«Aline et les hommes de guerre» : Un livre de l’écrivain Karine Silla qui a été présenté au public de ziguinchor lundi dernier à l’Alliance franco-sénégalaise. Initiative d’Intelligence Book club, en partenariat avec la mairie de Ziguinchor, cette cérémonie s’inscrit dans le cadre d’une tournée de promotion de cet ouvrage qui est un récit biographique sur une héroïne sénégalaise méconnue du grand public : Aline Sitoé Diatta.Par Ibou MANE

– «Mon père, professeur, docteur en sociologie et en anthropologie à l’Ucad et à l’Ugb, m’a toujours parlé de Aline Sitoé Diatta et cette héroïne m’a toujours interpellée par sa résistance. J’ai donc voulu mettre en avant dans ce livre quelqu’un qui a résisté sous le régime colonial pendant la 2nde guerre mondiale. Aline Sitoé m’a attirée sur son rapport à la non-violence, son rapport aux valeurs, à son discours qui était visionnaire.» C’est par ces mots que Karine Silla, écrivain et auteure du livre Aline et les hommes de guerre, a disséqué face à la presse le sens de sa démarche et les circonstances historiques dans lesquelles a vécu l’héroïne de Cabrousse.
Revenant sur les grandes lignes de cet ouvrage, Karine Silla estime que cela est d’abord justifié par le contexte, la découverte de la Casamance par les Portugais et toutes les traditions diolas dans lesquelles est née Aline Sitoé. Occasion de retracer le parcours de Aline Sitoé jusqu’à Ziguinchor, puis du début de la colonisation, la culture de l’arachide et l’esclavage autour, tout en mettant en exergue ce qu’était la vie au sein de la population. Travail forcé des enfants, code de l’indigénat et impossibilité de pratiquer ses valeurs. «Et j’ai voulu également parler à la jeunesse, leur montrer qu’à un moment on a été fracturé par la colonisation et qu’il est temps de remettre en avant nos héros et nos disparus, et de reconnaître qu’il y a eu des crimes contre l’humanité», soutient Karine Silla.
Pour l’auteur, Aline Sitoé doit incarner auprès de la jeune génération la résistance, l’identité, le retour à nos valeurs. «Si on écoute la voix de Aline Sitoé Diatta, on pourrait empêcher les jeunes d’aller mourir en mer pour trouver un eldorado qui n’existe pas. La richesse est en nous et il faut la fabriquer ici. C’est important que le Sénégal se réapproprie ces valeurs et qu’on arrête d’aller chercher en Occident», plaide Karine Silla.
Partenaire de ce projet, le maire de Ziguinchor, Abdou­laye Baldé, qui a commandé 1 000 ouvrages pour les élèves de la commune, souligne qu’en écrivant ce livre, Karine retrace l’histoire de l’héroïne de Cabrousse et leur donne une leçon sur les valeurs qu’elle a incarnées, les combats qu’elle a toujours menés et qui sont d’actualité. «Elle avait prédit l’abandon de la culture arachidière au profit de la culture vivrière. Elle avait en outre prédit la résistance contre l’oppression, le métissage entre les Peuples, la protection de l’environnement, la non-violence et beaucoup d’autres choses», déclare l’édile de Ziguinchor. Aline Sitoé doit, pour cela, de l’avis de Abdoulaye Baldé, inspirer l’ensemble des générations africaines, sénégalaises et casamançaises.
«Pour nous, ressortissants de la Casamance, du Sénégal et de l’Afrique, c’est une fierté d’avoir participé à ce livre qui est une résurrection en ce sens qu’il met à la face du monde cette héroïne peut-être même méconnue dans les confins de la Casamance», s’est-il réjoui. Le député maire de Ziguinchor estime qu’il est aussi un devoir de vulgariser ce livre, de se l’approprier et de faire en sorte que la jeune génération puisse le lire, mais également tous les écrits faits sur les grandes figures de l’histoire de notre pays.

Un mémorial à Cabrousse
«Aujourd’hui c’est une reconnaissance mondiale pour tous les combats qu’elle a pu mener pour l’émancipation des Peuples noirs», a-t-il laissé entendre. Suffisant pour plaider pour le rapatriement des restes de Aline Sitoé Diatta et la construction d’un musée mémorial à Cabrousse et l’organisation par sa famille de sépultures dignes de son rang, car il y a beaucoup de rites et traditions qui accompagnent la disparition d’illustres personnes dans cette contrée de la Casamance. «C’est un combat que toutes les générations du Sénégal, de la Casamance, devraient mener et nous sommes en train de nous constituer en collectif pour essayer de mener la sensibilisation auprès des autorités pour le rapatriement des restes de Aline Sitoé, de même que ceux du roi Sihalébé, exposés au musée Grévin à Paris», prône-t-il.
Présente à cette cérémonie qu’elle a initiée en partenariat avec la mairie de Ziguinchor, Amy Sarr Fall, directrice d’Intelligence Magazine et Initiatrice d’Intelligence Book club, soutient que ce livre est un récit biographique sur une des héroïnes sénégalaises : Aline Sitoé Diatta. «Il fallait donner l’opportunité à Karine de présenter le livre à la jeunesse. Et la particularité, c’est d’avoir reçu la famille de Aline Sitoé Diatta et montré à cette jeunesse venue de partout que nous avons nos héroïnes, des personnages comme Aline Sitoé qu’il faut continuer à honorer et à enseigner», argue-t-elle. Et Amy Sarr Fall d’espérer que ce livre pourra bientôt être distribué dans les programmes afin que les jeunes s’imprègnent davantage de son parcours.
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