Les derniers évènements sanglants enregistrés dans notre pays ont donné à certains de nos compatriotes, l’occasion de se prononcer sur ces dérives et d’émettre des avis aux relents politico-sécuritaires voire ethnicistes. Comme le disait Modou mon cousin étudiant, «la liberté d’expression est travestie dans notre pays». Quoiqu’encadrée, nos compatriotes n’en délimitent pas les contours et transgressent la plupart du temps les règles élémentaires liées à l’éthique et à la déontologie. Mieux, ils s’inscrivent même dans un nihilisme profond et permanent, allant jusqu’à attaquer les ressorts de nos sociétés. Dans cet élan, certains médias les rejoignent et font la basse besogne de la radio des Mille collines, ignorant royalement les méfaits de cette communication fractionniste. Les messages séditieux qu’ils font passer dressent un tableau lugubre et une indignité notoire prêtée à nos dirigeants.
Pourtant, ce pays repose sur un socle très solide construit par feu le Président Senghor, l’unité nationale. Au-delà de cette unité, il a même trouvé une analogie patronymique à l’époque de la fédération du Mali, pour une meilleure intégration des peuples sénégalais et soudanais. Car en fait le Diop du Cayor était loin du Traoré du pays dogon. Mais le commun vouloir de vie commune primait sur tout. Dans ma vie de fantassin, je n’oublierai jamais cette séquence du capitaine originaire du Sud et qui a rasé sa maison paternelle où se tenait une réunion des irrédentistes. C’était sa mission et il l’a exécutée sans rechigner, démontrant ainsi de haute facture son esprit régalien, son amour pour la Patrie, mais surtout son souci de sauvegarder l’unité nationale.
C’est son devoir certes, mais il aurait pu se débiner comme cette classe d’officiers renégats, qui squattent les plateaux de télévision et les colonnes des journaux pour étaler des sciences obscures ou attaquer des autorités. Un officier bien formé et expérimenté ne peut pas avoir certains écarts de langage ou se permettre d’émettre des avis dans des domaines dans lesquels il n’a aucune expertise. Le domaine sécuritaire, l’expérience onusienne et même la géopolitique demeurent leurs domaines. Ce faisant, il est frustrant de lire des articles politiques ou d’entendre des prises de position émanant d’officiers s’enfonçant dans les méandres ethnicistes, régionalistes et réfractaires. Si on a commandé des hommes au feu, on ne se permettra jamais ces propos irrespectueux à l’endroit du chef suprême des armées, comme ce commissaire divisionnaire de classe exceptionnelle dans les colonnes du quotidien Kritik.
Une virulence inouïe a été notée dans ses propos, comme «c’est pendant votre magistère que les contre-valeurs et les anti-valeurs, ont été magnifiées comme des références paradigmatiques dans la gestion des affaires publiques». Une casquette politique devrait endosser cette lourde assertion et non émanant d’un ancien cadre de son rang. Les colonels Aziz Ndao et Mamadou Adji (le rwandais) ne diront jamais ça. Le «souffrir en silence» a une valeur née des séances initiatives.
L’officier est un seigneur nous apprend-on dans les écoles. Il ne fait pas dans l’à peu près, dans la calomnie, dans l’invective ou dans la médisance pure. Au-delà des qualités de meneur d’hommes, ses facultés d’analyse pointue sont de cité, surtout dans des moments d’incertitude. Le mal qu’on ressent est de les voir attacher à leur nom leur titre obtenu dans les rangs. Rien ne justifie ces titres à côté d’insanités et de propos qui désacralisent l’institution et lui collent une étiquette déphasée. Si on quitte délibérément une institution en la critiquant, on doit se garder d’en réclamer l’ancien titre. Et la plupart du temps, les exigences liées au métier, les difficiles conditions du terrain sont travesties en «injustice» alors que les pairs les vivent avec honneur et dignité. Ces officiers qui démissionnent ont choisi de ne plus servir avec honneur et fidélité. S’ils se réclament encore officiers, ils en portent des tenues délavées, ôtées de leur splendeur, de leur netteté, mais aussi de la pureté de l’âme du propriétaire.
Que l’on ne se trompe pas de cible ; nos Forces de défense et de sécurité (Fds) ont des ressources humaines de grande valeur, qui ont fait leurs preuves dans tous les théâtres d’opération. Le manque de clairvoyance de certains médias permet à ces tenues délavées de se mettre au-devant de la scène. Ils pensent parler au nom de la troupe.  Que nenni ! Ils n’exhibent que les failles de leur formation et la perte de leur éthique et de leur discipline. Il existe dans ce pays moult expertises silencieuses, de très grands officiers qui maîtrisent mieux ce que le ces tenues délavées racontent avec maladresse. Votre discours devrait tourner autour de l’amélioration des conditions de travail et d’existence des hommes ou de polir l’image de l’institution. Nous avons une vaillante armée, une disciplinée gendarmerie, une professionnelle police et d’autres forces paramilitaires compétentes. Que ceux qui portent ces tenues délavées se taisent.
Ces Sénégalais qui épiloguent à longueur d’années sur des sujets dont ils ne détiennent pas la vraie teneur ou qui passent pour des juristes doivent également se taire. Les voyants sont au rouge pour eux, mais ce pays naviguera longtemps sur un fleuve tranquille, même si encore une tenue délavée a osé insinuer une atteinte institutionnelle. Le seul dépositaire du pouvoir est le Peuple. Une insulte ne peut dépasser le fait de qualifier de veules les députés, remettre en cause leur honorabilité. Un officier comme me le disait le général Salupeto Pena dit Ben Ben, ne parle pas et ne se mêle jamais d’affaire politique. Son devoir de réserve et de retenue restent pour lui des garde-fous, démissionnaire ou à la retraite.
Adama DIOP
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