En prenant le Japon comme référence pour un modèle de développement économique, les pastéfiens ne tiennent pas compte, non seulement de l’histoire de la richesse des nations et de leurs rapports heurtés, mais aussi des réalités économiques mondiales actuelles. Le Japon fut une puissance impérialiste mondiale par le biais d’acquisitions territoriales, en commençant par Taïwan en 1895 et en s’étendant à la Corée, à la Mandchourie et à certaines parties de la Chine. La guerre russo-japonaise (1904-1905) marqua un tournant important de  l’émergence du Japon comme une puissance militaire mondiale majeure.
Tout le bassin Asie orientale pacifique fut dominé, pendant de nombreuses années jusqu’avant la fin de la deuxième Guerre mondiale, par cette puissance impériale qui lui a permis, avec l’exploitation de ses colonies et le transfert de valeurs, de développer une accumulation primitive du capital. Bien sûr, avant toutes ces colonisations, la révolution Meiji a accéléré l’industrialisation du Japon avec le slogan «pays riche, armée forte», ce qui a conduit à son émergence en tant que puissance militaire en 1905. Toutefois, nous souvenons de l’holocauste causé à l’humanité tout entière par l’Allemagne nazie pendant les deux guerres mondiales, avec comme principale allié militaire le Japon qui avait un empire colonial.

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Prendre la voie  japonaise de développement économique, fondée primitivement sur l’exploitation des colonies en Asie orientale comme modèle, c’est faire abstraction de l’histoire de la résistance aux colonisations et des luttes pour l’indépendance des peuples d’Asie, afin d’asseoir des modèles de développement automnes basés sur la rupture du pacte colonial et néocolonial. A ce titre, la République populaire et démocratique de Chine constitue, pour nous Africains, le modèle de référence pour les luttes de libération anti coloniale et pour un développement fulgurant autonome, autocentré et auto entretenu, au point que le pays de Mao Tsé-toung et de Deng Xiaoping devient aujourd’hui, la première puissance économique mondiale bâtie sur ses propres forces endogènes.

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La République populaire et démocratique de Chine et les pays africains appartiennent au même bloc mondial qui revendique des relations économiques internationales plus égalitaires et plus humaines, nécessitant un resserrement des liens entre nos Etats. Il se trouve également que les pays africains et la Chine présentent beaucoup de similitudes et de convergences au plan historique en raison des occupations extérieures coloniales, comme au plan sociologique et culturel au niveau de l’existence d’une population à majorité paysanne et à forte croissance démographique. Il s’y ajoute que la République populaire et démocratique de Chine et les pays africains se confrontent aux mêmes problèmes liés à une forte croissance démographique, à la lutte contre le chômage des jeunes, à l’urbanisation effrénée de nos villes et pour le retour dans les campagnes, à la protection de l’environnement, à l’autosuffisance alimentaire, à la lutte contre la pauvreté et contre les exclusions des minorités, autant de raisons qui justifient le dialogue entre nos Etats, les partis politiques et les échanges d’expériences. Il s’y ajoute, sans en faire la Nation la plus favorisée, que  la coopération de  la Chine avec les pays africains, a été, ces dernières années, plus massive et bénéfique pour les populations de notre continent.

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L’organisation optimale du travail pour un développement économique fulgurant est propre en réalité à tous les peuples d’Asie orientale du pacifique anciennement dominés, à l’instar de Singapour, de la Malaisie, de la Corée ou de l’Indonésie, lesquels en constituent des exemples patents. Sans entrer dans les rivalités entre puissances et en étant ouverts à tous les pays du monde pour une amitié entre les peuples, se référer sur le modèle japonais pour inspirer la voie sénégalaise d’un développement automne, nous paraît anhistorique et surréaliste.
Kadialy GASSAMA
Economiste
Rue Faidherbe X Pierre Verger
Rufisque