A la dernière étape de la tournée économique du ministre de l’Agriculture, de la souveraineté alimentaire et de l’élevage (Masae), dans la commune de Pakour, département de Vélingara, les populations du terroir ont étalé au grand jour leur division, relativement à l’exploitation de plantations de bananes par Mamadou Oumar Sall sur une superficie de 1000 ha attribués par le Conseil municipal.Par Abdoulaye KAMARA (Correspondant) – 

«Mamadou Oumar Sall est un champion, un agri-diambar qui fait la fierté du Sénégal. J’invite tous ceux qui ont assez d’argent au Sénégal de s’inspirer de son modèle et d’investir dans l’agriculture.» C’est par ces mots que le ministre de l’Agriculture, de la souveraineté alimentaire et de l’élevage, Dr Mabouba Diagne, s’est adressé au roi de la banane au Sénégal, avant-hier dimanche à Pakour, ultime étape de sa tournée économique dans le Sud du pays. Mamadou Oumar Sall venait de faire visiter à la délégation ministérielle ses blocs de plantations de bananes dont certains cohabitent avec des champs de maïs et qui s’étendent sur près de 6 km ; blocs espacés par endroits de 300 à 500 m. Et puis, Yaya Sall, fils du promoteur avait aussi pris la peine d’informer les hôtes de Diarga Sané, maire de la commune de Pakour, des investissements consentis par son pater. Il a dit : «Le Gie Yellitaare exploite au Sénégal près de 4000 ha en plantations de bananes. Nous avons à notre actif 70% de la production de bananes au Sénégal et employons 3515 hommes et 515 femmes. La production de bananes du Gie Yeelitaare en 2023 était de 75 000 tonnes.» Dans les zones d’intervention du Gie Yellitaare, M. Sall se donne un point d’honneur de réaliser des investissements pour le bénéfice des populations locales. Des réalisations qui ont pour noms : «Pistes de production, postes de santé, salles de classe, mosquées et financement de campagnes agricoles, surtout au profit des femmes.» «Le Gie Yellitaare s’engage, avec l’accompagnement de l’Etat, à couvrir entièrement les besoins du Sénégal en bananes à l’horizon 2029», a déclaré Yaya Sall, qui a été fortement applaudi par des imams, des chefs de village, des leaders de jeunes et des ouvriers, manifestement reconnaissants envers M. Sall.
D’ailleurs, au-delà des mots, Dr Mabouba Diagne a été séduit par ce qu’il a vu dans le bloc de Manato : la modernisation des techniques de coupe des régimes de bananes, leur acheminement mécanique vers le lieu de pesage, la coupe puis lavage des mains de bananes et leur placement dans des caisses. Ce qui a poussé le ministre à dire : «Je voyage beaucoup. Mais ce que je vois là me rappelle ce que j’ai vu au Costa Rica, et seulement au Costa Rica.»
A rappeler que les blocs de plantations de bananes de Mamadou Oumar Sall doivent couvrir une superficie totale de 1000 ha attribués en 2016 par le Conseil municipal de Pakour. Une surface qui continue de soulever des vagues de contestation d’une partie de la population qui réclame la diminution de l’assiette foncière octroyée à Sall.

La guerre des pancartes
A l’occasion de la visite du ministre de l’Agriculture, de la souveraineté alimentaire et de l’élevage dans les bananeraies de Pakour du Gie Yeelitaare, les populations de la commune ont étalé au grand jour leurs divergences en ce qui concerne l’assiette foncière de 1000 ha octroyée à Mamadou Oumar Sall, surnommé roi de la banane au Sénégal. Les pros et les anti se sont donné rendez-vous à un carrefour qui mène vers les plantations pour accueillir le ministre, chacun à sa manière. Sur les pancartes des anti-projets Sall, on pouvait lire : «Oui à l’agriculture, non à l’expropriation, nous exigeons la restitution de nos terres, Mbour 4 et Pakour sont tous au Sénégal, 1000 ha arrachés, 10 000 problèmes semés ou encore Sall banane dégage.» Pour les pros-projets Banane, les slogans sont : «Mamadou Oumar Sall pour l’autosuffisance en banane et la sécurité alimentaire, Mamadou oumar Sall contre l’émigration irrégulière ou encore Bienvenu à Mabouba Diagne et Mamadou Oumar Sall.» Pour justifier leur opposition à l’acte de cession des 1000 ha par le Conseil municipal, Diaé Sané, responsable politique de Pastef à Pakour a dit: «A Pakour, nous sommes tous des agriculteurs et des éleveurs. Le Conseil municipal a octroyé 1000 ha à une seule personne qui les a clôturés sans laisser de passage au bétail pour accéder au cours d’eau et aux lieux de pâturage. Nous exigeons qu’une partie des 1000 ha soit rétrocédée et aménagée pour la riziculture. La banane produite ici ne nous sert à rien. Il faut auparavant bien manger pour consommer de la banane.» Le maire de la commune, Diarga Sané, a défendu le projet en ces termes : «Je suis surpris par ces manifestations hostiles. Le gouvernement du Sénégal fait des efforts pour la création d’emplois. Tout comme le secteur privé. Et c’est ce que fait Mamadou Oumar Sall. Nous avons légalement octroyé 1000 ha à Sall, après avoir épuisé toutes les procédures administratives requises. Mon engagement envers la population en m’engageant en politique était de lutter contre l’émigration clandestine. Et Dieu m’a apporté Mamadou Oumar Sall qui m’aide à respecter cet engagement. Ces manifestants sont des opposants politiques qui n’ont que l’argument des 1000 ha à opposer à mon bilan.»
Le ministre a coupé la poire en deux. Il a demandé aux jeunes manifestants de faire preuve de patience en lui donnant le temps de négocier avec tout le monde en y impliquant les maires et les autorités administratives.

Le maire prêt à reprendre 300 ha à Sall
Mamadou Oumar Sall a déjà valorisé 677 ha sur les 1000 qui lui sont octroyés par le Conseil municipal. Une surface que le promoteur bananier ne doit plus dépassée, selon le maire de la commune Diarga Sané qui a informé : «Nous avons enclenché un processus de négociations avec Sall pour exproprier le reste de la surface non exploitée encore. Il a valorisé 677 ha et je puis vous dire qu’il va s’arrêter là. Nous sommes très avancés dans les négociations.» Cette information sera-t-elle suffisante pour tempérer les ardeurs contestatrices des détracteurs du projet Sall ? Wait and see.
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