Après avoir longtemps été l’un des pays modèles dans le commerce international, le Sénégal a glissé vers le bas dans la classification des risques pays de l’Ocde. Ce qui explique les difficultés du pays à s’endetter sur le marché international, par manque de confiance de ses partenaires.Par M. GUEYE –

 Il est prêté à l’ancien Pré­sident français Jacques Chirac, cette sentence : «Les emmerdes volent toujours en escadrille !» A ce point, les autorités sénégalaises, Cheikh Diba en tête, pourraient lui emprunter la même déclaration. A peine que la revue Bloomberg annonçait hier un dérapage des obligations sénégalaises en dollars et en euros (eurobonds), qui ont continué à perdre leur valeur par rapport à celles des autres pays africains, on apprend que l’Organisation pour la coopération et le développement économique (Ocde), par le biais de son «Arrange­ment sur les taux des primes de risque minimums», a réévalué à la hausse le risque pays du Sénégal. Cet arrangement est établi par le Groupe de classification des risques pays. L’information était pourtant publique depuis le mois de juillet dernier, même si elle n’a pas transpiré au Sénégal.

Ce Groupe de classification des risques pays explique sur son site web que sa classification vise à «rendre compte du risque qu’un pays ne parvienne pas à rembourser sa dette extérieure». Des médias suisses, comme refletsuisse.com, expliquent que la classification du risque pays «a pour objectifs d’évaluer le risque de crédit d’un pays, de mesurer la probabilité qu’un pays honore ses dettes extérieures et de déterminer les primes d’assurance-crédit». La classification utilise une échelle de 7 catégories de risque, et même parfois 8. La catégorie basse indique le risque le plus faible.

La classification est basée sur les indicateurs macroéconomiques du Fmi et de la Banque mondiale. D’une année à l’autre, la classification du Sénégal est passée de 5 à 6. Le Groupe de classification des risques pays n’a pas pour habitude de rendre ses délibérations publiques, explique le site de l’Ocde. On sait toutefois que le groupe se réunit plusieurs fois dans l’année pour actualiser les données sur le risque pays. On sait que le Sénégal qui, jusqu’il n’y a guère, était considéré comme l’un des pays les plus sûrs du continent, a dangereusement dérapé depuis un certain temps. Depuis le mois de juillet, le pays de la Teranga comporte autant de risques que le Cameroun, la Rd Congo, le Rwanda ou la Guinée, entre autres. Des pays qui ne pouvaient rêver se comparer à nous. Et nous sommes maintenant toisés par la Côte d’Ivoire, le Cap-Vert.

Parmi les raisons de ce dérapage, des spécialistes des relations économiques internationales mettent en avant la mésentente du pays avec le Fonds monétaire, depuis la déclaration de Ousmane Sonko sur la fameuse «dette cachée», sur laquelle le pays ne parvient pas encore à se mettre d’accord avec l’institution de Bretton Woods. On a vu, comme conséquence immédiate, le dérapage de la note souveraine du pays par les agences Moody’s, Standard & Poors, et sans doute bientôt Fitch. Et les missions du Fonds ont beau se suivre à Dakar et rencontrer les autorités, la situation ne semble pas bouger.

Faute donc de pouvoir lever des fonds sur les marchés internationaux, le Sénégal s’est tourné vers le marché de l’Uemoa, qui ne semble pas vouloir appliquer au pays des taux punitifs. Néanmoins, même là, les autorités ne semblent pas se satisfaire de ce qu’elles obtiennent. D’où le lancement, depuis hier, de leur Appel public à l’épargne ou «Diaspora Bonds» pour 300 milliards de Cfa.
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