Venue faire la revue des activités de Grandmother project (Gmp-changement par la culture) financées par les Pays-Bas, l’ambassadrice de ce Royaume au Sénégal, Carmen Hagenaars, a apprécié les résultats obtenus par cette association dans ses zones d’intervention du département de Vélingara, en termes de promotion du développement holistique des filles et de la communication au sein des communautés. Elle a applaudi et ne s’est pas privée de danser.Par Abdoulaye KAMARA –
Les drapeaux hollandais et sénégalais ont flotté côte à côte, mardi, dans le village de Saré Soukandé, situé dans le département de Vélingara. Des jeunes filles, des femmes en âge de procréation, des grands-mères et quelques hommes (jeunes et vieux) ont accueilli dans leur localité, où vivent quelque 1500 âmes, l’ambassadrice du Royaume des Pays-Bas au Sénégal. Mme Carmen Hagenaars s’est prêtée à un bain de foule animé par des chants au son du tam-tam. Des chants qui mettent le curseur sur les vertus de la solidarité, du dialogue intercommunautaire, de l’éducation, de l’importante place des aînés dans la société et du respect que leur doit la société. Mme l’ambassadrice ne s’est pas privée, en imitant ses hôtes d’une journée, d’esquisser des pas de danse. Elle l’a fait, de temps à autre, tout au long des cinq tours d’horloge passés sous l’ombrage de manguiers géants de la cour poussiéreuse de l’école élémentaire de ce village, en compagnie de Inge Clarjis, conseillère à ladite ambassade. Une manière de manifester toute son admiration et sa satisfaction à l’endroit des populations locales, ainsi que de Grandmother project (Gmp-changement par la culture) dont elle est venue suivre les activités de terrain en faveur des filles, financées par son pays. A propos de son séjour dans ce patelin de la commune de Saré Coly Sallé, Mme la diplomate a dit : «On voulait voir avec notre partenaire, Gmp en l’occurrence, les initiatives d’installation d’un dialogue permanent entre jeunes filles et leurs grands-parents. Au vu de ce que nous avons vu et entendu, nos partenaires et les communautés peuvent être fiers de ce qu’ils font : l’ouverture, le contact, la communication qu’il y a entre membres de la communauté. Ils touchent des sujets très sensibles. Et ce n’est pas facile. Je me rends compte que nous faisons face, chez nous, aux mêmes sujets sensibles. En fait, Grandmother project investit dans la durabilité, car il s’agit de changement de comportement, qui prend du temps à se réaliser.»
Ces «sujets sensibles» ont pour noms : mariages d’enfants, grossesses non désirées, défaut de confiance en soi des filles, manque de communication entre membres d’une même communauté, fort taux d’abandon scolaire chez les filles, programmes scolaires inadaptés aux réalités du moment et aux valeurs positives locales, etc. Manifestement, selon des témoignages faits par le chef de village de Saré Soukandé, Moussa Mballo, Gmp-changement par la culture est parvenu à trouver des solutions communautaires à ces problèmes. Il dit : «Auparavant, il n’y avait pas de dialogue entre jeunes filles et grands-mères, encore moins avec les grands-pères. La proximité entre ces 2 générations ainsi qu’avec leurs mamans, réussie par Gmp, a fait que les filles cherchent à avoir leurs conseils et enseignements, elles se mobilisent pour se rendre nuitamment dans leurs domiciles et écouter des contes et devinettes. Elles n’ont plus le temps, la nuit, de sortir rendre visite à leurs copains. Elles sont solidaires en cas de besoin. Elles ont créé une caisse de solidarité qui sert à venir au secours des nécessiteux et même à acheter des fournitures scolaires à la rentrée des classes. Désormais, le village peut compter des filles qui ont obtenu le Baccalauréat, ce qui n’était pas le cas avant.»
Au cours de la rencontre, des jeunes filles ont sonné la révolte. Elles se sont mobilisées spontanément pour sauver une des leurs d’une menace de mariage forcé. Aidées par l’Association des grands-mères du village, elles sont parvenues à voir leur amie poursuivre ses études. C’était la trame d’un sketch joué devant les invités de Gmp-changement par la culture et qui se trouve être la copie réelle du comportement qu’elles adoptent à chaque fois qu’une des leurs est menacée de mariage forcé. En sus de ce sketch, des grands-mères ont simulé des jeux de rôle qui sont leur lot quotidien dans le village pour parvenir à impulser un développement holistique des filles, promouvoir le dialogue communautaire et protéger les droits des filles.
Mamadou Coulibaly, chargé des projets de Gmp-changement par la culture, a levé un coin du voile sur les axes de collaboration entre son organisation et le Royaume des Pays-Bas à travers leur ambassade. Il dit : «L’ambassade du Pays-Bas est un partenaire financier qui nous appuie depuis plusieurs années, notamment dans la mise en œuvre de nos programmes de changement par la culture, surtout en ce qui concerne le développement holistique des filles et l’intégration des valeurs culturelles positives à l’école. Cette visite entre dans le cadre du suivi d’un projet que nous avons avec l’ambassade du Royaume des Pays-Bas qui s’intitule «Mobiliser les grands-mères et les leaders religieux pour la promotion du bien-être et des droits des jeunes filles». Mme l’ambassadrice est venue voir comment ça ce passe, écouter les communautés et nous écouter. C’est encourageant, ça nous met à l’aise et les populations sont contentes de voir et d’entendre ces partenaires.»
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