Il n’y a pas de libertés académiques dans les universités du pays. C’est la conviction du Saes et du Sudes/Esr qui accusent les autorités d’être les responsables de cette situation dans les universités publiques, souvent en proie à de nombreuses contestations.

Il faut d’abord souligner le caractère inédit de la rencontre : Main dans la main, le Syndicat autonome de l’enseignement supérieur (Saes) et le Syndicat unique des enseignants du Sénégal/Enseignement supérieur et recherche (Sudes/Esr) ont célébré ce samedi la Journée internationale des libertés académiques. Quel est le constat ? «Notre diagnostic l’année dernière à Paris où nous avons mis en place un Réseau international des syndicats de l’enseignement supérieur des universités publiques nous a conduits à constater qu’il y a de sérieuses menaces et atteintes des libertés académiques non seulement au Sénégal, mais presque partout dans le monde», explique Omar Dia, secrétaire général du Sudes/Esr. Selon lui, «les libertés académiques et les franchises universitaires constituent le fondement des libertés académiques». Malheureusement, ces questions qui sont l’essence de l’université ne sont pas bien prises en compte. Une situation que le syndicaliste met sur le dos des autorités. «Les pouvoirs politiques essaient de mettre au pas les universités et les milieux d’affaires. Le monde socio-économique tente de mettre les universités à leur service. Et si  aujourd’hui les pouvoirs politiques et les milieux des affaires, le monde socio-économique tentent de faire croire à l’opinion que les universités doivent orienter leurs recherches vers ce qui est perçue comme une utilité sociale immédiate, c’est une remise en cause des libertés académiques. C’est une atteinte grave grâce aux libertés académiques et nous nous opposons à cela», martèle-t-il. D’après lui, les syndicalistes ont célébré cette journée pour rappeler que leur mission fondamentale n’est pas d’obéir à des impératifs de rentabilité immédiats, mais de faire  et d’enseigner en toute liberté et de mener des recherches fondamentales sans préjudice a priori du résultat. «C’est le résultat qui découlera de la recherche qui s’imposera dans son utilité pratique», insiste Dr Dia. Pourquoi les libertés académiques sont menacées ? «C’est parce que ce qu’on demande aujourd’hui aux universités est quelque chose qui s’oppose aux libertés académiques», relate l’enseignant-chercheur à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad). Dr Omar Dia définit les libertés académiques, à savoir «la liberté d’enseigner, de recherche et de publier les résultats de ses recherches». D’après lui, «il y a quatre composantes dans les libertés académiques que sont la liberté d’enseignement, liberté de recherche, liberté d’expression intra-muros, liberté et liberté d’expression extra-muros».
En écho, Malick Fall,  secrétaire général du Saes, rappelle les orientations universitaires : «L‘université sans la recherche serait un gros lycée et l’universitaire qui ne bénéficierait pas d’une liberté académique ne serait pas un véritable universitaire.» Dans la tradition des universités, rappelle le syndicaliste, «il était question d’exprimer une autre opinion que l’opinion la plus partagée». En fin de compte, estime Malick Fall, «les libertés académiques fondent l’université en ce sens qu’elles nous permettent d’entreprendre nos enseignements comme on le sent, mais suivant des normes jugées par nos pairs et d’entreprendre des recherches pour le bénéficie de la Nation».
Ces recherches et enseignements ne doivent pas être menés et délivrés sous l’effet des contraintes. En revanche, «il y a au niveau de notre pays des problèmes de mise en œuvre de la loi cadre en elle-même parce que le décret d’application dort encore sur la table du gouvernement». A ses yeux, cela constitue un blocage des libertés académiques «parce qu’il y a une nouvelle forme de gouvernance qui impose une autre façon de voir et de s’organiser», rembobine le secrétaire général du Saes. Vu la situation, il reste constant qu’il y a énormément de choses à faire à l’Ucad pour lui permettre de jouir de toutes ses prérogatives académiques, car les institutions comme le Cesti, l’Esea, l’Ebad ont des problèmes de texte qui entraînent des blocages. «Ce qui enfreint aussi la notion des libertés académiques», se désole-t-il.