Le contrat d’affermage de la Senelec avec l’Etat congolais dans la distribution de l’énergie à Brazzaville, signé le 13 février 2025 et qui prévoyait une gestion de dix ans des services électriques, a été suspendu il y a quelques jours. En visite à Dakar, le Premier ministre Anatole Collinet Makosso a justifié cette suspension devant Ousmane Sonko, tout en annonçant la poursuite des discussions pour lever les zones d’ombre afin de calmer l’opinion et les syndicats de son pays. 

 

Par Bocar SAKHO – Comme Le Quotidien l’avait révélé dans son édition du 15 mai dernier, le Premier ministre congolais a confirmé la suspension du contrat d’affermage récemment conclu entre la Société nationale d’électricité du Sénégal (Senelec) et l’Etat congolais. Cette convention, qui confie à l’entreprise sénégalaise la gestion du secteur électrique congolais, avait suscité de vives tensions au Congo-Brazzaville. En visite à Dakar, le Premier ministre Anatole Collinet Makosso a confirmé les griefs émis au sein de l’opinion publique de son pays, notamment les syndicats.

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Le Conseil des ministres du Congo justifie la suspension du contrat d’affermage accordé à la filiale de la Senelec, dénommée Socelec, par «les nombreuses critiques émises dans les médias et sur les réseaux sociaux (…)». Le communiqué ajoute que «les préoccupations soulevées mettent en lumière certaines zones d’ombre entourant le contrat, ce qui a conduit à cette prudente retenue».

Train de vie princier et 41 mesures à satisfaire
Il y a eu une forte pression des syndicats de la société nationale Energie électrique du Congo (E2c) sur les pouvoirs publics pour que le contrat d’affermage, signé depuis le 26 février, ne puisse pas voir un début d’application. «La Senelec a bien remporté cet appel à manifestation d’intérêt. Mais sans compter sur l’opinion publique de nos pays respectifs. Le Sénégal a eu le même problème en 1998, lorsqu’il s’est agi de concéder la distribution et la commercialisation de l’électricité à Hydro Québec. Il y a eu la réaction des populations qui ont eu du mal à accepter que ce secteur public, qui relève parfois de la souveraineté d’Etat, soit confiée à d’autres acteurs, particulièrement des acteurs privés.

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On a donc été confrontés à la même difficulté», indique le Premier ministre congolais, Collinet Makosso, lors d’une conférence de presse conjointe avec Ousmane Sonko. Il ajoute : «La convention d’affermage a été suspendue, oui. C’est le Premier ministre qui a pris la note suspendant la mise en œuvre du contrat d’affermage le temps que nous puissions mettre en œuvre les 41 mesures d’affermage qui ont été identifiées et que nous préparions l’opinion à comprendre la nécessité de la réforme.» Il admet une précipitation dans la signature du contrat : «nous avons confondu vitesse et précipitation. Les zones d’ombre entourant l’accord et un travail pédagogique insuffisant ont suscité des inquiétudes», a-t-il expliqué. Il cite les autres reproches faits à la Socelec : les syndicats congolais dénoncent le démarrage des activités avant la finalisation du processus de légalisation, la composition du conseil d’administration, où un seul administrateur congolais siège. Alors que le Directeur général, le président du conseil et les autres membres sont Sénégalais. Enfin, ils dénoncent l’absence de capital de démarrage et reprochent aux membres sénégalais du conseil un «train de vie princier».

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Par contre, il faut souligner, d’après Anatole Collinet Makosso, que la Senelec n’est pas totalement mise hors circuit. «Nous allons nous asseoir avec la Senelec pour examiner les conditions d’opérationnalisation du contrat, qui comporte 41 mesures préalables à résoudre», a-t-il assuré.
bsakho@lequotidien.sn