Halte à la violence !

Cette campagne électorale avait commencé de manière pacifique et l’on se disait que les déclarations de ceux qui menaçaient de troubler la quiétude du vote, parce que leurs candidats n’avaient pas été retenus, étaient juste ce qu’elles étaient, des rodomontades. Même l’arrivée de l’ancien Président Wade, le proclamé «Président de la Rue publique», précédée par une vidéo incendiaire postée sur YouTube, et suivie d’un discours où il incitait à brûler les urnes et les bulletins de vote, n’avait pas semblé troubler le caractère pacifique de cette campagne. Mine de rien, le Sénégal était allègrement sur le chemin de réaliser l’une de ses plus rares campagnes électorales sans violence et, mieux encore, sans victimes humaines.
Malheureusement, il n’a pas fallu longtemps pour que l’on déchante et que les inquiétudes prennent forme. A Kolda, à Tamba, à Fatick, à Saint-Louis et à Mbour, des échauffourées ont opposé les cortèges des différents candidats. Dans ces localités, des militants de la coalition au pouvoir se sont affrontés avec ceux du Pur de El Hadj Issa Sall, ou de Pastef de Ousmane Sonko. A Tambacounda, ces confrontations ont abouti à 3 morts, et même des journalistes ont été blessés.
On ne parle pas ici des accidents de la circulation qui ont également drainé leurs lots de victimes. Cela est inhérent à toute activité humaine, même si on peut déplorer que certaines circonstances en viennent à emporter la vie de personnes, surtout des agents de la Force publique dans l’exercice de leurs fonctions.
Ce que l’on déplore ici, c’est l’apparente passivité des pouvoirs publics qui n’ont pas pris leurs précautions pour éviter certains débordements. On a le sentiment que le ministère de l’Intérieur n’a pas pris au sérieux les risques d’affrontements entre les différents cortèges. D’ailleurs, à une requête informelle de journalistes d’adjoindre des forces de police pour la protection de différents candidats, surtout ceux de l’opposition, M. Ndiaye avait rétorqué que la loi ne le lui imposait pas. Ce qui est exact.
Mais aujourd’hui, même en déplorant les morts, on se rend compte que pour de nombreux cas, ce sont les membres de la coalition gouvernementale qui sont à la base des violences, même si à ce jour, ce sont eux qui ont payé le plus lourd tribut. Penser qu’on peut empêcher les gens de battre campagne sans qu’ils réagissent violemment, c’est faire preuve d’une étonnante naïveté. L’ennui avec la violence, c’est que l’on sait comment elle peut commencer, on ne peut prédire à quoi elle va aboutir. Le Président Macky Sall, avec ses foules impressionnantes, donnait l’impression de se tracer un boulevard de fleurs pour une réélection sans bavure. Une flambée de violences, qu’elle qu’en puisse être la cause ou l’auteur, ne peut que lui être préjudiciable. A près de dix jours encore du scrutin, on ne peut plus parler de climat pacifique quand les morts commencent à se ramasser dans nos rues.
Pour le reste de la campagne, il est du devoir de tous, et de l’Etat en premier lieu, de garantir aux Sénégalais une campagne pacifique, pour une élection apaisée.
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