Entretien avec… – Moussa Sam Daff, directeur de Dalal Jamm : «Même si certains services n’ont pas encore démarré, il y a un rush au niveau de l’hôpital»

Héritier de l’essentiel des services de l’hôpital Aristide Le Dantec fermé pour cause de reconstruction, Dalal Jamm est pris d’assaut par de nombreux patients. Dans cet entretien, Moussa Sam Daff, directeur de l’établissement hospitalier, explique le plan d’absorption des malades et l’ingénierie mis en place pour faire fonctionner tous les services.Par Abdou Latif MANSARAY – L’hôpital Dalal Jamm a hérité de beaucoup de services venant de Le Dantec. Comment se déroule leur installation ?
L’installation se passe progressivement. On a deux services qui sont installés : il s’agit de l’onco-pédiatrie et la dermatologie. Pour l’ophtalmologie, les équipements sont venus et leurs activités vont démarrer à partir du 1er septembre. En ce qui concerne la chirurgie, les équipements ne sont pas venus. Mais l’hôpital Dalal Jamm a aménagé deux salles d’opération qui sont en train d’être installées pour que les interventions chirurgicales puissent s’y dérouler de façon correcte. S’agissant de la parasitologie et l’histologie embryonnaire et cytogénétique, les équipements sont arrivés, ils sont en train d’être installés. Pour l’anatomie pathologique, nous n’avons pas encore reçu d’équipements, mais le chef de service est passé discuter avec le nôtre et je pense que là également, les choses vont se faire très rapidement. Même pour certains services qui n’ont pas encore démarré, il y a un rush au niveau de l’hôpital. Ce sont des patients venant de l’hôpital Le Dantec, rajoutés au flux que nous avons au quotidien. Mais, nos équipes sont en train de les prendre en charge.
Nous avons constaté une augmentation au niveau des consultations, des urgences et même au niveau des interventions chirurgicales, bien que les services ne soient pas encore opérationnels. Ce sont actuellement nos équipes qui sont en train de les prendre en charge. Parce qu’en réalité, dès lors que les malades ont été informés que certaines activités sont délocalisées à l’hôpital Dalal Jamm, ils n’ont pas attendu de savoir si l’équipement est installé ou pas pour se rendre directement à l’hôpital.
Avec ces services, qu’est-ce qui va changer à Dalal Jamm ?
En réalité, il n’y a pas grand changement sauf qu’on a beaucoup plus de malades, d’accompagnateurs. C’est un peu ça qui va changer. On aura aussi des effectifs additionnels. Et j’ai reçu récemment une dizaine de personnes venant de Le Dantec avec qui il fallait discuter pour les rassurer et les intégrer. Il faut leur dire un peu comment l’hôpital marche même si elles viennent d’une autre structure, parce que chaque hôpital a ses spécifiés, mais aussi ce qu’on attend d’elles. Et je pense que l’information et la communication sont passées. Et aujourd’hui, elles se sentent comme chez elles. Dalal Jamm était en train de monter en puissance depuis des mois et nous nous préparions à ça. C’est-à-dire dans l’organisation, la mise à disposition de locaux additionnels. C’est une dynamique qui continue.
Alors quelles sont les mesures que la direction a prises en termes d’accueil des patients, du nouveau personnel médical et administratif ?
Les dispositions sont les mêmes au niveau de l’accueil des patients comme au niveau du brancardage pour les malades. Et ces brancardiers sont toujours à l’accueil pour assister les personnes à mobilité réduite. A l’accueil, nous avons aussi de bonnes dames qui informent toute personne qui entre dans l’hôpital. Les effectifs, nous les avons augmentés. Au niveau de nos consultations externes, si toutes les spécialités veulent consulter à la même heure, ça va créer un engorgement. Mais aujourd’hui, il y a la possibilité de consulter les après-midis en cardiologie et la cancérologie va aussi augmenter ses consultations à la même heure. Tout comme les maladies infectieuses, toutes les spécialités qui le désireront ouvriront des plages de consultation dans l’après-midi pour décongestionner le flux de malades que nous recevons les matinées. Nous allons réquisitionner certains locaux, les réaménager pour pouvoir y accueillir certaines activités. Aujourd’hui, nous sommes en train d’augmenter la capacité de la pédiatrie pour pouvoir intégralement absorber toutes les activités de l’onco-pédiatrie. Nous sommes en train de finaliser un peu l’installation. Et nous avons aménagé des locaux pour augmenter notre capacité de prise en charge de la chimiothérapie. Ce qui change en réalité, ce sont les effectifs qui vont nous parvenir de Le Dantec.
L’hôpital Le Dantec avait une vocation de formation et d’enseignement. La structure va-elle héritier de ça ? Je parle de la formation et l’encadrement des étudiants en médecine ?
Dalal Jamm est un hôpital de niveau 3, qui a une mission de soin certes, mais d’enseignement et de recherche aussi. C’est-à-dire bien avant, nous recevions des étudiants dans le cadre de la formation et des projets de recherche également sont en cours. Nous allons recevoir beaucoup plus d’étudiants en formation. Et si vous allez en médecine interne, vous allez voir une quarantaine d’étudiants qui sont là-bas. Vous allez en cardiologie, c’est pareil. En réalité, nous sommes dans cette mission d’enseignement et de recherche. Et les chefs de services qui sont ici, travaillent, s’activent convenablement à cette mission auprès des étudiants.
Comment les malades vont être informés que
désormais ils ont été transférés ici ou c’est l’administration de Le Dantec qui s’en charge ?
Au niveau de l’administration de Le Dantec, des informations sont données. Le ministère de la Santé a fait des spots pour dire comment les services de le Dantec sont répartis en langue française, wolof et certainement dans les différentes autres langues nationales. Et pratiquement les patients savent là où se trouve leur service de prise en charge. Et une fois à l’hôpital, on les prend en charge s’ils ont leur dossier. Sinon, on leur ouvre un nouveau dossier pour certaines pathologies. Mais il y a d’autres qu’on nous amène et nous sommes obligés de les prendre. Parce que souvent, leur médecin soignant part avec leur dossier.
En ce qui concerne les salaires, pour certains personnels non fonctionnaires, c’est Dalal Jamm qui va s’en charger ou bien ?
Dalal Jamm ne prendra pas en charge la question salariale. Les fonctionnaires, l’Etat va continuer à les payer, les contractuels, les prestataires, c’est l’hôpital Le Dantec, avec qui une convention sera signée, qui va continuer à assurer leur charge salariale.
Concernant aussi les tickets, il y a des malades qui fustigent que le prix soit exorbitant à Dalal Jamm contrairement à Le Dantec. Est-ce que vous pensez à mettre sur pied un moyen pour revoir les prix à la baisse ?
Les contraintes à l’hôpital Dalal Jamm ne sont pas les mêmes qu’à Le Dantec. Je ne sais pas comment ça se passait à Le Dantec. Ici, on donne à manger matin, midi et soir. L’hygiène, la literie, tout est pris en charge par l’hôpital. Forcément, ça a un coût. Maintenant pour certaines activités, nous faisons de sorte qu’il n’y ait pas un surplus à payer par les malades. Si vous prenez la question de l’onco-pédiatrie, les enfants atteints de cancer payent 50 mille F Cfa l’année, avec 12 paramètres gratuits, un autre bilan de 6 paramètres à moitié gratuite. Vous voyez le manque à gagner pour l’hôpital. Mais aujourd’hui, l’hôpital a décidé de reconduire pour tous ces malades, ce qui se faisait à l’hôpital Le Dantec. Ce qui veut dire qu’on ne paie pas un franc de plus dans ce domaine. Il ne faut pas oublier aussi que l’hôpital a son budget et il est fait à partir des tarifs qui sont en vigueur. Et je ne suis même pas sûr qu’il y ait une différence entre ce qui se fait à Dalal Jamm et ce qui se faisait à Le Dantec. Parce que l’hôpital Dalal Jamm est un hôpital public, qui applique les politiques publiques. Et les gens qui n’ont pas les moyens de payer, même sans la fermeture de Le Dantec, l’hôpital faisait face également à des cas sociaux et on a mis en place un dispositif de prise en charge après une enquête sociale. Et il y a des modalités de paiement qu’on fait pour alléger les populations.
Dalal Jamm a des projets futurs, pouvez-vous en parler ?
Nos projets restent les mêmes et ce sont des projets d’envergure pour que l’hôpital Dalal Jamm assure un rôle d’hôpital de niveau 4. Un hôpital de référence en Afrique. Nous avons notre bâtiment de procréation, de greffe de moelle et il sera bientôt réceptionné. Nous avons le Centre de traitement des épidémies, qui va être réceptionné aussi bientôt. Et bientôt, vous allez voir un service pour la consultation des douleurs. Nous avons aussi l’unité de traitement d’insuffisance rénale ici à Dalal Jamm. Et tout ce qui concerne les différentes formes de cancer sera disponible, ici certains sont déjà fonctionnels. Et notre mission, c’est de permettre à tous les Sénégalais d’avoir un cadre pour se soigner et réduire les évacuations à l’étranger. Et le personnel qualifié est là, nous allons renforcer la formation des disciplines, trouver des bourses pour certains et des partenariats pour avoir un personnel encore plus performant.
Et le climat social au sein de l’hôpital ?
Le climat social est relativement calme et serein, les gens se parlent et la communication passe. Nous sommes tous unis par une chose : le bon fonctionnement correct de l’hôpital. A contrario si la Direction voit des comportements qui en réalité freinent le bon fonctionnement et le développement, j’appelle les uns et les autres pour en discuter. Les conflits ne manquent pas, il faut simplement anticiper et voir comment trouver des solutions aux revendications. Et très souvent, il y a une solution.
latifmansaray@lequotidien.sn