Contexte budgétaire difficile et pouvoir d’achat

La conjoncture économique et financière du pays est difficile. Nul n’en ignore. Chaque Sénégalais le ressent quotidiennement au poste où il se trouve, dans les villes comme dans les campagnes, les autorités actuelles l’expliquent par une situation «désastreuse» des finances publiques qu’elles ont trouvée au «quatrième sous-sol». Mais si chaotiques que soient les ressources financières du pays, il ne faut pas qu’elles oublient que ce sont elles qui ont été confortablement élues, suscitant ainsi un grand espoir pour tout un Peuple. La tâche est immense ! Du pain sur la planche pour, j’espère, des hommes de bonne volonté.
Mes chers gouvernants, à longueur de «c’est comment ?», nous parlons non-stop du nombre infini de domaines où vous devriez faire mieux que le régime précèdent. En matière d’éducation -abris provisoires et rémunération du personnel-, de santé -personnels et retraite-, de transports, de routes, d’infrastructures, de bonne gouvernance, etc. Certes, tous ces fronts doivent être attaqués de concert, pour faire évoluer le quotidien des populations et leur offrir le service public honorable, minimum auquel elles ont droit -nourriture, eau, électricité-, besoins physiologiques selon Abraham Maslow.
Mais il y a une requête, une complainte, qui commence à se généraliser partout dans le pays, c’est le pouvoir d’achat qui s’affaiblit chaque jour davantage, «Deuk bi dafa méti» entend-on partout.
Comment profiter d’une nouvelle route -réalisations du Président Macky Sall- si l’on n’a pas un sou pour se payer le bus, Brt ou taxi ? Les Jakarta ? Les Thiak-Thiak ? Pas à la portée de tous !
Comment s’enorgueillir d’une Nation qui entre dans le monde des nouvelles technologies, comme l’envisagent les nouvelles autorités -New deal technologique-, si un ridicule pourcentage de la population peut s’offrir un ordinateur ? Et combien d’enfants auront accès à l’abri provisoire en attendant l’école flambant neuve dont on ne sait quand l’inauguration par le sous-Préfet, si leurs parents n’ont même pas de quoi leur payer cahiers, stylos et bouquins ?
Aussi la réévaluation des salaires, attendue depuis au moins une décennie, a-t-elle été effectuée, de manière substantielle par le Président Macky Sall. Les enseignants en ont largement bénéficié. Et c’est très salutaire parce qu’ils le méritent. On ne devrait pas songer à les baisser.
Cependant, la cherté de la vie, elle, trottine tranquillement. Dans certains secteurs, elle galope. Je pense au loyer dans les grandes villes comme Dakar. Hausse du carburant en perspective avec la suppression des subventions imposée par le Fmi dans ses «conditionnalités» ; le prix du sac de riz, du kilo de viande, du poisson.
C’est pourquoi les familles ne suivent plus, y compris celles qui travaillent, qui sont salariées. Les retraités sont fatigués, surtout ceux qui paient encore le loyer. A la banque, à la fin du mois, le visage émacié par les soucis de la vie, ils attendent leurs miettes.
Monsieur le Président, Monsieur le Premier ministre, je vous demande de revaloriser, dès que possible, les pensions de retraite. Vous en avez le cœur et la volonté.
Evidemment, les causes d’un tel malaise sont bien connues : dilapidation des ressources, mais aussi rémunérations faibles. D’où grogne plus que compréhensible. Et, bien entendu, une corruption généralisée s’installe. Les fonctionnaires sous-payés profitent de leur petit pouvoir pour monnayer l’obtention d’un papier ou l’attribution de tel ou tel service. C’est affreux à dire, mais on les comprend ! Les dirigeants en place, quels que soient leurs efforts dans les secteurs périphériques qu’ils considèrent comme prioritaires, risquent de vivre un jour des remous sociaux sérieux. Je pense aux centrales syndicales qui se liguent déjà pour cause de la question centrale que constitue le pouvoir d’achat. Dans les années qui viennent, il va falloir veiller en priorité à le faire remonter ou, à défaut, lutter efficacement contre la hausse des prix. Tout est question, un jour, de ras-le-bol…
Yakhya DIOUF
Inspecteur de l’Enseignement élémentaire à la retraite