L’inaccessibilité du Marché d’intérêt national de Diamniadio constitue un frein à son envol. Les acteurs demandent la réalisation de voies de qualité qui puissent desservir le marché et permettre une meilleure commercialisation des produits et partant, accroître la fréquentation du marché.

Le Sénégal est confronté à un grand problème qui touche la production et l’écoulement des produits agro-alimentaires. Faute de moyens de distribution, de stockage, d’industries de transformation de qualité ou de moyens de conservation adéquats,  les producteurs ne parviennent toujours pas à écouler leurs produits par manque de moyens d’accès aux marchés. Dans tout le pays,  les producteurs agricoles éprouvent les mêmes difficultés de perte post-récolte, à savoir l’écoulement et le stockage.  Les prix connaissent aussi bien des variations annuelles (en fonction de la production) que saisonnières (période de soudure). Le suivi des marchés permet de contrôler l’évolution des prix des produits selon les différentes périodes de l’année.

En guise de correction et de soulagement des acteurs du secteur et pour repositionner davantage l’économie, le Sénégal s’est doté d’un Marché d’intérêt national d’envergure internationale. En dépit de ce qu’il représente et des investissements qui ont été consentis, il fait face à un enclavement qui ne favorise pas encore sa fréquentation massive par les acteurs. Des efforts supplémentaires sont attendus de l’Etat dans la construction d’accès praticables pour faciliter les échanges et pousser les acteurs à s’approprier l’infrastructure sachant qu’ils y trouvent déjà leur compte. Le Marché d’intérêt national de Diamniadio est une «opportunité» pour la commune, a fait savoir le Secrétaire municipal de ladite commune, Arona Ngom. «Cependant, je dois dire, pour le regretter, que l’accès au marché à partir de Diamniadio est très difficile.» Il préconise, pour faciliter et encourager la fréquentation du marché, «d’accélérer les travaux de la route qui doit joindre la Route nationale N°1 à l’axe 70 à partir de la gare du Ter». C’est le même son de cloche qui a été donné par Saïd Tarafi, importateur et exportateur marocain qui, même s’il a déjà réservé et pris un magasin au Min, n’occulte pas son accès difficile. Trouvé au marché des fruits de Diamniadio, communément connu sous le nom de «pack», Saïd est debout devant une mini-camionnette.

Vêtu d’un jean et d’un polo blanc, il est en pleine conversation avec un compatriote marocain, tout en supervisant les camions frigos qui déchargent les fruits en provenance du Maroc (Mandarine). «Nous stationnons pour débarquer nos produits dans ce lieux (Pack). Il n’y a pas de sécurité et on n’a même pas d’endroit où faire nos besoins», se plaint-il. Sur les droits de stationnement, il informe : «On paie 50 000f par camion, le temps du stationnement au propriétaire du lieu.» Pourtant, ce dernier dispose bel et bien d’un magasin au Marché d’intérêt national de Diamniadio. «Il y a un manque d’infrastructure routière qui fait qu’il n’est pas facile pour le moment de rallier le marché même s’il offre plus de commodités qu’ici», regrette-t-il.

Le responsable du lieu, en l’occurrence Ousseynou Ba, conforte la position de Tarafi. «On est obligés de se rendre jusqu’à Sébikotane pour prendre le péage et pouvoir se rendre au Marché d’intérêt national de Diamniadio. Cela fait beaucoup», s’offusque Ousseynou Ba. Qui n’a pas manqué de demander au gouvernement de «nous aider à y accéder facilement». Parce que le marché est à l’avantage de tout le monde. Mais, il y a le «travail de l’accessibilité du marché» qu’il faille régler en amont, fait-il comme suggestion. Il informe que toutes les régions, pour ce qui est de la mandarine, s’approvisionnent au «Pack» de Diamniadio, malgré les conditions d’insalubrité, mais aussi d’insécurité auxquelles sont exposés les acteurs.

Il est 10 heures passées de plusieurs minutes à la rue El hadj Mbaye Guèye (ex-Sandiniérie). Malgré cette journée couverte accompagnée de fraîcheur, la rue est plongée dans une ambiance effervescente. L’agent de police préposé à réguler la circulation s’active, sifflet à la bouche, avec des gestes du bras, pour indiquer l’action à mener aux automobilistes et piétons qui cherchent à se frayer un passage. De l’autre côté, les étals sont exposés un peu partout le long de la rue à même le sol. La plupart de ces étals exposent des fruits et les marchandages se font bon train. Des camions frigos stationnent le long de la chaussée, prennent possession de la voie publique et déchargent au même moment leur contenu avec l’aide de pousse-pousse et autres déchargeurs qui s’activent sans arrêt. A première vue, on dirait un marché de la Guinée délocalisée à Dakar. Il suffit d’un peu de patience pour se rendre compte du contraire.

A l’intérieur d’un magasin, des agents rangent des cartons et autres cageots de fruits. Un homme d’âge assez avancé est en pleine discussion, entouré de jeunes qui écoutent les orientations. C’est le responsable du lieu. Il finit par accorder son hospitalité, et après quelques échanges, nous oriente vers le responsable du regroupement des commerçants de la rue. Ce dernier, nommé Bassirou Ba, jouit d’une grande influence. «On pourra discuter tranquillement ici», lance-t-il. C’est une sorte de chambre froide où sont entreposés des fruits. Il dit : «Le choix de l’implantation du marché nous a bloqués dès le départ. Si on avait été consultés, le marché n’allait pas être édifié dans cette zone.» Hélas ! Le vin est déjà tiré. M. Ba déplore «l’accès difficile au marché» qui ne facilite pas les échanges et n’encourage pas les acteurs à rejoindre le lieu. Par conséquent, Bassirou Ba exhorte le gouvernement à construire «des voies d’accès» pour «désenclaver» le marché, et demande la «réduction des prix de la location des magasins de stockage qu’il trouve onéreux». Malgré les efforts qui ont été consentis par l’administration pour alléger les tarifs.

Par ailleurs, il estime que le décollage du marché va beaucoup dépendre de la «construction prochaine du port de Ndayane». Il prédit sa rentabilité au minimum dans 3 ans. Toujours pour inciter les acteurs à rejoindre le marché, il a suggéré à l’administration de se doter ou créer des lignes de liaison pour faciliter la distribution et la livraison des produits. En outre, il admet que ce serait une «grosse perte» pour l’Etat d’investir autant d’argent dans une infrastructure de ce genre et qu’elle ne soit pas en retour fréquentée au regard de son importance dans la régulation du secteur. Sur les produits trouvés sur les lieux, le responsable du regroupement des commerçants de la rue El hadji Mbaye Guèye informe que ce sont des produits «importés», pour la plupart de l’Afrique du Sud. Sinon, ils viennent du Maroc, de la Belgique, de la France, de l’Espagne, de l’Italie et seulement 2 fois dans la semaine de la Guinée Conakry.
Ces doléances ne sont pas tombées dans l’oreille d’un sourd. Elles sont au cœur des préoccupations de l’administration du Marché d’intérêt national qui travaille d’arrachepied à solutionner ces interpellations qui constituent un frein au développement du marché. Lors d’une réunion de concertation entre les différents acteurs de la filière des fruits, en vue d’une meilleure appropriation du Marché d’intérêt national de Diamniadio, tenue en octobre dernier, le Directeur général dudit marché, Mohamedou A. Mbaye, a exprimé toute sa disponibilité à agir pour réduire les contraintes d’accès au marché.

Pour lui, «il est inconcevable», qu’après tout l’investissement qui a été consenti par l’Etat, que le lieu soit faiblement fréquenté. Des mesures incitatives doivent être prises par l’Etat pour accompagner l’envol du marché et les efforts déployés sur le site par l’administration. Le patron du Min a pris l’engagement, en rapport avec la Direction générale du pôle urbain (Dgpu) de Diamniadio, de réhabiliter l’axe Diamniadio-Nguith pour plus de mobilité. Pour le sous-préfet de Diamniadio, qui a présidé la rencontre, la solution la plus stratégique pour désenclaver le marché et faciliter la mobilité des produits et améliorer la fréquentation du marché est l’ouverture de l’axe 70.