Par Bocar SAKHO –

Mme Doura Diallo et son bébé ont souffert avant de rejoindre l’Au-delà. Les conditions de leur décès, détaillées par le procureur de Kédougou, décrivent une situation inqualifiable. Et le personnel de santé ne voudrait même pas l’ouverture d’une enquête judiciaire. Que fait-on de la douleur de la famille Diallo, qui fait face à un double deuil ?
Mais, réveillez-vous, les choses ont changé. Car le degré d’exigence citoyenne, l’accès facile aux plateformes d’information comme les réseaux sociaux, nous poussent à relever nos standards de performance. Si tous les secteurs sont concernés, la santé, où s’affrontent la vie et la mort, ne peut pas en être exclue.
Il faut apprendre à faire face à vos responsabilités et à les assumer. Ce corporatisme de bas étage est indigne d’un secteur aussi névralgique. Bien sûr, les médecins compétents ne vont jamais verser dans ce jeu de chantage. Seule la vérité les intéresse et le respect du serment qui les lie à elle. S’ils doivent dénoncer des manquements, ils le feront pour sauver des vies et rendre Justice.
Quoi que l’on puisse dire ou croire, il faut accepter que la mort de Mme Diallo mérite l’ouverture d’une procédure judiciaire sans complaisance. Pour l’image de la santé, elle doit être une exigence pour ses travailleurs. Les mis en cause ont la possibilité de se défendre et se faire représenter par leurs avocats. Si les allégations contenues dans le communiqué du procureur sont confirmées par un procès, il faudra sanctionner cette «incompétence notoire» comme il l’a décrit. Parce que ce serait une honte pour le corps médical, pour la Nation, face au monde entier.
Si la présomption d’innocence est sacrée, l’Etat se révélerait par contre faible en cédant aux pressions et menaces des gynécologues et techniciens supérieurs en réanimation. Bloquer tout le secteur médical pour s’opposer à une enquête judiciaire ressemble à un déni de Justice. A coup sûr, cela va marcher, malheureusement. Pourquoi devraient-ils renoncer à cette arme ? Ça a marché à Louga et Thiès. Même si vouloir faire pression sur les médias pour qu’ils ne parlent pas de l’affaire relève de l’improbable ou du rêve. Nous allons continuer à en parler en respectant la sacralité des faits.
Aujourd’hui, l’Etat a perdu une partie de son autorité sur tous ses agents. Alors que le principe qui gouverne nos carrières est simple : les meilleurs doivent être récompensés, les fautifs sanctionnés, sans égard à leurs statuts. On en arrive même à regretter Abdou Diouf dont la main n’avait pas tremblé quand il s’est agi de prendre la décision de radier tout le corps de la Police nationale. Une décision impopulaire en son temps, mais qui a permis de calmer des ardeurs malvenues.

bsakho@lequotidien.sn