Pour atteindre l’autosuffisance alimentaire tout en créant des emplois durables, l’agriculture est l’un des piliers sur lesquels le Sénégal doit s’appesantir. Pour autant, il ne faudrait pas favoriser les grands investissements au détriment des petits. La solution, selon l’Ipar, c’est la modernisation de l’agriculture familiale. Qui pourrait créer 3 fois plus d’emplois, en plus de contribuer à la sécurité alimentaire du pays. Par Malick GAYE – 

1300 milliards de francs Cfa, c’est la facture que paie le Sénégal chaque année pour sa nourriture. Cette situation a fini d’exposer la vulnérabilité du pays. Le Covid-19 a été une piqûre de rappel pour l’atteinte de la souveraineté alimentaire. Le régime précédent avait même confectionné une stratégie nationale d’atteinte de l’autosuffisance alimentaire. Si pour l’heure, il est difficile de connaître l’orientation du nouveau régime sur le sujet, une chose reste certaine : il n’est pas possible d’atteindre la sécurité alimentaire en mettant en second plan l’agriculture familiale. C’est la position défendue par le Directeur exécutif de l’Initiative prospective agricole et rurale (Ipar). «L’agriculture a plusieurs fonctions», a déclaré Dr Cheikh Oumar Ba pour expliquer que le sujet est transversal et qu’il faut une approche plurielle. «La première fonction de l’agriculture, c’est de nourrir les populations. La deuxième est de créer des revenus pour les producteurs. La troisième est de créer des emplois. La quatrième est de fournir de la matière première aux industries. L’Etat devrait éviter de se focaliser sur un seul objectif, tout en s’assurant que ces objectifs ne soient pas contradictoires», a détaillé Dr Ba. Qui affirme que prendre l’option de faire appel aux grands investisseurs n’est pas la meilleure solution pour le Sénégal. «Vous ne pouvez pas avoir la volonté de nourrir les Sénégalais et donner les terres à quelques privés qui vont gagner beaucoup d’argent et acheter des devises pour l’Etat. Les résultats de ces privés vont servir à améliorer la fiscalité de l’Etat. On ne va pas forcément créer des emplois, alors que si vous permettez à l’agriculture familiale de se moderniser, elle va créer 3 fois plus d’emplois», a dit le chercheur. Avant d’ajouter : «Ils sont 269 mille jeunes qui arrivent sur le marché de l’emploi. L’Etat ne peut satisfaire que 10% de la demande. Il faut réformer le foncier pour le sécuriser.»
Le Directeur exécutif a tenu ces propos hier, lors de l’atelier de présentation du plan stratégique 2024-2028 du think tank Ipar. Ce plan compte 5 axes stratégiques. Il s’agit du renforcement et de la diversification de la recherche selon les standards de qualité, du renforcement des capacités de l’Ipar et de ses partenaires, de la promotion du dialogue politique et la mise en débat, du renforcement de la gouvernance institutionnelle de l’Ipar, et la promotion de la stabilité et de la durabilité institutionnelle de l’Ipar. Ce plan stratégique va reposer sur les thématiques suivantes : le devenir des exploitations familiales agricoles et rurales ; la gouvernance inclusive des ressources naturelles et foncières ; les objectifs de développement durable et territoires en transition ; les systèmes alimentaires durables, résilients et nutritifs et politiques agro-sylvo-pastorales et halieutiques ; les jeunes, femmes et stratégies entrepreneuriales, et de mobilité.
L’objectif du plan stratégique est de contribuer au développement économique et social du Sénégal et de la région ouest-africaine par la création d’espaces d’échanges et de débats fondés sur les résultats d’une recherche stratégique et prospective rigoureuse, en lien étroit avec les défis actuels et futurs des économies agricoles ouest-africaines et des exploitations familiales en particulier. La finalité est de contribuer à la transformation positive des systèmes de production agricole et rurale pour l’amélioration des conditions de vie des populations du Sénégal et de l’Afrique de l’Ouest.
mgaye@lequotidien.sn