17 février 2016 -17 février 2017, cela fait un an que Aminata Sophie Dièye alias Ndèye Takhawa­lou a quitté ce bas monde. Réunis, ce vendredi, au sein du musée de la femme Henriette Bathily, les amis, proches et sympathisants ont organisé une cérémonie d’hommage à la mémoire de l’écrivaine et talentueuse chroniqueuse de l’Observateur. La joie de l’avoir connue et la tristesse de l’avoir perdue, ont marqué les nombreux témoignages.

«J’ai médité sur un livre… j’ai ainsi compris qu’il faut savoir quitter son corps comme on laisse une monture au bord de la route», écrivait-elle dans un de ses ouvrages De la trainée à la sainte. Ce vendredi, au musée Henriette Bathily, les gens ont eu le temps de se pencher sur la profondeur de ces propos de la journaliste, romancière, actrice et dramaturge, qui, à 40 ans a subitement quitté ce bas monde. Aminata Sophie Dièye, est décédée il y a déjà un an, mais ses proches, amis, collègues et lecteurs n’ont toujours pas séché leur larmes. «Il y en a qui pleurent à chaque fois qu’on parle de Aminata Sophie Dièye», note Wagane Guèye qui est à la base de l’initiative de l’hommage à Ndèye Takhawalou.  Ami de la défunte tout comme Oumar Sall, ce dernier se rend compte qu’il est difficile de parler de Aminata Sophie… «Notre amitié date de longtemps…Ma fille de 16 ans, porte d’ailleurs son nom», révèle M. Sall, d’une voix entrecoupée. Les yeux larmoyants la journaliste et ancienne collègue de Ndèye Takhawalou tente, elle de garder son calme pour ne pas tom­ber dans l’émotion. «Tous les moments que j’ai partagés avec elle, me restent dans la tête. Je ne les oublie pas. Son ima­ge revient, son rire revient à chaque fois je repense à nos mo­ments de détente. Beaucoup de choses me reviennent», dit-elle.
A tour de rôle, plusieurs personnes se sont succédé sur l’estrade ornée de chaque côté d’un portrait de la défunte femme de lettres, pour livrer des témoignages poignants. Vêtu d’un bleu éclatant sur la grande photo posée, la défunte Aminata Sophie Dièye semble «assister» en esprit à cette cérémonie d’hommage organisée en son honneur. Comme toujours elle a le sourire aux lèvres. Les témoignages s’enchainent dans la salle et l’on note combien il est difficile de dire adieu à un être cher. «Les livres, les écrits, les mots, ta vie Aminata Sophie Dièye…, je ne me résous jamais à te dire adieu. Comment te dire adieu Si ce n’est pas une question. C’est une réflexion», entend-t-on. Un diaporama des plus belles photos de la défunte, défile au fond de la salle, une salle où «résonne» selon la réalisatrice Angèle Diabang le rire d’Aminata Sophie. Que dire alors de sa bonté ? La bonté de son âme ? Les réactions ont été nombreuses : «Ce qui me revient d’Aminata Sophie Dièye c’est sa grande bonté», «Je me rappelle toujours Aminata en souriant», «Aminata je l’ai connue, elle était  adorable, rare, exceptionnelle. Elle aimait sourire, rire même». «J’ai aimé cette personne pour sa franchise». Il est clair que tous «souffrent » de la disparition de l’auteure de La nuit est tombée sur Dakar.

 Son livre posthume
Cependant, chez Mamoudou Ibra Kane cette tristesse est teinte d’une grande fierté. «Je suis soulagé et rassuré de savoir qu’on peut être journaliste dans ce pays et être apprécié… Cette vie méritait d’être vécue… Aminata a bien vécu», a soutenu le directeur du Groupe Futurs Médias. A ses côtés le directeur de rédaction de l’Observateur, Alioune Badara Fall. Il a sollicité, pour sa part, des prières pour son ancienne collègue. Aminata Sophie Dièye a essayé de bien vivre. Elle «aimait la vie», elle a «croqué la vie», elle était une femme «impressionnante», une femme «à l’esprit résolument libérée» mais au fond son mal-être était bien réel narre-t-on. Elle souffrait également terriblement. «En dehors elle montrait une forte personnalité alors qu’à l’intérieur elle était très fragile». Qu’est ce qui explique cette fragilité ? La lecture d’un extrait de son livre à paraitre Une épitaphe signée Venus, renseigne un peu sur son état dépressif, son rapport avec son père qui l’avait reniée dès sa naissance et ce côté «obscur de son destin», la culpabilité qui flottait à la surface de sa conscience, de son mal-être.
«Ma folie est attestée…,  je me sens prise au piège, fragile. J’ai commencé à me désagréger intérieurement face à l’inhumanité venimeuse de mon père… Le souhait de mon géniteur était que je ne vienne pas au monde pour que son aura de notable ne soit pas entachée par ma présence qui témoignait de son infidélité. Mais je suis quand même née», avait écrit la défunte. Si certains appréciaient le courage de Ndèye Takhawalou, son courage de raconter publiquement sa vie, pour d’autres c’était synonyme de folie. «Oui elle était folle mais elle avait une folie saine», rétorque son ami Wagane Guèye. «Elle avait beaucoup souffert dans la vie, mais cela ne l’a pas empêchée d’être cette grande dame de lettres, avec un immense héritage», renchérit Marie Louise Ndiaye. Très joyeux d’avoir partagé sa part de folie avec Ndèye, l’artiste Malal Talla alias «fou malade», rappelle que c’est lui-même qui  lui a trouvé ce nom de Ndèye Takhawalou. «Pourvu que de là où elle est, elle trouve maintenant la paix», prie-t-on.