A Ziguinchor, la consommation d’alcool prend des proportions inquiétantes. Sillonner les ruelles sablonneuses, surtout dans les quartiers péri-urbains, sans apercevoir des «Daakaa», lieu privilégié de rencontre des groupuscules de jeunes isolés et retranchés levant le coude, n’est pas monnaie courante. Pourtant, ces prises d’alcool abusives présentent des risques pour la santé, favorisent des comportements dangereux compromettant la sécurité, impactent négativement le développement économique de la région.
Les jeunes consomment de l’alcool de façon intense à Ziguinchor. Cette propension de la consommation demeure inquiétante, comme le révèlent par ailleurs les récents résultats de l’enquête Steps 2024, publiés par le Directeur régional de la santé, Dr Youssouf Tine, le mercredi 10 septembre 2025, qui affolent lamentablement : 11% dépassant ainsi la moyenne nationale qui s’élève à 3%. Egalement, nos études effectuées montrent que les plus jeunes consomment plus intensément que les plus âgés. Ainsi, l’étude menée auprès des 16-17 ans montre que 85, 7% d’entre eux ont déjà expérimenté l’alcool avant même l’âge de la majorité. Cette montée de la consommation d’alcool est due en partie à la proximité avec la République de Guinée-Bissau et de la production localement d’alcool tel le «kadjou» ou le soum-soum.
Cependant, cette forte propension de la consommation d’alcool compromet la santé de ses usagers et, au-delà, freine notre économie. Mais qu’est-ce qui motive les jeunes à consommer autant l’alcool ? Le plus souvent, les jeunes s’adonnent à la consommation d’alcool car il est appréhendé comme vecteur euphorisant et créateur d’ambiance. L’alcool permet d’accroître la confiance en soi et donne de l’assurance dans ses relations avec autrui. Il est aussi vécu comme mode d’un défi à soi-même et une épreuve à surmonter. Il fait partie des prises de risque de l’adolescence. En plus, l’alcool donne une impression provisoire d’omnipotence, permettant la valorisation de soi en échappant à la banalité de la vie quotidienne par les jeunes. Il faut ajouter à la liste, le chômage endémique, et l’oisiveté qui est d’ailleurs une des mères des vices.
Cependant, la consommation d’alcool expose les jeunes à des risques qui ont des conséquences immédiates : une désinhibition, une diminution du contrôle de soi, une altération des réflexes et de la vigilance, une perturbation de la vision, une mauvaise coordination des mouvements, une somnolence…
Outre ces conséquences sur la santé, la sécurité publique et la vie sociale, l’alcool, au-delà de la manne financière qu’il dégage, sape notre économie locale.
La consommation abusive d’alcool détruit notre économie. La jeunesse, force motrice, étant le présent et le futur, doit porter le développement de la région. Porter le développement de la région passe nécessairement par des activités et actions réfléchies. Mais si passer son temps à s’enivrer prend le dessus, nous devenons inactifs, inopérants, voir «inutiles». De ce fait, nous contribuons à lester davantage la pauvreté et à renforcer son assise dans la région. C’est pourquoi il est nécessaire que les porteurs de voix, les autorités réfléchissent profondément sur le fléau qui gangrène les différentes couches socioprofessionnelles afin de trouver des solutions structurelles.
L’abus de la consommation d’alcool a un effet négatif pour la société. Négatif pour soi et sa santé, négatif pour sa sécurité et la sécurité publique, et négatif pour le développement. C’est pourquoi, «consommez avec modération».
«Osons le changement»
Nicolas Silandibithe BASSÈNE