Vous venez de prendre part à la 46e édition du Festival des cultures du monde de Gannat. Quel bilan en faites-vous ?

Je dirai que ce grand rendez-vous des Cultures du monde de Gannat en région Auvergne, France, reste cette belle plateforme de rencontres et échanges, mais aussi d’expressions artistiques et culturelles diverses. Pendant ces 10 jours de festival, les 17 groupes venus des 5 continents nous ont fait voyager à travers le monde entre les rythmes chauds et juvéniles des Slovaques et des Batuc’Ados, les envolées au parfum hispanique de l’Equateur, les mélodies et performances du Ghana aux airs assiko et pas Zoulou, les sons envoûtants de la Nouvelle Calédonie… C’était un beau panorama. Mais également la série de conférences qui avait pour thème : «Langues autochtones, musiques et danses traditionnelles au sein de performances interculturelles», organisée en marge de l’Année internationale des langues autochtones (Unesco 2019), était aussi un des moments forts du donner et du recevoir, avec des échanges fructueux et des plaidoyers forts. Il est question ici de mieux considérer ces Peuples autochtones et accompagner les processus de conservation de leurs langues, et cultures en général. Les exemples des Amérindiens du Brésil, l‘esthétique des danses indoues, la langue des Tsiganes de la Slovaquie (ou Rom, comme ils préfèrent s’appeler), les Bassaris et Bédicks du Sénégal, des Tarahumara du Mexique, des Garifuna du Honduras, étaient au menu des discussions.

Quelles sont les perspectives pour le Sénégal et Kédougou en particulier ?
C’est d’abord de maintenir cette bonne relation avec ce festival qui a été possible depuis l’édition de 2016, grâce au maire de Kédougou, Monsieur Mamadou Hadji Cissé, en prenant en charge les billets d’avion et autres frais d’une délégation de 27 personnes (dont 2 groupes de danse traditionnelle bassari et diallonké). Ensuite, à l’image du plaidoyer fait lors des conférences, l’idée c’est de renforcer l’accompagnement des Peuples autochtones dans les initiatives d’inventaire, de sauvegarde et de promotion de leurs langues, traditions et croyances. On était déjà sur ces questions et on va continuer d’œuvrer aux côtés de structures comme l’Association des minorités ethniques (l’Ame). Mais aussi on va continuer d’échanger avec le maire pour voir les perspectives sur les ateliers de sculpture, où à chaque édition un sculpteur d’un pays est invité à échanger et performer avec d’autres sculpteurs.

Quels enseignements tirer de ce festival pour la valorisation du patrimoine culturel à Kédougou ?
Ce qu’on peut tirer de ce festival, c’est que c’est une belle vitrine pour présenter et promouvoir les richesses du patrimoine culturel de Kédougou qui regorge en elle le pays bassari, classé patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco depuis 2012. L’expérience de ce festival donne des idées sur la suite éventuelle à accorder à la phase pilote de l’inventaire du patrimoine culturel immatériel, porté par le ministère de la Culture et de la communication du Sénégal à travers la direction du Patrimoine culturel et coordonné au niveau de Kédougou par le Centre culturel régional, en étroite collaboration avec les communautés locales, pour chacun des produits inventoriés, notamment, le amak, (baobab sacré de Iwol/ Bédick), le goungoudongho (danse traditionnelle à la veille de la cérémonie de circoncision/Malinké et Peul), le lekwëta (lire «Leukouta», un des ayël, univers des masques aux puissances surnatu­relles/Bassari), et le fonio, élément de prestige social associé à des pratiques sociales et un art culinaire de toutes les communautés de la région, mais avec comme porte-étendard Mme Aïssatou Aya Ndiaye. Ces éléments inventoriés peuvent être valorisés à l’occasion d’événements de ce genre, mais aussi à travers divers supports audiovisuels, web-documentaires, ou autres.