A la Cité Keur Gorgui, toutes les issues qui mènent au domicile de Ousmane Sonko sont barricadées par la police qui règne désormais en maître dans ce quartier, théâtre de violents affrontements lundi dernier.

Le calme prend place après la tempête et son lot de conséquences. Au petit matin d’hier, le quartier Cité Keur Gorgui, jadis havre de paix, a fait sa mue en quelques heures : débris de véhicule apparents, pierres jonchant le sol et vitres cassées campent le décor. Dans les rues serpentées où maisons en chantier et résidences chics s’entremêlent, des dizaines de policiers bouclent les issues. Tout est barricadé. Outils de protection, kalachnikovs brandies, gants accompagnés de regards intimidants, des éléments de la police sont armés jusqu’aux dents pour dissuader tout militant de Pastef. «On ne peut pas passer ici», intime fermement un policier à des passants. Journalistes, riverains, automobilistes… tous sont priés de faire demi-tour concernant les ruelles sablonneuses qui mènent au domicile du leader de Pastef. Un véhicule noir, aux allures de char de combat, est stationné devant la maison du député Ousmane Sonko, accusé de «viol suivi de menace de mort» par Adji Sarr, une masseuse de 20 ans. Si la tranquillité est revenue dans cet endroit, les visages fermes des quidams sur place sont encore marqués par les casses de la veille. Au siège du Prodac qui garde encore les séquelles des vitres détruites, le vigile refuse de commenter. Il est noir de colère derrière son pull-over bleu nuit. «Je ne peux rien dire», décline-t-il quand il est amené à commenter les chauds évènements du lundi. Son regard perdu est dirigé vers le véhicule réduit en cendres par les manifestants en furie.
Au-delà de la Cité Keur Gorgui, c’est tout le quartier de Sacré-Cœur qui est bouclé par la police. Sur les deux voies reliant la Vdn et la Boulangerie jaune, quatre véhicules se posent sur les trottoirs. Le même constat est de mise au niveau du rond-point allant à Liberté 6. Dans le magasin Auchan Sacré-Cœur, les activités ont repris malgré les actes de vandalisme dont il a fait l’objet lors des manifestations. De loin, on pouvait apercevoir les produits en vente grâce aux trous causés par les jets de pierres. Posté devant le portail brisé, masque anti Covid-19, le préposé à la sécurité distribue du gel hydro-alcoolique aux clients. Devant cette boutique, une vendeuse de masques garde encore en travers de la gorge les pertes causées par les manifestations. Yeux rougis par une détresse sans fin, accoutrement modeste, elle revient sur le film des évènements : «Je suis vendeuse de masques, de poudres contre les insectes. Mais les manifestants ont tout brûlé hier. Je n’ai que mes yeux pour pleurer. Ils n’ont pas causé du tort au gouvernement, mais à des gens qui n’ont rien à voir avec la politique.» Même si on ne sait pas pour combien de temps encore, au vu de la détermination des pro-Sonko lundi, Sacré-Cœur retrouve petit à petit une vie tranquille.