«Mashalah rewbe Fouladou» (Maref), une association de femmes de Vélingara, a organisé, vendredi, une rencontre avec les autorités administratives et les élus locaux pour faire un plaidoyer afin que ceux-ci puissent les aider à obtenir que l’âge du mariage des filles soit relevé à 18 ans et que les hommes qui refusent de reconnaître la paternité d’un enfant y soient contraints par la loi. Elles visent la modification des articles 111 (âge du mariage) et 196 (interdiction de recherche parentale) du Code de la famille. La rencontre a relevé des difficultés à satisfaire, pour l’heure, la demande de ces femmes.Par Abdoulaye KAMARA –

La loi autorise le jeune garçon sénégalais âgé de 18 ans à se marier. Cet âge est de 16 ans pour sa compatriote de sexe féminin. C’est le contenu du Code de la famille en son article 111. Les femmes leaders du Sénégal trouvent qu’il s’agit d’une discrimination négative basée sur le sexe. Cela, à leurs yeux, a pour nom, injustice. Les femmes du département de Vélingara, membres de l’association «Mashalah rewbe Fouladou» (Maref), ont organisé, vendredi, une rencontre avec les autorités administratives et les chefs des exécutifs territoriaux afin de faire un plaidoyer pour mettre fin à cette injustice. Pour défendre cette position, Mme Bâ Kadidatou Traoré, présidente de Maref, a soutenu : «C’est injuste, c’est discriminatoire, on ne peut pas autoriser les garçons à se marier à 18 ans et dire que les filles peuvent être mariées à 16 ans. Nous voulons que l’âge du mariage des filles soit relevé à 18 ans, comme pour les garçons. C’est ce plaidoyer que nous voulons faire porter aux autorités administratives et territoriales.» Ce n’est pas le seul article visé par Maref. Cette organisation de la Société civile du Fouladou a aussi mis sur la table des autorités du département, l’article 196 du Code de la famille qui, à leurs yeux, pose également problème. Mme Bâ Kadidiatou Traoré : «L’article 196 interdit la recherche du papa. C’est-à-dire que si un homme refuse de reconnaître une grossesse, malgré l’insistance de la femme, le Code de la famille ne l’y contraint pas. C’est également de l’injustice. Il faut que ces 2 articles soient modifiés.» Maref a comme partenaire, dans ce projet, Voix et leadership des femmes (Vlf-Sénégal) qui est appuyé par le Centre d’étude à la coopération internationale (Ceci-Canada). L’argumentaire de Maref est axé sur les risques sanitaires et la déperdition scolaire provoqués par les mariages précoces. Mais aussi les frustrations mortelles, voire suicidaires qui naissent de l’impossibilité pour un enfant de connaitre son père, du fait de l’interdiction de rechercher ce dernier, comme le suggère l’article 196 du Code de la famille. Toutefois, cet argumentaire n’a pas suffi pour convaincre les participants. Maints orateurs ont relevé des difficultés pour l’opérationnalisation des modifications demandées. Le sous-préfet de Saré Coly Sallé, Abdoul Konaté, explique : «La question est très sensible. Déjà, il est difficile de faire appliquer la loi actuelle. Les mariages se nouent à l’insu des autorités et on ne dénonce pas les cas de mariage avant 16 ans. En plus, des parents, à qui on a interdit de marier leurs enfants avant 16 ans, reviennent nous signaler que leur fille est tombée enceinte. C’est gênant pour une autorité qui croyait aider celle-ci à poursuivre ses études. Et puis, on ne peut recourir qu’à l’acte de naissance pour déterminer l’âge d’une fille, alors que l’on sait que des âges sont souvent retaillés avec les audiences foraines.»

En ce qui concerne l’interdiction de recherche parentale (article 196), l’adjoint au Préfet du département, Mamadou Lamine Ngom, a objecté : «C’est une question délicate. Il y a des cas d’inceste, et puis les filles peuvent connaître l’auteur de leur grossesse mais n’osent pas le nommer, parce que les conséquences qui peuvent en découler peuvent être catastrophiques pour la famille.» Et puis : «Ce n’est pas parce qu’une fille a pointé du doigt un homme que cela doit être pris comme parole d’évangile. Il arrive qu’une fille multiplie les partenaires et choisisse le plus nanti pour le désigner.»

Aussi, pour l’article 196 du Code de la famille, «au lieu de le modifier, il faut plutôt chercher à ce que l’Etat prenne en charge les frais liés à un test Adn. Seul un test Adn pourra désigner avec exactitude le papa d’un enfant».
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