Dans une enquête publiée hier, Cicodev a tenté d’évaluer l’impact du Covid-19 sur la sécurité alimentaire des ménages sénégalais. Selon l’Ong, les mesures restrictives comme la fermeture des «loumas» ont provoqué une flambée des prix et la rareté de certains produits.

En attendant de procéder à une évaluation exacte de l’impact du Covid-19 sur les ménages, la crise qu’il a provoquée a davantage plongé des Sénégalais dans la précarité. Durant le couvre-feu, la vie économique de certaines régions, «marquée par les échanges économiques au sein des marchés quotidiens, hebdomadaires (louma) ou supermarchés», a connu un ralentissement exceptionnel qui a érodé les revenus des commerçants.
Dans son enquête sur les impacts du Covid-19 sur la sécurité alimentaire au Sénégal publiée hier, l’Institut panafricain pour la citoyenneté, les consommateurs et le développement (Cicodev) donne l’exemple des loumas de Kolda «qui polarisent plus de 60 villages environnants avec plus de 600 tonnes de riz, plus de 300 tonnes de céréales et plus de 800 tonnes de légumes vendus par mois» dont le plus important est celui «de Diaobé» qui fait «un chiffre d’affaires de 700 millions F Cfa par semaine». «La fermeture du marché de Diaobé pendant 8 semaines a entraîné un manque à gagner estimé à environ 5 milliards de F Cfa», révèle Cicodev. Durant leur fermeture provoquée par la mise en place de restrictions liées au Covid-19, les populations ont connu «une flambée des prix, une rareté des productions agricoles, animales et végétales, une inaccessibilité et une indisponibilité des produits de qualité couplées à des problèmes de stockage». «L’enquête menée par Cicodev révèle à suffisance qu’il existe de réelles menaces d’insécurité alimentaire qui peuvent engendrer un affaissement de l’économie nationale. Son objet s’inscrit en droite ligne de notre mission de générer des connaissances sur les impacts des choix et modèles des citoyens et d’informer, de défendre, de protéger, d’éduquer et de représenter les consommateurs, avec un accent particulier sur les droits des plus défavorisés», déclare Amadou Kanouté, directeur exécutif de Cicodev.
Au-delà de l’accès aux ressources alimentaires suffisantes, diverses et nutritives, la conservation des produits périssables, liée à l’absence de centres de stockage dans certaines régions, et les difficultés d’accès au crédit dans les banques ont pesé sur la vie de plusieurs millions de personnes. «Il faut ajouter à ce décor que les populations sont obligées de parcourir de longues distances pour s’approvisionner avec des risques de non-disponibilité des produits. Ces problèmes, faut-il encore le rappeler, concernent la quasi-totalité des régions du pays, de Kébémer à Matam, en passant par Tambacounda et Kédougou», déclare Khady Thiané Ndoye, chargée de Programme accès durable à une alimentation saine et nutritive à Cicodev.
En tout cas, l’Ong exhorte l’Etat du Sénégal à «mettre en place des stocks de sécurité pour garantir la disponibilité permanente des produits alimentaires sains et nutritifs de première nécessité à un coût acceptable pour les consommateurs les plus démunis, réduire autant que possible la dépendance du marché et surtout extérieur pour assurer la sécurité alimentaire de ses citoyens et favoriser l’émergence de systèmes alimentaires (production, transformation, distribution, stockage, consommation, gestion des déchets) plus durables, plus résilients et plus favorables aux exploitations familiales locales».