Projet du Code du travail : Une suspension de la validation s’impose

En date du lundi 2 décembre 2024, dans la rubrique Actualité, sous la plume de la journaliste [Codou Badiane] et au travers du Journal L’Observateur n°6345, cette dernière a tenté de faire l’état de la situation du monde du travail.
A cet effet, elle a brossé le contexte dans lequel, par deux articles-interview juxtaposés : l’un par une analyse, puis, en conjugaison avec le Secrétaire général (Sg) de l’Union régionale des syndicats professionnels de la Confédération nationale des travailleurs du Sénégal (Cnts) de la région de Dakar [également], responsable moral du Syndicat des industries alimentaires, tandis que, pour couper la poire en deux, le second [personnage] concerne : le Directeur des ressources humaines de la société Sen’Eau [un inspecteur du travail de formation].
Qu’en tout état de cause, cela peut-il éclairer la lanterne du monde du travail [concerné au premier degré et non impliqué] et les populations citoyennes [contributeurs] ? Non !
Qu’à ce propos, le sujet met en relief le Conseil consultatif national et le projet de Code du travail : «défis et orientations d’une réforme». Cependant, il faut bien appréhender les dispositions des articles L205 à L210 du présent code comme [d’ailleurs] son contenu, afin de pouvoir en faire la part des choses.
Que fondamentalement, ledit Conseil consultatif est composé de quatre (4) membres de l’Assemblée nationale désignés par cette Assemblée ; huit (8) représentants des organisations d’employeurs et huit (8) représentants des syndicats de travailleurs des professions industrielles ; quatre (4) représentants des organisations d’employeurs et quatre (4) représentants des syndicats de travailleurs des professions commerciales et bancaires ; un (1) représentant des organisations d’employeurs et un (1) représentant des syndicats des travailleurs des exploitations agricoles ; un (1) des employeurs et un (1) représentant des syndicats de travailleurs des groupements coopératifs, entre autres. Alors, qu’en est-il exactement de cette composante ? A-t-elle été respectée dans la forme et dans le fond ? Qu’en est-il de la composition des membres de l’Assemblée nationale désignés, nouvellement élus ? Le Conseil peut-il se réunir avant, pendant ou après : sans lesdits membres ?
Ce faisant, durant toute la précampagne présidentielle sénégalaise et compte tenu des troubles, de l’insécurité ambiante [plus de deux années durant], il y a lieu de savoir : dans quelles conditions se sont opérées, au niveau de la Cnts [par exemple], en termes de communication, d’information et de sensibilisation avec les travailleurs syndiqués, les syndicats de base professionnels, les Secrétaires généraux, les membres du bureau confédéral, les unions régionales, départementales et locales, les membres désignés [secrétaires confédéraux chargés des contentieux ; du secteur juridique et des entreprises privés] ? Sous ce rapport, tout ce monde-là n’est pas au parfum du scénario mis en place, face à un aussi important projet qui doit décider de leur sort [les travailleurs du secteur privé et non du secteur public]. Et c’est là que les approches pédagogiques et syndicales du bureau de l’Union régionale de Dakar et des autres unions régionales interpellent notre conscience, au plan syndical. Et c’est pourquoi ledit projet ne peut s’exécuter sans les principaux acteurs : les salariés-travailleurs et les délégués du personnel. Il est question d’entreprise, et entre deux parties, avant que n’intervienne l’Etat-Nation, dans un tripartisme proclamé.
Autrement dit, au regard des affirmations teintées d’obsolescence et d’incohérence du Drh, à savoir : «Pour renforcer la compétitivité économique, il faut la flexibilité. Les entreprises, ce sont des capitaines d’industrie. Ce sont des gens qui ont pris des risques et qui veulent faire des profits. La protection aujourd’hui, qui est une protection du travailleur [?], doit continuer à se placer vers l’entreprise. Le droit du travail doit protéger l’outil de production, doit protéger l’entreprise. C’est une réforme qui a commencé depuis 1997 et cette réforme doit se protéger. Les employeurs, aujourd’hui, ont besoin de flexibilité [comme si cela n’a jamais existé], ont besoin de pouvoir renouveler les contrats Cdd plus longtemps qu’une fois. Parce qu’aujourd’hui, le Cdd ne peut être modifié qu’une seule fois […]» Une réflexion utopique et dérisoire.
En raison donc que «l’employeur doit fournir du travail au salarié, car sans activité professionnelle, il n’y a point de contrat de travail». Et qu’entre consultation et conciliation, il y a certes une différence ; parce que tout simplement, dans ce domaine, certains inspecteurs comme certains contrôleurs ne disent pas le droit ou s’ils le disent, ils le font en marge du droit social. Il en est de même : entre une institution [qui doit permettre de conserver un emploi en son article L1 du Ct] et une juridiction [qui permet au travailleur-salarié de pouvoir bénéficier de dommages réparables, sans aucune possibilité de retour en entreprise].
En ce sens, il est constant désormais, qu’au niveau de l’inspection [et de manière irrémédiable et inflexible], la position de l’inspection se fait verbalement et non administrativement, en conciliation. Or : «Il a été jugé dans ce sens que l’inspecteur du travail qui ne se prononce pas sur des chefs de réclamations relatifs au salaire dont il est saisi, en plus d’autres demandes, entérine un procès-verbal qui porte atteinte aux droits incontestables des travailleurs. Aussi, l’action introduite par la suite au niveau du Tribunal par le salarié doit être déclarée recevable (Cour suprême les établissements Diallo contre Ndèye Fatou Minte & autres, arrêt n°71 du 28 novembre 2007). Sous cet angle, l’analyse du Drh de la société Sen’Eau justifie et illustre [en toute évidence], son comportement, compte tenu de ses prérogatives en entreprise. En attestent ses émoluments [salaire de base, sursalaire substantiel, primes et avantages] qu’il n’aurait pas touchés sous subordination avec l’Etat, bien qu’il ait eu à prêter serment. [Que s’il n’a pas eu à démissionner à l’Inspection du travail ; il a certainement demandé une disponibilité ?]. Dès lors, pour les syndicats, le salaire représente : un minimum pour le monde du travail [Simg] ; et qu’avec le progrès, le Sénégal devrait adopter le Salaire minimum de croissance, après 60 ans d’indépendance ; et que la troisième République semble se diriger vers une illusoire souveraineté.
En raison qu’inéluctablement, la problématique du télétravail, les exigences du Comité d’hygiène et les conditions de travail sont des obligations contraires à toute flexibilité du présent Code du travail. La préoccupation des syndicats est : comment faire face à la grande diversité des profils des salariés sénégalais… de même que ceux des étrangers ; et donc, de leurs demandes ? C’est très approximatif, dans cette cacophonie organisée.
Quant au télétravail : comment en organiser la communication entre les employés sur place et à distance ? Plus problématique encore, la question du matériel. Qui paie, à quelle hauteur pour l’ordinateur, le bureau ou l’électricité utilisés lors de l’option pour le télétravail ? La question devra être tranchée et cela pourrait induire un coût très important pour les entreprises patronales. Certainement, des raisons qui poussent le Drh de la société Sen’Eau à se pencher en faveur de son employeur et, pour davantage de flexibilité, au sujet du présent Code du travail. Ce n’est guère étonnant de sa part. Et il y a lieu de prendre en considération : le télétravail, le travail à distance ou le travail à domicile…
Aussi, en raison de la santé, de l’hygiène et de la sécurité au travail, le Conseil consultatif national doit pouvoir tenir compte :
de la conception et de l’aménagement du poste de travail (ergonomie et environnement de travail à domicile) ;
de la planification et de la répartition du travail ;
et qui fournira certains articles (chaise, bureau, ordinateur, écran, fournitures de bureau, entre autres) ? ;
qui assumera les frais liés aux services publics (électricité, eau, téléphone résidentiel ou cellulaire, Internet, entre autres) ? ;
toute répercussion sur les lois relatives à l’indemnisation des accidents du travail ; à la santé et la sécurité au travail, ou toute répercussion découlant de ces lois ;
les attentes, les échéances sur l’horaire de travail et la charge de travail doivent être déterminées et acceptées par le superviseur et le télétravailleur ;
la liste de contrôle en matière de sécurité d’un bureau à domicile ;
les procédures d’urgence ;
la sécurité des installations électriques, entre autres droits légitimes du télétravailleur.
Attendu sur ce plan [purement] de droit et en parfaite harmonie avec les dispositions de la Convention C87 [sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical] et de la Convention C98 [sur le droit d’organisation et de négociation collective], les syndicats de base exigent la suspension portant sur la validation dudit projet du Code du travail par le Conseil consultatif national, contraire aux normes internationales dans sa pratique et dans sa mise en œuvre. Mieux, les textes et les lois sont à disposition, mais le déficit en termes de professionnalisme par la plupart des inspecteurs et contrôleurs dans leur applicabilité est prégnant. Ces derniers ne sont [jusqu’à maintenant] pas au courant donc : «Lors de la procédure de conciliation devant l’inspecteur du Travail, il n’est pas nécessaire que le mandat donné par le travailleur à son représentant soit écrit ; cet écrit n’est exigé que pour la procédure devant le Tribunal social : Cour suprême 17 novembre 1965 RLJ 1965, 144 – Rec., Crédila volume 1, page 90», fin de citation.
Ibrahima Khalil MENDY
Sg Syntips & Président
du mouvement des Permanents Cnts