mieux que vous ne pouvez comprendre qu’est-ce que la détresse d’une mère», s’adressant aux membres du Tribunal composé uniquement de femmes. «Elle n’est pas sortie pour le bon vouloir de violer la loi. Son fils était dans un état de nécessité», argue Me Ndèye Fatou Touré.

Pas d’usurpation de fonction
Prenant le relais, Me Ciré Clédor Ly a tenté de démonter les différentes infractions. Selon lui le délit de violation de la loi sur le couvre-feu n’existe pas. «L’état de nécessité est un fait justificatif qui fait non seulement disparaître l’infraction mais aussi l’état de nécessité justifie la violation de la loi. L’article 58 du code pénal prévoit effectivement qu’en cas de nécessité, l’infraction disparaît, elle n’existe pas, Aminata Lô a été victime d’un abus. Il y a une main invisible qui voulait peut-être que cette dame au moins fasse la prison», a plaidé Me Ly. Ce dernier indique que l’outrage à agent n’est également pas établi. Il explique : «La loi est précise : l’outrage, ce sont des gestes, des menaces, l’envoi d’objets, des paroles, donc il faut que les juges puissent exercer un contrôle sur l’acte précis reproché à notre cliente qui en fait est de nature à porter atteinte à la crédibilité de la fonction ou de l’agent qui exerce une fonction publique. Tout cela n’existe pas dans le dossier.» Et d’ajouter : «Nulle part, il n’a été établi, ou caractérisé un acte positif de commission permettant de dire qu’elle s’est prévalue d’une fonction qu’elle n’exerçait pas.» Finalement, Aminata Lô a été reconnue coupable d’outrage à agent dans l’exercice de ses fonctions et de violation de la loi relative au couvre-feu, et condamnée à deux (2) mois assortis du sursis, en plus d’une amende de 20 mille francs Cfa. La même peine a été appliquée à son frère, Mouhamadou Mousta­pha Lô, qui était poursuivi pour défaut de permis de conduire et violation du couvre-feu.