C’est fait. Khalifa Sall et Karim Wade ont retrouvé leurs droits civiques et politiques dont ils ont été déchus suite à des condamnations par la Justice. Ainsi, l’Assemblée nationale a adopté, ce samedi, par 124 voix contre une seule, le projet de loi n°12/2023 modifiant la loi n°2021-35 du 23 juillet 2021 portant révision du Code électoral, porté par l’Exécutif. En effet, ce dernier point était le plus attendu du dialogue national lancé par le chef de l’Etat Macky Sall, le 31 mai. Ainsi, le vote de ce nouveau projet de loi défendu par le ministre de l’Intérieur, Antoine Félix Diome, n’est pas une surprise… L’Assemblée étant dominée par la majorité présidentielle, tout succès est bien accueilli, surtout avec une loi devant permettre à deux acteurs politiques de revenir dans la course. Alors, le projet de loi a été adopté, et avec facilité, sans le soutien des députés du groupe Yewwi askan wi accompagné des députés du Parti de l’unité et du rassemblement (Pur) et du député non inscrit, Thierno Alassane Sall, fondateur du parti la République des valeurs (Rv), qui s’y sont opposés.

Les députés du groupe Yewwi qui, pourtant, d’après Guy Marius Sagna, avaient déposé, le 7 mars 2023, une proposition de loi en vue de la modification des articles L.29, L.31 et L.57 du Code électoral, dans le but de permettre à Karim Wade et Khalifa Sall mais aussi à tous ceux qui le désirent d’être candidats aux élections au Sénégal, n’ont pas finalement voté le texte car ils sont sortis de l’Hémicycle après le débat parlementaire.

En outre, le gouvernement n’aurait pas, à leurs yeux, suffisamment pris en compte leurs propositions et amendements. «On est dans la proposition et non dans la destruction», a tonné le député Ayib Daffé, membre du même camp. Le Secrétaire général par intérim de l’ex-parti Pastef-Les Patriotes parle de réglementation conjoncturelle et personnalisée, d’une loi taillée sur mesure pour des personnes. «Réparer une injustice c’est bien, mais ne pas la commettre est mieux», a dénoncé le député.

S’adressant au ministre de l’Intérieur, il dira : «Vous venez aujourd’hui sur les ordres de sauveurs, mais récemment, vous vous êtes représenté sous les habits d’un bourreau. Et c’est ça l’ironie de l’histoire. Il y a des amendements à faire à ce projet de loi pour la paix et la stabilité au Sénégal.»

Malgré les amendements, la majorité a estimé opportun et cohérent, au regard des discussions issues du dialogue national, de faire revenir l’ancien maire de Dakar et Karim Wade dans l’espace politique.

Résolution du parrainage des élus et citoyen
Le ministre de l’Intérieur, Antoine Diome, à son tour, a d’emblée rappelé que le projet de loi ne concerne pas la modification de l’article L.28 aliéna 3, qui permet que lorsque la durée restante de la peine dont a bénéficié le condamné en raison d’une grâce aura expiré, ce dernier concerné puisse retrouver des droits avec sa réintroduction dans le fichier électoral.

Sur la question relative au maintien des dispositions de l’article L.57 du Code électoral, issues du consensus de 1992, Antoine Diome a précisé également que la nouvelle rédaction dudit article a pour objet de corriger une «anomalie» de la loi électorale. En effet, dit-il, il est prévu dans tous les types d’élections, la qualité d’électeur pour faire acte de candidature et être élu. C’est le cas des élections législatives et territoriales où la qualité d’électeur est respectivement conditionnée par les articles L.157, L.280 et L.245 du Code électoral, a-t-il expliqué. Avec force, Antoine Diome précise que l’article L.57, évoqué par les parlementaires comme étant une «injustice» intervenue en 2018 et auquel le gouvernement souhaite apporter quelques modifications d’avant-2018, vient uniformiser les conditions d’éligibilité dans les différents types d’élections au Sénégal. Face aux parlementaires, il a alors rassuré qu’aucun homme politique au Sénégal n’a le pouvoir de choisir ses propres adversaires. «Notre système électoral est fiable, et la configuration de l’Assemblée nationale l’illustre parfaitement», a-t-il déclaré. Ainsi, après l’adoption de cette nouvelle loi portant modification du Code électoral, Antoine Diome rassure que désormais, «on passe de 0, 6% à 0, 8% du fichier». Autre chose nouvelle dans ce projet de loi, le plafonnement du montant de la caution à 30 millions de F Cfa pour l’élection présidentielle. Il y a également aujourd’hui, d’après Antoine Diome, un parrainage optionnel. «Autant les candidats à la candidature peuvent recourir au parrainage citoyen, autant ils peuvent recourir au parrainage par les élus. Désormais, avec 8% des membres de l’Assemblée national ou 20% des chefs d’exécutifs territoriaux, on peut valablement déposer sa candidature si on parvient à récolter un tel pourcentage», a expliqué le ministre de l’Intérieur.

Interpellé également sur la dissolution de l’ex-parti Pastef, suite au placement sous mandat de dépôt de son président, Antoine Diome précise que l’inculpation de Ousmane Sonko n’a absolument rien à avoir avec la dissolution du parti Pastef-Les Patriotes.
Par Ousmane SOW