Les deux opérations d’extinction du puits de gaz de Fortesa à Ngadiaga ont échoué. Une situation insoutenable pour les populations qui vivent sous la hantise des flammes toujours vives.
A Ngadiaga, le soulagement a été de courte durée. L’annonce de la fin de l’incendie avait plongé les populations dans l’allégresse, mais elles ont vite déchanté. La première opération dénommée «Tuer le puits», réalisée le 16 janvier, n’a pas connu de succès. Celle d’hier, annoncée comme une réussite, a aussi fait un échec.
A la plateforme d’exploitation du gaz de Ngadiaga, les flammes sont toujours vives. La peur étreint les populations. Abdou Ngadiaga ne cache pas sa peur : «Nous vivons tous les jours avec le danger. Le moindre bruit est source de panique. Nous ne dormons plus la nuit.» Une situation provoquée par le déficit de communication sur les opérations d’extinction du puits gazier lancées depuis le 1er janvier et menées par le groupe de services pétroliers américains Haliburton, sollicité par le Sénégal pour éteindre le feu. «La compagnie qui doit éteindre l’incendie ne communique pas avec la population, de même que l’entreprise Fortesa. Nous sommes vraiment inquiets. Chaque jour nous passons devant la fumée qui se dégage davantage. Certaines personnes sont même devenues malades à cause d’elle. D’autres ont préféré se recaser dans les villages environnants dans des conditions vraiment difficiles.» Abdou Ngadiaga s’offusque surtout des méthodes utilisées par les experts et techniciens américains pour circonscrire l’incendie. «Ils mélangent de l’eau à des tonnes de sel. Cela pollue la nappe phréatique et dégrade l’environnement», dit-il. Il s’y ajoute le manque de sécurité au niveau du bassin d’eau creusé pour alimenter les pompes qui servent à éteindre le feu. C’est là que le gendarme Sakoura Gaye s’est noyé le 19 janvier dernier. «Nous demandons que le bassin soit sécurisé parce qu’il est à proximité des maisons. Egalement que les alentours du puits de gaz soient davantage sécurisés», demande Massamba Gadiaga, porte-parole du Collectif pour le développement de Ngadiaga. Surtout que, fera-t-il remarquer, «il y a un désert infrastructurel qui entoure la zone avec l’absence de politique de Responsabilité sociétale d’entreprise (Rse) des deux entreprises. Il y a une absence totale de structure d’assistance, alors que nous sommes dans une zone d’insécurité parce que ceinturée par des tuyaux des puits de gaz. Les populations sont laissées à elles-mêmes. Nous sommes déjà dans l’insécurité totale à Ngadiaga. Nous sommes hantés par la peur».
«Le délai pour l’extinction va dépendre de la nature de la fuite»
C’est un travail ardu auquel se livrent les techniciens américains. «Eteindre l’incendie va juste permettre de pouvoir accéder à la zone du puits et après il y a le travail de recherche et d’arrêt de la fuite. Ce sera beaucoup plus compliqué. Le délai pour l’extinction va dépendre de la nature de la fuite, parce que cet incendie est apparu dans une phase très particulière de la vie du puits.» Pourquoi ? «Ce puits était en cours de modification. On est allé faire un forage pour aller cherchez du gaz plus profond puisque la productivité était en déclin. Le gaz trouvé est en train de se perdre et il est possible qu’on soit obligés de tuer le puits pour pouvoir venir à bout de cette fuite», explique Ludovic Leroy, ingénieur pétrolier, interrogé par Rfi.
Il faut savoir que l’incendie s’est déclaré le 19 décembre 2020 sur le site de Dieleuk Peul, à la suite d’une éruption de gaz naturel, lors d’une opération de forage dans la zone de Ngadiaga, une plateforme on-shore de Ngadiaga, située dans la commune de Notto Gouye Diama, département de Thiès. L’explosion a causé la mort de Henry Gunning, en charge de la maintenance et du suivi des travaux de la plateforme d’exploitation du gaz de Ngadiaga. S’en est suivie celle du gendarme Sakoura Gaye, déployé pour la sécurisation du périmètre gazier, qui a péri par noyade. Malgré les opérations d’extinction du puits de Fortesa lancées le 1er janvier 2021, la durée pour neutraliser le feu sur le champ gazier n’a pas été indiquée par les autorités.