Directeur exécutif de la section d’Amnesty International au Sénégal, Seydi Gassama prévient sur l’absence de reddition des comptes, en mettant en garde contre les conséquences que cela pourrait engendrer. Des propos de cette personnalité de la Société civile qui tombent au moment où la machine judiciaire est mise en branle pour faire la lumière sur la gestion des fonds Covid-19 sous l’ancien régime.Par Amadou MBODJI – 

La reddition des comptes préoccupe Seydi Gassama au point que ce dernier attire l’attention sur les conséquences de sa non-application dans toute sa rigueur. Il est catégorique sur sa position en disant que «sans justice ni transparence, le pays restera prisonnier de violences électorales récurrentes et d’un accaparement des ressources par une minorité».
«Sans la reddition des comptes, le pays continuera à compter les morts à chaque cycle électoral, et les ressources publiques, y compris celles issues de l’exploitation du pétrole et du gaz, continueront à profiter à une petite élite politique et administrative», prévient Seydi Gassama.
La reddition des comptes doit être considérée, selon lui, «comme allant de soi, par les citoyens et par les personnes investies de charges publiques ou privées».
«Le rôle d’une organisation des droits humains est de veiller au respect des droits des personnes mises en cause dans le cadre de la reddition des comptes», ajoute le Directeur exécutif d’Amnesty Interna­tional/Sénégal.
Ces propos de Seydi Gassama coïncident avec la période où la machine judiciaire est mise en branle pour traquer les dignitaires de l’ancien régime accusés de mauvaise gestion des deniers publics. La semaine dernière, le Procureur général Mbacké Fall était face à la presse et a fait savoir que l’exploitation du rapport de la Cour des comptes sur la gestion des fonds Covid-19 a révélé «l’implication de certaines personnes ayant exercé des fonctions ministérielles durant cette période, et sur lesquelles pèsent de graves présomptions de prévarication des deniers publics». Précisant que seule une résolution de mise en accusation de l’Assemblée nationale peut autoriser leur comparution devant la Commission d’instruction de la Haute cour de justice, il informe que l’institution parlementaire a été saisie. Selon Mbacké Fall, 5 ministres sont concernés, et il reste un autre groupe. «Le moment venu, vous aurez les informations (…) Le travail d’exploitation continue. Dans quelques semaines, on pourra vous donner les noms d’autres ministres qui vont comparaître à l’Assemblée nationale avec la résolution de mise en accusation. Les chefs d’inculpation varient entre détournements de deniers publics et escroqueries portant sur les deniers publics. Il appartiendra à l’Assemblée de mieux définir les infractions et de prendre les décisions en prenant des résolutions de mise en accusation», a fait savoir le Procureur général.
Par ailleurs, Mbacké Fall a expliqué que la commission, qui «sera comme un juge d’instruction, va instruire à charge et à décharge». Et, souligne-t-il, «si les charges sont suffisantes, la commission va renvoyer devant la Haute cour de justice pour le jugement de ces personnalités». En outre, il a rappelé que «l’organisation et le fonctionnement de la Haute cour de justice sont réglés par une loi organique, et tous les ministres qui ont agi et commis, dans l’exercice de leurs fonctions, des infractions sont justiciables devant la Haute cour de justice».
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