Aïda Mbacké, qui avait tué son mari à cause d’un excès de jalousie, a été condamnée hier à 20 ans de réclusion criminelle pour meurtre.Par Justin GOMIS

– A cause d’un geste de dépit guidé par la jalousie, Aïda Mbacké a perdu son mari et sa liberté. Elle a été condamnée hier, à 20 ans de réclusion criminelle, par le juge de la Chambre criminelle de Dakar. Dans son délibéré, le Tribunal a disqualifié les faits d’assassinat, initialement retenus contre l’accusée du meurtre de son mari. Et il est même allé au-delà du réquisitoire du ministère public.
Aïda Mbacké, qui avait brûlé vif son mari en décembre 2018, a décidé d’interjeter appel. Mais, elle va continuer à être tourmentée par les remords. Rongée par la jalousie, à cause d’une décision de son mari qui avait décidé de convoler en secondes noces, elle a commis l’irréparable et détruit «sa vie». Lors de son procès, elle avait assuré que c’est la jalousie qui l’a conduite à poser cet acte : «Lorsqu’on était tous les deux dans la chambre, je lui avais clairement dit que je préfère me suicider plutôt que de le partager avec une autre. Sous l’emprise de la jalousie, j’ai pris un liquide inflammable que je l’ai versé sur nous deux. Ensuite, j’ai pris un briquet pour allumer le feu. J’aurais préféré mourir avec lui que de le partager. J’étais dévastée parce que je ne pouvais pas imaginer que j’allais partager mon mari avec une autre.» Il ne lui reste presque rien, juste une peine de 20 ans à purger, une vie à réparer, sur les décombres d’un mariage qui a pris fin de manière tragique. «Je n’arrive plus à dormir la nuit. Je passe tout mon temps à prier pour mon défunt mari. Mon père et certains membres de ma famille ne m’adressent plus la parole. Je n’ai plus personne dans ma vie», enchaîne-t-elle, les larmes aux yeux. Son mari, en torche humaine, est la dernière image qu’il lui reste.
Lors de son réquisitoire, le Parquet général n’avait pas occulté d’évoquer les traits de caractère d’une dame qui aimait son mari d’un amour fou. «Le jour des faits, compte tenu de son état (elle était enceinte), elle a essayé de parler avec son époux, mais en vain. Elle a pris rendez-vous avec sa sage-femme. A son retour, elle a encore tenté de parler avec son mari, qui refusait toujours d’aborder le sujet. Elle a commencé à avoir des ressentiments, jugeant que cette vie ne valait plus la peine d’être vécue. Elle a décidé de mettre fin à sa vie et celle de son mari. Aïda Mbacké a saisi un liquide inflammable qu’elle a aspergé dans toute la chambre et sur le lit. Elle a activé le briquet et le feu s’est propagé. Le mari était tout en flammes, pendant que Aïda était sortie pour aller dire à sa voisine que son mari voulait attenter à sa vie. Le mari est sorti en criant : «Aïda m’a incendié.» Par la suite, ils ont été évacués et pris en charge. Malheureusement, le mari a rendu l’âme. En aspergeant le liquide, alors que son mari était sur le point de s’endormir, je peux dire qu’elle n’avait d’autre intention que celle de donner la mort», argumente l’avocat général. «Aïda, vu tout ce qu’elle a subi et compte tenu de son état, a été manipulée par une force invisible qui l’a poussée à commettre cet acte. Elle n’a pas agi avec discernement, parce qu’elle-même pouvait mourir. Ce sont des faits extrêmement douloureux. Si c’était à refaire, elle ne l’aurait jamais fait», poursuit-il, en demandant au juge d’écarter l’assassinat et de la déclarer coupable de meurtre. C’est fait, mais avec une peine plus lourde.
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