UN-CHK – Journée de la diplomatie académique : «Rapprocher les scientifiques sénégalais des scientifiques des autres pays»

La bataille pour la science est une compétition internationale. Il y a quelques jours, la France a lancé la nouvelle plateforme pour attirer les chercheurs du monde entier «Choose France for Science». Le Sénégal a organisé, hier, une Journée de la diplomatie académique pour «rapprocher les scientifiques sénégalais des scientifiques des autres pays». Par Justin GOMIS –
«Rapprocher les scientifiques sénégalais des scientifiques des autres pays.» C’est l’objectif de la première Journée de la diplomatie académique organisée hier par l’Université numérique Cheikh Hamidou Kane. Cette première initiative vise à s’ouvrir aux autres universités en passant par les ambassades. «Comme université, nous pensons que nous devons nous ouvrir. Nous devons profiter des ambassades que nous avons au Sénégal pour bien profiter de la diplomatie scientifique», a indiqué Dr Ababacar Cissé Ba, chargé de la coopération au niveau de l’Université numérique Cheikh Hamidou Kane et initiateur de ce projet.
A l’en croire, le choix de l’ambassade d’Italie comme invitée d’honneur n’est pas fortuit. Car «c’est la seule ambassade au Sénégal qui a une attache scientifique, qui s’occupe uniquement des questions relatives à la science, du rapprochement des universités, des offres d’opportunités qui existent entre le Sénégal et l’Italie», a-t-il dit. En fait, l’objectif de cette Journée de la diplomatie académique n’est pas seulement de rapprocher les scientifiques sénégalais des scientifiques des autres pays, mais de permettre aux étudiants sénégalais et africains de bénéficier des opportunités qu’offrent les autres pays, si l’on sait qu’aucun ne peut se développer sans qu’il n’y ait une branche scientifique forte. «On le sait, l’Afrique n’investit pas beaucoup dans les Irnd (recherches et développement). Donc on doit se rapprocher des pays qui investissent beaucoup dans ce domaine. C’est pourquoi nous pensons que l’arme scientifique ou académique est un levier extrêmement important au service du développement. Raison pour laquelle nous avons commencé avec cette demi-journée, chaque semestre, le temps de couvrir toutes nos ambassades au Sénégal», a-t-il poursuivi.
Bien sûr, l’ambassade du Brésil, qui a pris aussi part à cette journée, a montré les opportunités avec le Brésil dans le domaine des sciences, aussi bien pour les enseignants que les étudiants. Selon le professeur Ousmane Sall, vice-recteur chargé de la recherche, de l’innovation et des partenaires de l’Université numérique Cheikh Hamidou Kane, «une large part de l’intérêt porté à la diplomatie scientifique réside dans cette capacité à inscrire la science dans l’agenda global». Pour lui, cette démarche revêt une importance capitale en ce sens que la coopération internationale entre chercheurs d’ici et d’ailleurs enrichit le patrimoine mondial de la reconnaissance. «La mobilité scientifique internationale change également de nature. A côté du brain-brain exode et du brain-brain gain, (retour) émerge le concept du brain circulation ; une mobilité temporaire et de la coopération bilatérale», a-t-il précisé. Avant de rappeler que «c’est dans ce sens que l’Université numérique Cheikh Hamidou Kane vient de lancer le programme Pro Diasporales, destiné à valoriser les expertises de la diaspora au service de l’enseignement supérieur national».
D’après toujours Pr Sall, cette mobilité internationale va crescendo. «Selon les données de l’Unesco, près de 5 millions d’étudiants étaient en mobilité internationale en 2017. En 1975, ils n’étaient que 800 000. On estime qu’ils seront 8 millions en 2025 (Ocde-2014). La montée en puissance de la diplomatie scientifique contribue à redéfinir la place du chercheur dans la société», a-t-il informé. Ce qui l’amène à dire qu’«il est temps de dépasser la vision cloisonnée entre science et diplomatie». Car, selon lui, «le chercheur peut devenir un acteur clé dans la production d’idées, dans l’orientation des choix politiques et dans la consolidation des relations internationales».
Par ailleurs, les initiateurs ont reconnu qu’il existe des défis relatifs à la recherche dans nos pays. «On est bloqués dans la recherche parce qu’il n’y a pas d’investissement. Le Sénégal est un pays qui n’a pas de plan bien défini dans le domaine de la recherche. Maintenant, on pense qu’avec ces actions, on peut attendre des actes au niveau du gouvernement qui permettront à nos enseignants de se rapprocher. Il y a beaucoup de programmes en Europe comme Erasmus, Orasun. Mais nos universitaires ont du mal à se rapprocher de ces équipes européennes pour bénéficier de ces opportunités», a-t-il souligné. Selon lui, «c’est assez difficile pour les enseignants de chercher des fonds». «Souvent, comme dans des programmes comme Erasmus, il faut des partenaires européens. Un enseignant qui n’a pas fait ses études en Europe a du mal à trouver un partenaire. C’est pourquoi on rate beaucoup d’occasions. Nous pensons que cette journée vient dans ce sens. Ce matin, nous avons eu l’ambassadeur d’Italie. Ça nous rapproche. Ça nous encourage à dire que les Européens nous tendent la main. C’est à nous maintenant de saisir ces opportunités», a-t-il dit.
justin@lequotidien.sn