Urbanisme durable, santé publique et humanisation des villes : quelle solution face à la prolifération des décharges sauvages en pleine ville et à l’utilisation des lieux publics comme urinoirs ?

La non-prise en compte de la santé publique et du bien-être urbain dans les documents de planification et d’aménagement du territoire, tels que le Pnadt, le Sdau, le Pdu ou encore le Pdc, constitue un facteur aggravant de l’utilisation anarchique de l’espace public comme urinoir sauvage et de l’insalubrité en milieu urbain. Or, la dimension sanitaire est essentielle dans l’aménagement des villes, surtout dans un contexte d’urbanisation rapide et de pressions environnementales accrues. Ainsi, face à cette réalité, la question de la responsabilité se pose : citadins, municipalités et Etat central partagent-ils suffisamment l’effort de prévention et de gestion des risques sanitaires dans les villes ? Quant aux structures territoriales, disposent-elles réellement des outils et compétences nécessaires pour élaborer des politiques municipales capables d’encourager de saines habitudes de vie ?
A Dakar, comme dans toutes les grandes villes, sous les ponts, à proximité des passerelles, autour des marchés ou encore à l’intérieur des garages, se multiplient des coins insalubres servant d’urinoirs sauvages aux usagers. Cette situation découle non seulement de l’absence d’infrastructures d’assainissement, mais aussi de l’incivisme urbain, du manque de culture d’urbanité et de la faible prise en compte des enjeux sanitaires dans la planification urbaine. De plus, s’ajoute la prolifération des dépôts sauvages dans presque chaque quartier et dans les marchés, malgré la présence des unités de collecte. Par conséquent, ces comportements anti-environnementaux engendrent de graves conséquences sur la santé publique des citadins, en favorisant la propagation de maladies vectorielles, d’infections respiratoires et d’intoxications. Dès lors, n’est-il pas urgent de repenser les stratégies de gestion urbaine en mettant l’humain au centre, à travers une véritable politique de coopération communautés-villes, afin d’améliorer durablement le cadre de vie urbain ?
Selon l’Unesco, l’humanisation des villes repose sur trois dimensions essentielles : le droit à la ville, la participation citoyenne et le développement d’une solidarité urbaine active. Autrement dit, elle consiste à replacer l’humain au centre de la gestion durable, en misant sur les citoyens comme acteurs du changement de comportements et de mentalités. Ainsi, il s’agit de repenser les pratiques urbanistiques afin de construire des villes plus inclusives, propres et saines.
L’humanisation des villes ne peut devenir réalité sans une véritable conscientisation des citadins. Concrètement, il s’agit de faire des 18 millions de Sénégalais des acteurs de la Sonaged, en développant des comportements pro-environnementaux. Cela peut notamment passer par des expositions en pleine ville, des caravanes de sensibilisation, mais aussi des actions de porte-à-porte sur le tri des déchets, les dangers des dépôts sauvages ou encore les conséquences de l’utilisation de l’espace public comme urinoir. En outre, avec les communautés, il convient de rechercher des solutions partagées à l’insalubrité urbaine : dialoguer, débattre, échanger, organiser de grandes rencontres dans les espaces publics et impliquer directement les populations dans les programmes environnementaux. Dans cette perspective, la démarche vise à associer les citoyens à la planification, à la gestion et à la veille des espaces publics, afin de mettre collectivement fin aux comportements insalubres en milieu urbain. Ainsi, un tel mode de gouvernance offre la possibilité d’une participation massive des habitants à l’effort de développement urbain.
Cheikh Ahmed Fadel DIOUF
Doctorant en géographie et consultant en aménagement et gouvernance territoriale