Alors que la procédure parlementaire sur le projet de réforme constitutionnelle se poursuit sur fond de blocages, la Conférence des évêques du Togo s’est prononcée dimanche, pour la première fois depuis le début des événements politiques qui secouent le pays.

Leur prise de parole était attendue depuis des semaines. C’est chose faite depuis ce dimanche 17 septembre, date à laquelle dans toutes les cathédrales du pays des prières dites «de supplication en faveur de la paix, plus précisément en faveur des réformes institutionnelles et constitutionnelles», ont été organisées. L’objectif, selon les évê­ques, est «d’implorer la lumière de l’Esprit Saint sur les plus hautes autorités [du] pays afin qu’elles opèrent urgemment les réformes demandées par le Peuple conformément à la Constitution de 1992».
Après avoir invité «les protagonistes à s’inscrire dans une démarche responsable, sincère et constructive», la conférence des évêques a indiqué sa préoccupation face aux «violences exercées par les Forces de l’ordre et de sécurité sur les populations dans certaines localités du pays, après les manifestations des 6 et 7 septembre 2017».

Décrispation
Interrogé sur radio Maria Togo, Mgr Nicodème Barrigah, qui a dirigé la Commission vérité justice et réconciliation (Cvjr) entre 2009 et 2012, a expliqué que les évêques n’ont pas choisi «un camp contre celui du Peuple». Depuis deux ans en effet, l’Eglise catholique renforce sa présence dans le débat public en publiant des lettres pastorales au ton inhabituellement fort à l’endroit de l’ensemble de la classe politique du pays.
Fin avril, à l’occasion de la fête de l’Indépendance, les prélats avaient déjà posé un diagnostic sur la situation sociale et politique. «Disons-le en toute sincérité, derrière les apparences illusoires de paix, les cœurs s’endurcissent, les positions se radicalisent, les mains jadis tendues pour le dialogue et la fraternité se referment», avaient alors averti les évêques. Ces paroles prennent tout leur sens aujourd’hui au vu des récents événements dans le pays.
En ce qui concerne le débat sur les réformes, l’Eglise appelle les acteurs à s’entendre pour opérer les changements souhaités par le Peuple. «Nous pensons qu’un débat de fond doit être mené sur cette question afin que les réformes soient faites effectivement selon la Constitution de 1992 pour décrisper la situation et qu’on puisse passer à autre chose», a indiqué Mgr Nicodème Barrigah.

Référendum
La procédure parlementaire suit cependant son cours, même si, selon les observateurs, aucun miracle n’est à attendre de ce côté-là. «Après le vote du projet de loi introduit par le gouvernement par (sic) la Commission des lois, il n’y a plus aucun doute sur la suite des événements. Ne pouvant réussir à rassembler les 4/5e des députés pour faire adopter cette révision à l’Assemblée, nous allons probablement aller vers un référendum, puisque le parti au pouvoir dispose des 2/3 des députés pour passer par cette voie. Ceci en vertu de l’article 144 de notre Constitution. Et tout ça reste légal», a fait observer l’opposant Gerry Taama.
Le blocage, rappelons-le, se situe au niveau de l’alinéa 2 de l’article 59 de la Constitution de 1992, qui dispose qu’«en aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats». Une phrase que ne reprend pas le projet de loi du gouvernement (tout comme la recommandation numéro 5 de la Cvjr) et qui selon l’opposition devrait conduire le Prési­dent Faure Gnassingbé à ne plus se représenter en 2020.
Les rues du pays seront prises d’assaut les 20 et 21 septem­bre prochains par les partisans des deux camps. Les Evêques demandent de leur côté aux leaders politiques «d’éviter d’organiser le même jour des manifestations antagonistes, de peur que ces rassemblements ne dé­­bou­chent sur des affrontements aux conséquences imprévisibles».
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